Réseau, désir, couple - PASA

Chapitre 6 ? Génération de la demande de déplacements. 1. définitions et choix
de l'unité de mesure. 2. Principales familles de modèles de génération. 3.
Principales ...... Le sous-système des transports occupe le plus souvent une
situation intermédiaire, tout au moins dans les exercices de modélisation les plus
fréquents.

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ORIENTATIONS INTIMES ET CONSTRUCTIONS DE SOI.
Pluralité et divergences dans les expressions de la sexualité.
Michel Bozon, INED
Introduction
L'idée que l'expérience sexuelle est devenue le lieu central de la
construction morale de soi en Occident, avancée dans le second volume de
l'Histoire de la Sexualité (Foucault, 1984) peut être considérée à la fois
comme un résultat, comme une hypothèse et comme un programme de recherche.
Avec le christianisme, cette construction morale a longtemps impliqué
l'acquisition d'une connaissance de soi, préalable à la mise en ?uvre d'une
ascèse et d'une éthique. Au Moyen Age l'épreuve périodique de la pénitence
et sur la purification succédaient à l'aveu de la sexualité en confession
(Foucault, 1976; Flandrin, 1981). Discours théologique et pratique
pénitentielle constituaient alors un système fortement intégré, qui
proposait un traitement unitaire du sujet. Lorsqu'au XIXème siècle la
médecine se substitue à la théologie comme savoir de référence sur la
sexualité[1], la construction du sujet commence à s'effectuer de manière
plus fragmentée à travers les discours et les disciplines qui traitent du
normal et de l'anormal. A l'époque contemporaine, qui veut reprendre après
Foucault le projet d'une histoire du sujet désirant se trouve face à un
véritable défi sociologique, en raison de la diversification toujours plus
grande des discours sur la sexualité, de la multiplication des savoirs et
des pratiques de soi, de l'apparition de mouvements sociaux comme le
mouvement féministe et le mouvement homosexuel qui ont politisé l'intimité,
et de la complexification des trajectoires affectivo-sexuelles. Dans la
construction de soi, le difficile effort pour se connaître, se situer vis-à-
vis des autres et se comprendre, par la quête individuelle des discours et
des savoirs qui permettent de mettre en cohérence des expériences intimes
de plus en plus diversifiées (Lahire, 1998), l'emporte désormais sur
l'ancienne préoccupation éthique de mise en conformité de l'individu avec
un idéal moral absolu. La diversification des expériences de la sexualité Reconnaître la diversité des expériences en matière de sexualité n'est
nullement célébrer une prétendue efflorescence et libération des identités
sexuelles, hors de tout cadre, contexte ou "dispositif ", qui atténuerait
le poids de la construction sociale. Même les formes apparemment les plus
idiosyncratiques et les plus nouvelles des comportements sexuels résultent
d'une élaboration sociale, qui les inscrit inévitablement dans des univers
socio-culturels et dans des classes de trajectoires biographiques[2]. La
nouveauté contemporaine est qu'il n'est plus possible de se représenter la
socialisation à la sexualité comme l'imposition unilatérale d'un ensemble
de normes et de valeurs sociales dominantes. Dans l'introduction à un
recueil de travaux britanniques récents sur la sexualité, Jeffrey Weeks et
Janet Holland indiquent: " Les changements des dernières décennies, qui ont
permis l'émergence d'une sociologie de la sexualité, ont également
transformé la manière dont les sexualités sont vécues. Il n'est plus
possible, si cela a jamais été le cas, de se représenter notre société
comme une forme hégémonique dont tout ce qui s'écarte serait déviance.
Aujourd'hui, de plus en plus, il faut reconnaître que la sexualité est
autant l'effet de l'élaboration et de l'invention des acteurs que la
résultante de régulations macro-sociales ". (Weeks et Holland, 1996,
p.6 ; traduit par nous, M.B). Ce qui se trouve mis en cause, c'est une
vision unitaire du développement psycho-sexuel[3], de même que l'idée d'une
imposition pure et simple du comportement sexuel par la culture. La diversification des expériences et des trajectoires sexuelles,
affectives et conjugales invite à reprendre more sociologico la question
foucaldienne de la place de la sexualité dans la construction de soi et
dans la construction de la culture. Si, dans les dernières décennies, et en
lien avec l'affaiblissement de l'armature institutionnelle de la vie
privée, dont le déclin du mariage est une des manifestations, la sexualité
est devenue un élément de plus en plus fondamental dans la construction du
sujet social, il reste qu'il existe des manières bien différentes de lui
donner sens et de l'inscrire dans les biographies. On fait ici l'hypothèse
qu'il existe des configurations distinctes, en nombre limité, qui associent
de manière stable des pratiques de la sexualité et des représentations de
soi, en sorte que celle-ci contribue de manières très différentes à la
construction des individus. Ces types d'orientation intime constituent de
véritables cadres mentaux, qui délimitent l'exercice de la sexualité,
définissent le sens qui lui est donné et indiquent le rôle que la sexualité
joue dans la construction de soi. Les orientations intimes sont au
fondement de classements sexuels des individus, qui ne se réduisent pas aux
classements sociaux habituels ni aux appartenances héritées (classes
sociales, groupes culturels, genre, groupes d'âge), bien qu'ils puissent
leur être liés; elles prennent leur source dans des processus biographiques
et font corps avec les individus, justement parce qu'elles naissent
d'expériences vécues en première personne. Ainsi le fait que certains
individus ne puissent pas concevoir d'expérience sexuelle non liée à la
conjugalité est à la fois conséquence et cause d'un ensemble d'expériences
biographiques, qui activent des enseignements formels ou informels reçus
depuis l'enfance, dans la famille et hors de la famille. Eminemment
sociaux, ces processus biographiques ne peuvent pas être considérés comme
des choix personnels libres, mais ce ne sont pas non plus de simples
déterminations transmises. Les orientations intimes constituent un niveau
social intermédiaire qui, simultanément, subit l'influence de
fonctionnements macro-sociaux et joue un rôle original dans les processus
de mise en cohérence du sujet. Les orientations intimes, ou les modes de construction de soi par la
sexualité Définir les orientations intimes implique de les distinguer d'un certain
nombre de notions apparemment proches. Elles ne doivent être confondues ni
avec les « orientations sexuelles », ni avec les classements
épidémiologiques, ni avec les classements socio-sexuels spontanés. La
classification en termes d'orientation sexuelle, qui distingue homosexuels,
hétérosexuels, bisexuels, apparue au siècle dernier dans le champ de la
sexologie et de la psychiatrie, avant d'être reprise dans l'enquête de
Kinsey, puis par des " militants de la sexualité ", enfin par des
épidémiologistes, est critiquable en raison de la force de son lien
originel avec la question de la normalité, et pour la confusion qu'elle
introduit entre le registre des pratiques et celui des identités, qu'elle
tend à réduire à une question de choix d'objet sexuel (Katz, 1995;
Halperin, 1990; Costa, 1996) ; la place démesurée accordée à la question du
sexe des partenaires (Giami, 1999) fait que cette classification n'a qu'un
pouvoir descriptif et analytique limité, ne serait-ce que parce que l'une
des catégories regroupe à elle seule 95% de la population. Une autre
manière de classer les individus en fonction de leur comportement sexuel,
couramment utilisée aujourd'hui en épidémiologie, consiste à distinguer les
individus selon la taille de leur réseau de partenaires (monopartenaires vs
multipartenaires) : prises hors de contexte, ces catégories, de nouveau, ne
disent rien sur les significations que revêtent les comportements. Il
existe enfin dans toutes les sociétés et les cultures des catégories de
classification des individus en fonction de leur apparence et de leurs
attitudes en matière sexuelle (Fry, 1982 ; Parker, 1991 ; Bozon, Heilborn,
1996 ; Prieur, 1998); dans les pays de culture latine, les hommes sont
souvent classés selon leur degré de virilité (le macho vs l'efféminé), les
femmes selon leur posture morale (la femme honnête vs la femme facile). Ces
dichotomies révèlent que la production sociale des comportements sexuels
est liée à la construction des rapports de genre (Bozon, 1999), mais elles
n'ont évidemment pas une très grande valeur descriptive dans les sociétés
contemporaines. Notre effort pour identifier des attitudes stables en matière de sexualité
présente des traits communs avec le travail de Luc Boltanski sur les formes
élémentaires de l'amour (Boltanski, 1990), dont l'objectif et la méthode
étaient ainsi présentés : " Pour accéder aux compétences cognitives des
personnes ordinaires, son objet de prédilection, l'anthropologue peut
procéder à une série de va-et-vient entre la tradition et les intuitions
que lui livrent ses informateurs " (p.149, op. cit.). Les formes
élémentaires de l'amour sont moins vues comme des affects et des sentiments
que comme des formes du lien social, des états dans lesquels les individus
sont plongés dans la relation aux autres et des modes d'interaction avec
ces derniers. S'écartant des formulations des modernes, qu'il juge trop
complexes et trop entremêlées, Boltanski décide de s'appuyer principalement
sur les outils forgés par la tradition grecque, pour distinguer trois
variétés d'amour. La philia est une sorte de bienveillance mutuelle, fondée
sur une pratique stricte de la réciprocité entre partenaires, et qui
impliq