DOC - Bibliothèque malgache

Certains ne craignent pas d'avancer qu'elle n'a commencé à les considérer ......
par ce dernier courrier, une série d'articles de journaux étrangers, critiquant très
...... pour moi une gêne considérable dans l'exercice de mon commandement.

Part of the document


Gallieni Lettres
de
Madagascar 1896-1905 [pic]
[pic]
[pic]
MARÉCHAL GALLIENI
LETTRES DE MADAGASCAR
1896-1905 Il n'y a relativement pas très longtemps que l'opinion publique, en
France, s'intéresse aux colonies comme à un objet d'intérêt primordial.
Certains ne craignent pas d'avancer qu'elle n'a commencé à les considérer
comme telles que depuis la dernière guerre, pendant laquelle leur concours
à la défense et au ravitaillement de nos foyers lui a donné la sensation
matérielle de leur utilité pratique. C'est sans doute aller trop loin. Ce
qui est certain, c'est qu'une évolution s'est accomplie : le point de
départ en fut l'indifférence, voire même des préventions encore très
communes au début des entreprises coloniales de la troisième République, le
stade suivant, un plus juste sentiment de la valeur des possessions d'outre-
mer, et le terme, leur assimilation à un élément essentiel du patrimoine
national.
À cette évolution s'étaient donné pour tâche d'aider, et de suppléer
en attendant qu'elle se fût produite, des Français, dont le nombre, d'abord
et longtemps faible, s'augmenta progressivement. Le monde colonial
français, il y a une trentaine d'années, était encore quelque chose de
restreint et d'assez original. On y voyait se coudoyer et, chose plus rare,
se tenir les coudes, des hommes divers par l'origine, la formation, la
profession et l'âge, réunis par cette conviction commune, que la France
avait besoin d'une politique coloniale. Plusieurs, qui n'en étaient pas
moins différents pour cela, s'étaient connus, ou retrouvés, ou succédés sur
les bancs du Parlement, où ils avaient siégé, les uns longtemps, les autres
peu de temps : ainsi Eugène Étienne, le prince Auguste d'Arenberg, J.
Charles-Roux, Edouard Aynard, Jules Siegfried, Eugène-Melchior de Vogüé,
Paul Deschanel, Lanessan, Le Myre de Vilers, Guillain, André Lebon, Joseph
Chailley, Jonnart, Paul Doumer, Gabriel Hanotaux. Mais simple accident dans
la vie des uns, tandis que l'existence des autres s'y écoulait en majeure
partie, le Parlement n'était pas ce qui les rapprochait : c'était « l'idée
coloniale », et il ne fallait pas moins qu'elle pour rassembler en faisceau
des personnalités si dissemblables. Aussi bien d'autres, qui faisaient
campagne dans les mêmes rangs et qui en achevaient la bigarrure, n'avaient-
ils pas entre eux ou avec les premiers l'artificielle analogie
parlementaire ; c'étaient un financier comme E. Mercet, président du
Comptoir d'escompte de Paris, un savant comme Alfred Grandidier, membre de
l'Académie des Sciences, un économiste comme Paul Leroy-Beaulieu, membre de
l'Institut, un géographe comme Marcel Dubois, professeur à la Sorbonne, des
publicistes comme H. Percher (Harry Alis), Auguste Terrier, Robert de Caix,
des explorateurs comme Brazza, le prince Henri d'Orléans, le colonel
Monteil, E. Gentil, Foureau, Lamy, Marchand, Binger, de grands commerçants,
présidents de chambres de commerce, comme celles de Lyon et de Marseille,
les présidents ou secrétaires généraux de quelques sociétés de géographie,
les chefs de diverses compagnies de navigation et maisons de commission de
Marseille, de Bordeaux et du Havre, les représentants en France du commerce
colonial qui était encore loin du développement qu'il a pris depuis. Peu
importait aux uns et aux autres vers quel point cardinal de l'horizon
politique ils s'orientaient à l'intérieur, pourvu qu'à l'extérieur ils
fussent fervents de la plus grande France. Deux associations principales
les groupaient, qui groupent encore les survivants d'entre eux ou les
continuateurs des disparus : le Comité de l'Afrique française, présidé par
le prince Auguste d'Arenberg, ensuite par Ch. Jonnart, aujourd'hui par M.
A. Lebrun ; l'Union coloniale française, présidée par Mercet, que
J. Charles-Roux a remplacé et dont M. François-Marsal qui a récemment
succédé à M. Le Cesne, dirige maintenant la destinée. Les adhérents des
deux associations se confondaient souvent. Par des méthodes propres à
chacune, qui leur évitaient de faire double emploi, elles se prêtaient main-
forte, en se partageant la besogne, pour défendre la « cause coloniale »,
propager « l'idée coloniale », servir les intérêts des colonies et pays de
protectorat, aider à les mettre en valeur, veiller à la poursuite et à la
continuité de la politique par laquelle s'édifiait et se complétait notre
empire d'outre-mer. Leur activité s'exerçait sous les formes les plus
variées : publication de revues et de bulletins, organisation de cours et
de conférences, collaboration aux expositions coloniales, démarches auprès
des pouvoirs publics et des commissions parlementaires, appui aux
gouverneurs de nos colonies pour l'élaboration des réformes
administratives, l'exécution des grands travaux, l'émission des emprunts,
intervention auprès d'eux pour attirer leur attention sur quelque
amélioration à réaliser, étude des problèmes posés par la colonisation, par
l'exploitation des richesses de nos colonies, encouragement aux recherches
scientifiques dirigées sur notre domaine colonial, diffusion des résultats
obtenus par les voyages d'exploration, des succès remportés par les
expéditions militaires, des mérites acquis par nos coloniaux, officiers ou
civils, propagande en faveur des nouvelles occupations jugées nécessaires.
Avec les hommes qui, dans la métropole, se consacraient bénévolement à
ces soins, ceux qui faisaient ?uvre coloniale en Afrique ou en Asie étaient
promptement entrés en rapports. Civils ou militaires, les gouverneurs
généraux de nos grandes colonies, voire de l'Algérie, et les résidents
généraux des pays placés sous notre protectorat se hâtaient d'utiliser un
concours dont ils avaient eu vite fait de comprendre l'avantage pour eux-
mêmes. Beaucoup se faisaient inscrire, quand ils n'en faisaient pas partie
avant d'avoir reçu leur mission, au comité de l'Afrique française, à celui
qui se fonda ensuite pour l'Asie française, à l'Union coloniale, à la
Société de géographie. Ils s'y montraient pendant leurs congés. Ainsi
firent, pour n'en citer qu'un petit nombre, Paul Revoil, René Millet,
Merlaux-Ponty, Roume, parmi les civils, Gallieni et le maréchal Lyautey,
parmi les militaires. Ils ne dédaignaient pas, quand les appelait en France
la nécessité de prendre quelque repos ou celle de faire progresser une
affaire intéressant le territoire qu'ils gouvernaient, de venir
s'entretenir avec les collaborateurs volontaires qu'ils savaient trouver
dans l'entresol de la rue Cassette, où ont encore leur siège les comités de
l'Afrique et de l'Asie françaises, dans l'hôtel au fond de la cour, rue de
la Chaussée-d'Antin, où l'Union coloniale avait alors son domicile, au
boulevard Saint-Germain, dans la riche bibliothèque ou dans la salle des
séances de la Société de géographie. Leur passage à Paris, comme aussi le
retour des explorateurs qui s'étaient illustrés par un voyage remarquable,
fournissaient généralement l'occasion de quelque congrès ou séance
solennelle, qui servait à attirer l'attention du grand public. De la sorte
des relations et des correspondances s'établirent, des amitiés se nouèrent,
dont certaines ne furent rompues que par la mort et dont bénéficièrent,
dans des fonctions lourdes de responsabilités et de difficultés, la
carrière et l'?uvre de grands serviteurs du pays. Car les dirigeants des
groupements coloniaux, quand ils avaient discerné la valeur d'un officier
ou d'un administrateur, se faisaient un devoir de mettre leur influence à
son service.
Or leur influence, qui ne fut jamais négligeable, s'accrut par l'usage
même qu'ils en firent, par leur persévérance et leur ardeur à l'exercer.
Une sorte de collaboration, dont la tradition ne s'est pas perdue, prit
naissance entre eux et le ministère des Colonies, voire celui des Affaires
étrangères, voire tout autre Département ministériel ayant voix au chapitre
dans une affaire où était en jeu un intérêt colonial. Cette collaboration
était aisée quand, par les hasards de la politique, le titulaire de quelque
portefeuille venait à être choisi dans leurs rangs mêmes, ainsi qu'il
advint pour un Lebon ou un Guillain aux Colonies, un Hanotaux au Quai-
d'Orsay, un Lanessan à la Marine, un Jonnart aux Travaux publics ou aux
Affaires étrangères, un Doumergue au Commerce, un Étienne à la Guerre, un
Doumer aux Finances. Même quand tel n'était pas le cas, il arrivait
pourtant que des relations d'amitié unissaient certains d'entre eux à
d'éminents membres du Gouvernement, comme Delcassé par exemple, qui avait
débuté au pouvoir en qualité de sous-secrétaire d'État des Colonies, à
l'époque où les colonies ne ressortissaient encore qu'à un sous-secrétariat
de la Marine. En aucun cas d'ailleurs, les moyens de se faire entendre
directement des ministres ne faisaient défaut à des hommes dont beaucoup
occupaient de hautes situations qui les associaient à la vie publique, et
plusieurs appartenaient toujours aux assemblées parlemen