BRAS - Zatopek Magazine

L'acceptation de la règle dépend du lieu institutionnel de son exercice (la société
, l'organisation, le groupe, etc.). C'est le mode privilégié de l'institutionnalisation (
qui ne débouche pas forcément sur l'institution) et donc de la « fondation ?
refondation » du corps social, la refondation s'instituant au regard de l'évolution
de la ...

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Zatopek n°11 Courir avec les bras
Par Roger Igo Beaucoup de gens pensent que les bras ne jouent qu'un rôle accessoire en
course à pied. On n'a pourtant jamais vu un marathonien courir les mains
dans les poches. Commençons par une démonstration très simple que chacun peut faire dans
l'intimité de sa salle de bains. On se met sur la balance, puis on lève et
on baisse les bras plusieurs fois de suite. On constate alors de fortes
fluctuations du poids affiché qui passe de 10 à plus de 150 kilos. Bien
sûr, cela ne change rien au poids réel. Ces mouvements font seulement
varier les forces enregistrées au niveau du sol. Or il s'agit d'une notion
extrêmement importante pour qui veut comprendre l'importance du travail des
bras dans la course à pied. Pourquoi les sprinteurs ont des gros biceps
Ce petit test sur la balance doit nous faire réfléchir à la façon de
concevoir le geste sportif, notamment en athlétisme où les entraîneurs ont
longtemps été obsédés par des questions de puissance, surtout au niveau des
pieds, des jambes et des cuisses. On considérait alors que le meilleur
athlète était forcément celui qui parvenait le mieux à s'extraire
temporairement des forces de gravité pour sauter plus haut, plus loin et,
bien sûr, pour courir plus vite que les autres. C'est effectivement le cas.
Mais on pensait aussi que son secret résidait principalement dans la
"poussée" qu'il était capable d'exercer contre le sol en phase d'envol. Et
là, on doit un peu réviser son jugement. Dans les laboratoires de
biomécanique, on s'est efforcé d'enregistrer cette poussée avec des
appareils appelés "plates-formes" ou "tapis de force". On peut se les
représenter comme des balances hypersophistiquées dotées d'une prodigieuse
mémoire, capables de mesurer les pressions à la fraction de seconde.
Problème: on réalise alors que celui qui pousse le plus fort contre le sol
n'est pas toujours le plus performant en situation réelle. Beaucoup
d'autres paramètres entrent en ligne de compte, notamment l'instant précis
auquel s'exerce cette fameuse poussée. Est-ce un moment propice au
décollage? Ou survient-il au contraire dans une phase d'écrasement?
Revenons à l'exemple du type en train de gesticuler sur sa balance. La
poussée intervient-elle quand le poids affiché est plus grand ou plus petit
qu'en réalité? Car cela change tout! Vous pouvez disposer d'une force de
mammouth, mais, si, par défaut de coordination, vous l'utilisez à mauvais
escient, vous resterez cloué au sol. Et tous vos muscles ne servent à rien!
Pour bien analyser un mouvement, on doit donc prendre en considération
l'ensemble des forces "extérieures" d'interaction de la personne avec son
environnement -comme précisément ces mesures enregistrées sur tapis de
force- mais également toutes les forces "intérieures" entre les différents
segments. Les techniques d'enregistrement vidéo ont permis d'accomplir des
progrès fantastiques en matière de décomposition du mouvement. De ce fait,
on comprend mieux les stratégies qui permettent aux meilleurs sportifs de
la planète de mobiliser l'ensemble du corps pour soulager le travail des
jambes et compenser ainsi un éventuel manque de puissance. Cela permet
aussi de comprendre pourquoi les sprinteurs sont tous bâtis comme des
armoires à glace. Ils ont compris que pour courir vite, chaque segment doit
se déplacer au maximum de sa vitesse. Cela concerne les jambes et les
cuisses, bien sûr. Mais aussi les bras et les avant-bras. D'où leur carrure
de déménageur. Un autre exemple? Prenons le cas du saut en longueur, ou en
hauteur, c'est pareil. La plupart des gens s'étonnent qu'on prenne le plus
souvent sa battue sur son mauvais pied. A gauche pour un droitier, à droite
pour un gaucher. Curieux, en effet. Pourquoi ne pas utiliser le pied
présumé le plus fort? L'explication est fort simple. C'est que le rôle de
la jambe libre est plus important encore que celui de la jambe d'appel.
Ainsi un droitier sera capable de doter sa jambe droite d'une plus grande
quantité d'accélération favorable au décollage. Les spécialistes utilisent
parfois l'expression "jambe intelligente" à son propos par opposition à
celle de l'autre côté, la "jambe bête" dont le boulot consiste à résister
aux pressions qui s'exercent sur elle. Lorsqu'il s'agit de sprinter, de
sauter ou même de lancer un objet ou de frapper dans une balle, on doit
bien comprendre que l'ensemble du corps participe au mouvement et donc que
cela concerne autant les muscles du bas du corps que ceux du haut, comme
les bras évidemment. Ainsi font, font, font... les coureurs de fond
Dans les courses de fond, le mouvement des bras revêt aussi une grande
importance. L'objectif est toujours le même: doter son geste de la plus
grande efficacité possible de façon à tirer un maximum de bénéfice de
chaque calorie dépensée. Chose curieuse: les enfants y parviennent
relativement bien. L'analyse biomécanique de la foulée qu'ils adoptent
spontanément ne révèle pas de gros défauts. Ils sont assez bien coordonnés
dans l'ensemble. Légers, rapides, aériens. Malheureusement, cette aisance
se perd dans le cours de la vie. Du moins pour ceux qui ne l'entretiennent
pas. Et lorsqu'après quelques années ou parfois quelques décennies
d'oisiveté, ils décident de s'y remettre, il leur faut réapprendre tout ce
qu'ils savaient faire intuitivement au début de la vie. Comment respirer?
Comment dérouler le pied sur le sol? Et surtout, comment bouger les bras?
Certes, ce dernier point retient rarement l'attention. Le coureur -surtout
le néophyte- pense plus naturellement à ses jambes. La première chose
consiste donc à prendre conscience de l'importance du haut du corps. Pour
cela, on procède parfois à des exercices de course avec les mains dans le
dos (attention aux chutes), avec les mains au devant de soi comme un
somnambule (attention le ridicule) ou en s'inspirant de celle du marin
Popeye des vieux dessins animés où on le voyait courir avec les coudes à
l'horizontale, accompagnant chaque foulée de larges rotations du tronc. En
exagérant les mouvements parasites, on prend ainsi conscience de leur
existence et petit à petit, on s'entraîne à les éliminer. Chacun fait ce qui lui plait
Que faire de ses bras pendant la course? Première solution: on peut les
balancer d'avant en arrière comme un sprinteur afin de soulager le travail
du pied sur le sol et allonger la foulée. Efficace mais coûteux du point de
vue énergétique. A l'inverse, on peut garder les bras proches du corps et
opter pour un déplacement minimaliste particulièrement peu gourmand en
énergie. Chacune des deux possibilités comporte des avantages et des
inconvénients, ce qui permet de comprendre pourquoi tant de façons de faire
différentes coexistent dans la nature. Buffon, le naturaliste français du
18e siècle (... pas le gardien de but) disait: "Le style c'est l'homme, il
y a autant de styles que d'individus". Sans doute ne parlait-il pas des
pelotons de coureurs à pied, mais l'adage s'applique à la perfection
lorsqu'il s'agit de décrire leurs mouvements de bras. Il n'existe donc pas
une bonne manière de courir. En revanche, on peut pointer du doigt une
série de gros défauts qui freinent la progression et usent l'organisme. Par
exemple, il faut éviter les rotations du tronc. Certains coureurs donnent
ainsi l'impression de boxer l'air en avançant. En général, ils ne s'en
rendent absolument pas compte. Les injonctions du style "arrête de bouger
les épaules" seront sans résultats. "Mais je ne bouge pas les épaules",
répondent-ils immanquablement. Pour corriger leur geste, on sera beaucoup
plus inspiré de leur demander de se concentrer sur le travail de bras et
l'importance d'inscrire ce mouvement dans des plans parallèles. Toute
déviation frontale (NB: les avant-bras se croisent devant la poitrine)
conduira immanquablement à une rotation importante du tronc. A moins de
courir en zigzag comme les poules, ce mouvement devra obligatoirement être
corrigé au niveau lombaire, ce qui risque à la longue d'entraîner des
blessures discales et de coûter aussi très cher en termes d'efficacité. Il
faut toujours considérer le bassin comme le véritable châssis de
l'organisme. S'il bouge, le véhicule est bon pour partir à la casse. Voilà
pour les bras. Ensuite, il faut penser à la position des mains. A chaque
moment du balancier, elles restent au-dessus du niveau de la ceinture,
alignées dans le prolongement des avant-bras. Le poignet légèrement croqué
vers le bas effectue un léger fouetté en fin de la phase arrière du
mouvement comme pour chasser l'air derrière soi. Les paumes des mains se
font face. On doit pouvoir les apercevoir furtivement, l'une puis l'autre,
en vision périphérique au plus haut point du balancier. Sans incliner la
tête bien entendu. La caractéristique du coureur de fond est de regarder
loin devant soi; histoire de se tenir bien droit et de ne pas perdre sa
concentration. Les doigts sont légèrement repliés, sans trop de tension,
comme si vous teniez un ?uf (sans le casser) ou un petit oiseau (sans
l'étrangler). Pas besoin d'écarter les doigts (comme Carl Lewis) ou de
rentrer les pouces comme Brian Sell (voir page 14). Bref, rien qui pourrait
générer des tensions à long terme.
Les bras prennent le pouvoir
Dans l'esprit du plus grand nombre, les jambes battent le bitume et les
bras sont chargés de conserver l'équilibre pour ne pas se casser la figure.
Ce n'est pas totalement faux. Mais on peut s'amuser aussi à voir les choses
différemment avec une organisation gestuelle qui descendrait du haut vers
le bas. Autrement dit, pour mettre en branle toute la charpente osseuse, on
commencerait par balancer les bras. Et si l'on veut augmenter l'allure?
C'est très simple. Il suffit d'accélérer les bras... et les jambes
suivront! On peut ainsi facilement passer d'une fréquence d'environ 3,5
foulées par seconde, qui caractérise la course de fond, à la fréquence de
4,7 des meilleurs sprinteurs. Cette façon de faire comporte des avantages
lorsqu'on est en situation de devoir adapt