Roman - Examen corrige

Nous a-t-on assez répété que « nation » voulait dire naissance ! ...... D'ailleurs
exercez-vous à cet exercice, aussi peu littéraire que possible, qui consiste à ......
La banalité didactique-journalistique nous a blasé des mots dont il faudrait ...... J'
ai la vague idée que l'on ne corrige pas une erreur en y retranchant ; mais toute ...

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ISBN 978-2-8134-098-0
deux temps, trois mouvements
© Pierre Ménard & Publie.net - tous droits réservés
avec 12 photographies de l'auteur
première mise en ligne de ces textes
sur le site Liminaire, de janvier 2005 à décembre 2006
première mise en ligne sur Publie.net en juin 2010 JANVIER 2T3M1.png Son comportement est inadmissible. Je vous le dis moi. Non mais c'est vrai.
Tout à coup, on ne sait pas pourquoi, elle se ferme. On ne l'entend plus.
Rideau. Quand on lui pose des questions, il faut la forcer à répondre. À
peine un murmure. L'impression d'avoir dit un mot de trop. Je ne dis rien.
Son aveu sur le pas de la porte comme une ridicule vengeance. Elle croit
faire mouche, mais c'est elle qu'elle touche. Une fois dehors j'explose,
libéré d'un poids. Elle entre dans l'appartement en silence, s'approche lentement de la
salle de bain, la porte est entrebâillée, travelling avant, une épaisse
vapeur d'eau brouille la vision qu'on a sur le seuil de la porte de
l'homme endormi dans son bain. Elle s'approche plus encore. L'homme fait
semblant de dormir. Elle pointe son arme sur sa tempe. Il l'attrape à la
volée, avec un geste vif, viril, qui la surprend. D'une pression du bras,
plus que dans un mouvement, il l'oblige à se rapprocher de lui. Regard
prolongé. Silence. Puis ils s'embrassent. Elle le rejoint dans son bain
toute habillée, son uniforme dans l'eau. Puis elle revient à elle. Encore
une fois, fantôme rime avec fantasme. Le film de nos vacances en Berry. Les images des filles, je peux revoir
certaines scènes plusieurs fois de suite, leurs expressions mignardes,
leurs mimiques complices, me font rire. « C'est pas vrai. » Je me surprends
à le répéter à haute voix.
D'abord il n'y a rien, bouffées de chaleur, peur au ventre assujetti à de
légers picotements du bout des doigts. La peur du vide, loin la feuille
blanche depuis longtemps l'écran plat. Que faire ? Les lignes du bilan de
l'année dernière se brouillent. Broutilles. Comme les v?ux, à quoi ça sert
? À vos souhaits... Vouloir aller trop vite jamais bien. Copier / Coller /
Couper. La meilleure solution. Et la santé. Amour, gloire et. Tout vient à
point. Elle apparaît dans la lumière. Je la reconnais de suite, force
évidence, rousse aux yeux bleus. Nez pointu, dents blanches. Pommettes
saillantes et peau blanche. Vous êtes moins à l'étroit que dans l'ancienne
bibliothèque, me dit-elle. Cela faisait longtemps, je lui réponds. Je lui
laisse imaginer la suite. Vous aussi. Finir le bilan pour demain. De la
suite dans les idées. Avec son sourire qui me poursuit. Son regard qui
m'accompagne. D'abord il n'y a rien. La peur du vide Elle appelle à la maison. Je sors de la douche en peignoir. Elle veut
parler à son amie, mais ma femme n'est pas là. Discussion autour des bonnes
résolutions de la nouvelle année. Me sortir, dit-elle. Ce que je comprends,
car les filles s'impatient déjà dans le salon. La musique, la musique. Pour
que je remette la musique. Je raccroche et m'exécute.
Des personnages fictifs ou réels. Le temps d'avant. À peine vu le visage
de cette femme derrière sa fenêtre, l'allure d'une très vieille femme
courbée, le corps ployé, voûté, les doigts accrochés à son rideau d'un
tricot plus très blanc. Solitude qui sent la soupe tiède. Une image de
plus. Faut voir. De l'air. Ses rides, pas un pli, dans les trous du filet,
la maille à papillons. Une image fantôme qui se construit tous les jours.
Le bus passe sans s'arrêter. Il fait froid, le ciel encore bleu gris rosé
en fin de journée. Le partage des images. Les détails de la ville comme un
jeu de Légo. Les rapports entre réalité et fiction. Le temps d'après. Une affiche pour le magazine Capital. Dans la salle des pas perdus de la
Gare de Lyon. Juste devant l'escalator. Un couple allongé, les deux corps
inertes, l'un à côté de l'autre sur le sable, immobiles, à moitié recouvert
par une vague. « Les nouveaux vacanciers. » C'est écrit.
L'admiration est plus facile que le respect, que l'estime, contre
mauvaise fortune bon c?ur. J'avance sur le quai de la gare sans prévenir
personne, en un mot comme en cent, ça ne prouve rien, comme si de rien
n'était. De quoi s'agit-il ? C'est comme un jeu de construction, un rappel
à l'ordre, un geste social, une redéfinition du rôle de l'artiste, cela ne
va pas de soi pourtant, reposant sur la spécificité de la division du
travail et la propriété de l'individu. Je ne la vois pas tout de suite, il
fait nuit. Dans l'écoute toute la journée. Réunion et atelier. Éléments de
réflexion, miroir où voir poindre les itinéraires que je ne parviens pas
transgresser, précipitation de désirs, lente conspiration. Sur son banc,
dans le froid, le pied nu, velours dessous, acier dessus. Dans ses sandales
striées les pensées, striés les doigts que j'use à écrire, avec toi,
maintenant. L'admiration est le propre de l'imbécile. Chercher je ne sais
pas quoi, une ritournelle de la voix aimable, des bouts de pensées,
insolentes ou tendres, fixées comme des jalons parmi d'autres, des échos
incertains, une panoplie d'avenirs possibles, un adoucissant, un signe
particulier, un fait d'âme, une fête, ni plus ni moins. Au petit-déjeuner, Caroline évoque à demi-mot un rêve érotique nocturne
entre le fond sonore de la radio (les informations) et le bruissement des
filles. Elle ne m'en dit pas plus car c'est l'heure de préparer les filles
pour aller à l'école. Dans la soirée, après l'amour, elle m'avoue un peu
honteusement que dans son rêve elle « se chauffait » avec Joey Star. J'ai
tout enregistré. Comme les musiciens sur scène ont un retour, ce qu'ils
jouent leur revient aux oreilles. J'aime ce retour sonore. Faire l'amour
comme on joue de la musique.
Une partie de son sens, de son énergie, dans son contexte. Le flux et la
recherche par mots clés. Informations, innovations, ruptures,
franchissements de seuils. L'ère du vide, l'objectif Live est tout simple :
vous faciliter la vie en rassemblant tout dans un seul endroit, je dis bien
tout. Atteintes potentielles à la vie privée. Elle veut extraire des images
fixes de son film vidéo. Ce que je vois d'abord, des enfants, une fête, un
goûter d'anniversaire. L'ampleur que prendra le phénomène est difficile à
mesurer. Elle s'est filmée sur toutes les coutures. Elle prend des poses
suggestives en sous-vêtements, déhanchement, genou levé, moue sensuelle.
Couleurs saturées au grain vulgaire. D'ores et déjà intimement mêlés.
Etroite interpénétration des trois sphères. Ces atteintes collatérales à
leurs vies privées. Selon quels critères et sous la responsabilité de qui ?
La marchandisation de nos mémoires, non plus documentaires mais intimes, se
profile à l'horizon. Il vaut mieux le savoir. Je regarde ses yeux bleus, son sourire, elle me sourit, me perce à jour,
je m'en fous, je souris à mon tour et lui tends sa carte. Elle me remercie.
Ses yeux bleus, merci encore. Son doigt tendu me désigne. Une cicatrice. Ce
défaut me la rend plus belle encore, mais moins inaccessible. Ce que je me
dis en la voyant s'éloigner.
Les résolutions. Sur une feuille à grands carreaux. Se tenir à. Pour
l'année qui vient. Sous forme de jeu avec les filles. Rouge sur blanc.
Chacun note les résolutions des autres. La liste s'allonge peu à peu.
Alice. Ne plus faire la tête pour un oui pour un non. Ranger sa chambre
quotidiennement. Ma révolution porte ton nom. Ma révolution n'a qu'une
seule façon de tourner le monde. Nina. Ranger sa chambre quotidiennement.
Finir ce qu'il y a dans son assiette. S'habiller toute seule. Ecouter ce
qu'on lui dit. Alice se trompe de mots, elle dit les révolutions. Maman.
Ranger ses affaires. J'étais à peu près, je suis exactement, la femme que
j'espérais. Papa. Manger moins de bonbons. Faire le petit-déjeuner une fois
par semaine. Passer moins de temps sur l'ordinateur. Parler avec elle et dans l'élan de la conversion, le plaisir qu'on y
ressent, laisser échapper par mégarde, sans même sans rendre compte,
l'autre en retour obligé de nous le faire remarquer, de dénoncer au grand
jour ce lapsus révélateur, une confusion avec une autre personne. Se
tromper sur l'identité de la personne qu'on évoque. Une autre fille avec
qui j'ai passé la journée à travailler sur un film.
Sous la table l'objectif. Les jambes croisées. Voir sans regarder. L'oeil
est la page blanche. Il succombe au regard. La plus jeune, sous la table.
Son regard, hésitante, sa voix légèrement tremblante, retrouver le nom de
tous les convives. Elle égrène le nom de chacun. Sous la table. Sur quelle
tête finira la couronne ? Roulement de tambours. Flashs et souffle coupé.
Chacun son tour. Dans l'émotion du moment, le nom de cet inconnu qu'on lui
souffle, elle en oublie de me nommer. Passé mon tour. Sous la table.
Adorable oubli. L'oeil est dans la tombe. Il succombe à la page blanche.
Une épiphanie. Douche après avoir couru ce matin. Du monde à la maison à mon retour, ça
beau être prévu, toujours une surprise. Je me presse. Du fouillis dans la
salle de bain. Du linge en pagaille. Nina a vomi plusieurs fois.
Désagréable sensation d'oppression à sentir l'humidité de sa peau (mal
séchée et déjà en sueur), sur les vêtements (chemise et jean). Olivier
découvre mon lecteur enregistreur vidéo. Il s'en empare avec sa
décontraction habituelle, cette assurance désinvolte, et regarde les films
que j'y ai enregistrés. Je prends un air dégagé pour lui expliquer, à
distance, le fonctionnement