Module 2 : Syntaxe de l'oral - Université Paris Nanterre

Syntaxe disloquée : le relâchement de l'intégration constructionnelle que sont la
.... De nombreuses réflexions de linguistique générale ont été ces derniers temps
..... je finissais par l'aide de Figaro -> corrigé en -> je finissais par l'air de Figaro.

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Construire une problématique de l'oral
Séminaire doctoral de Sciences du langage du 3 juin
Organisé par Françoise Gadet
Université de Paris X - Nanterre Françoise Gadet
Université de Paris X - Nanterre
gadet@u-paris10.fr De quelques textes fondamentaux sur l'oral
Avant-propos Contrairement à ce qui se produit dans des domaines où une ?uvre (ou
quelques ?uvres) majeure(s) domine(nt) à tel point le champ qu'elles
s'imposent pour le type de présentation que nous faisons ici, il n'est pas
facile de choisir une ?uvre fondamentale de l'oral et de l'opposition
oral/écrit. Je m'explique cette difficulté par le fait que le champ de
l'oral ne constitue pas une sous-discipline reconnue des sciences du
langage. Il n'existe que comme point de vue, ou comme terrain empirique.
Il existe, en effet, beaucoup de textes concernant l'oral, mais il
n'existe guère de texte cherchant à effectuer une synthèse des points de
vue par lesquels on peut aborder « l'oral en général ». Voici quelques
références de ces textes privilégiant un point de vue (aperçu d'une
bibliographie considérable)[1] : perspectives sémiotique et cognitive
(Chafe, Cheshire & Stein, Jahandarie, Koch, Melis, Miller & Weinert,
Millet, Schlieben-Lange), syntaxe (Apothéloz & Zay, Beguelin,
Berrendonner, Blanche-Benveniste, Cappeau, Debaisieux, Deulofeu, Fornel,
Koch & ?sterreicher 1990, Melis, Miller & Weinert, Morel & Danon-Boileau,
Sauvageot), didactique de langue maternelle ou étrangère (Boutet, Cappeau
& Roubaud, Dannequin, Genouvrier, Labov, Melis, Seguin & Teillard,
Valdman), pragmatique (Auchlin, Chafe, Debaisieux, Gülich, Jeanneret,
Marandin), sociolinguistique (Berruto, Chaudenson et al, Coseriu, Coveney,
Finegan & Biber, Gadet, Koch & ?sterreicher, Labov, Lucci),
ethnolinguistique (Goody, Jahandarie, Lepoutre, Mühlhaüssler, Street),
phonologie segmentale ou supra-segmentale (Armstrong, Delais-Roussarie &
Durand, Fonagy 1983, Lucci, Morel & Danon-Boileau, Zwicky), analyse de
discours ou de conversation (Auchlin, Béguelin, Cameron, Fornel, Fornel &
Marandin, Gülich, Gülich & Mondada, Jeanneret, Tannen), histoire de la
langue (Fonagy 1989, Lodge), psycholinguistique et problématique de la
production de l'oral (Apothéloz & Zay, Miller & Weinert). D'autres champs
sont difficiles à catégoriser (comme la réflexion sur la constitution de
corpus, voir Savelli 2005 qui offre différents points de vue sur les
corpus oraux), ou sont attachés à une problématique qui n'est pas centrée
sur l'oral (comme la stylistique vs l'étude du style).
On aura à se demander si, dans une langue de culture au plus au point
tissée de littératie, il est possible de parler d'oral sans faire
référence à l'écrit. Alors que l'inverse est évidemment possible,
constituant même l'assise essentielle de la grammaire, scolaire ou non,
voire d'une bonne partie de la linguistique. Il n'y a décidément pas
symétrie entre oral et écrit, oralité et scripturalité.
Aussi ai-je pensé qu'une façon de répondre à la consigne de
présentation du séminaire doctoral requérant la sélection d'un texte (ou
d'une ?uvre) fondamental du domaine, était de choisir un texte
d'encyclopédie. J'ai ainsi choisi le texte de Koch & ?sterreicher paru en
2001, pour plusieurs raisons convergentes :
l'occasion de présenter le travail de ces romanistes allemands assez peu
connus en France, qui enseignent le français à Tübingen pour le premier et
à Munich pour le second. Ce texte de 2001 est leur premier travail
important en français ;
le fait que le texte considère l'oral à partir de l'opposition
oral/écrit ;
le fait qu'il cherche à dominer la problématique de ce qui pourrait faire
l'unité d'un point de vue sur l'oral, en effectuant un large tour
d'horizon des secteurs concernés ;
sa très vaste bibliographie, à laquelle je renvoie ; je n'ai fait qu'y
ajouter quelques références, en général plus récentes. Le texte de Koch & ?sterreicher est long (43 pages, très denses), et il
est exclu d'en faire une présentation complète. Aussi ai-je indiqué le
plan général, en privilégiant quelques parties. Des notes ajoutent des
remarques, des bémols ou des objections. J'ai surtout retenu les exemples
et phénomènes concernant le français, alors que le texte traite de toutes
les langues romanes. * *
* KOCH Peter & Wulf ?STERREICHER, 2001, « Langage parlé et langage écrit »,
in Lexikon der Romanistischen Linguistik, tome 1, 584-627, Tübingen, Max
Niemeyer Verlag 1. Aspects théoriques 1.1.Langue parlée/langue écrite vs code phonique/code graphique Parmi les linguistes distinguant entre medium et organisation, Söll
1974 a le mérite d'opposer clairement aspect médial (phonique/graphique)
et aspect conceptionnel (oral/écrit).
L'aspect médial fonctionne en dichotomie stricte, alors que l'aspect
conceptionnel fonctionne en continuum de formes communicatives. Il y a
toutefois des affinités entre phonique et oral, graphique et écrit. 2. Langage parlé/langage écrit : immédiat et distance (Nähe/Distanz) Le continuum communicatif se définit par des données anthropologiques
qui se trouvent à la base de toute communication humaine. Le caractère
métaphorique des termes d'immédiat et de distance permet d'englober tous
les paramètres conceptionnels. | |Immédiat |Distance |
|1. |communication privée |communication publique |
|2. |interlocuteur intime |interlocuteur inconnu |
|3. |émotionnalité forte |émotionnalité faible |
|4. |ancrage actionnel et situationnel|détachement actionnel et |
| | |situationnel |
|5. |ancrage référentiel dans la |détachement référentiel de la |
| |situation |situation |
|6. |co-présence spatio-temporelle |séparation spatio-temporelle |
|7. |coopération communicative intense|coopération communicative minime |
|8. |dialogue |monologue |
|9. |communication spontanée |communication préparée |
|10. |liberté thématique |fixation thématique |
Etc.[2]
Le caractère scalaire de l'opposition est dû à la fois à la gradation
interne des paramètres (sauf 6., où la co-présence est dichotomique[3]),
et à la combinatoire de valeurs paramétriques.
Les « passages » d'un ordre à l'autre relèvent de deux types, et
interviennent dans les deux sens : passages médiaux, phonique vers
graphique, et graphique vers phonique ; passages conceptionnels, immédiat
vers distance, et distance vers immédiat. Les passages médiaux sont
discontinus, les passages conceptionnels progressifs.
L'absence du graphique dans les cultures sans écriture n'implique pas
l'absence de distance communicative : il existe une oralité élaborée
(Chafe 1982). 1.3. Le parlé et l'écrit aux différents niveaux du langage Tout usage du langage met en cause des facteurs relevant des niveaux
universel, historique et individuel (Coseriu).
Niveau universel : Les sujets parlants répondent aux exigences de
l'immédiat et de la distance par des stratégies communicatives relevant de
facteurs cognitifs (référentialisation, prédication, contextualisation,
orientation spatio-temporelle...).
Niveau historique : Il concerne à la fois les traditions discursives
(types de textes, genres, styles...), et les spécificités, pour chaque
langue historique, de versions « parlées » et « écrites ».
Niveau individuel : Le discours comme « acte de parole » ne peut être
saisi qu'à travers des corpus authentiques. 1.4. Primauté de l'oralité, ou primauté de la scripturalité ? Le présupposé du « scriptisme » se développe avec la genèse de la
réflexion linguistique, mais on peut se demander si ce qui apparaît comme
un primat de l'écrit n'est pas davantage un effet de la distance que de
l'écrit, ayant pour effet une marginalisation ou un mépris du parlé.
Le début du 19e siècle voit émerger la linguistique historique et
comparée, qui s'intéresse à la variation (dialecte, langue populaire,
formes ordinaires et familières..., plus tard, créoles). La primauté de
l'oralité se modifie à partir des années 70, sous l'influence de la
sociolinguistique, la linguistique textuelle, la linguistique de
l'énonciation, ou l'analyse conversationnelle. On commence à réinterroger
le rapport entre cultures orales et écriture (Ong, Goody).
Il n'y a donc pas de réponse simple à la question de la primauté : des
points de vue de phylogenèse et d'ontogenèse, les sujets parlants sont
d'abord cantonnés dans l'immédiat communicatif, pour accéder ensuite à la
distance. Des discussions récentes ont attribué le progrès intellectuel et
culturel à l'effet de l'écriture (Goody, Olson), mais il s'agit plutôt
d'effets de la distance communicative, avant même l'écriture. Le passage à
l'écrit qui aboutit à l'élaboration d'une langue est un processus lent, où
la forme écrite en vient à jouir d'un prestige absolu. 1.5. Oralité/scripturalité et changement linguistique On regarde souvent l'oralité comme force motrice de l'innovation
(« français avancé » de Frei), position relativisée dans une discussion
récente autour du caractère innovateur/conservateur du français parlé
(Haussmann). Mais ni l'immédiat ni la distance en tant que tels ne
favorisent l'innovation : il faut examiner le po