A La détermination de la liberté de circulation applicable

B Les restrictions possibles à la liberté de circulation des capitaux avec les pays
tiers .... Pour autant, en matière fiscale comme dans l'exercice de leurs autres .....
la société distributrice relève aussi bien des articles du traité relatifs à la liberté ...

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L'encadrement de la compétence des États membres
en matière fiscale par le droit communautaire
Bernard Chevalier, magistrat de l'ordre judiciaire
référendaire à la Cour de Justice des Communautés européennes [1]
I L'existence d'une discrimination ou d'une restriction 7 A La détermination de la liberté de circulation applicable 8
B La portée des notions de discrimination et de restriction 11
1 L'encadrement de la compétence de l'État de la source des revenus ou
des bénéfices 13
a L'imposition des personnes physiques 14
b L'imposition des sociétés 18
2 L'encadrement de la compétence de l'État de résidence 21
C Les désavantages résultant simplement de la disparité des régimes
fiscaux des États membres ou de l'exercice par les États membres de leur
compétence 22
D L'incidence des conventions bilatérales 24 II L'existence d'une justification 25 A Les motifs de restriction admissibles entre États membres 26
_ La nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal 27
_ La nécessité de préserver l'efficacité des contrôles fiscaux 29
_ La lutte contre la fraude ou l'évasion fiscales 31
_ Le principe de territorialité 32
_ La sauvegarde d'une répartition équilibrée du pouvoir d'imposition
entre les États membres 33
B Les restrictions possibles à la liberté de circulation des capitaux
avec les pays tiers 34 Comme l'indique l'article 5 du traité qui institue la Communauté européenne
(ci-après le "traité"), celle-ci "agit dans les limites des compétences qui
lui sont conférées et des objectifs qui lui sont assignés par le présent
traité".
En l'état actuel de ses attributions, la Communauté ne dispose que d'une
compétence très limitée en matière fiscale. Ainsi, dans le traité, la fiscalité n'est visée ni parmi les objectifs
assignés à la Communauté, définis à l'article 2, ni dans les politiques ou
les actions de celle-ci, énumérées à l'article 3. Le traité ne comporte que quatre articles consacrés expressément à la
fiscalité, les articles 90 à 93, qui s'insèrent dans le titre consacré aux
"règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le rapprochement des
législations". Les articles 90 à 92 prohibent ou encadrent les impositions sur les
produits pouvant compromettre la libre circulation des marchandises entre
les États membres. L'article 93, quant à lui, attribue à la Communauté le pouvoir de prendre
des dispositions touchant à l'harmonisation des législations des États
membres en matière d'"imposition indirecte", notamment en ce qui concerne
les taxes sur le chiffre d'affaires et les droits d'accises. Sur le
fondement de cet article, plusieurs textes ont été adoptés par le Conseil
en ce qui concerne, notamment, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les
accises et les rassemblements de capitaux. Ces articles ont donc une portée restreinte et n'ont conféré à la
Communauté que des pouvoirs limités à ce qui est apparu nécessaire à
l'établissement du marché commun, en particulier à la liberté de
circulation des marchandises. En matière d'"imposition directe", qui couvre, selon la définition de cette
notion par la Cour de justice des Communautés européennes (ci-après la
"Cour de justice"), l'impôt sur le revenu, l'impôt sur la fortune, l'impôt
sur les successions et l'imposition sur les bénéfices des sociétés, le
traité n'attribue pas expressément de compétence à la Communauté. Celle-ci ne pourrait légiférer dans cette matière que sur le fondement de
l'article 94 du traité, qui lui donne compétence pour prendre les
directives nécessaires au rapprochement des dispositions des États membres
qui ont une incidence directe sur le marché commun. Ce texte prévoit
cependant que de telles directives doivent être prises par le Conseil
statuant à l'unanimité, ce qui rend leur adoption très difficile dans un
domaine comme la fiscalité directe, dans lequel les États membres ont,
jusqu'à ce jour, voulu conserver l'exercice de leur souveraineté [2]. Cela explique que quelques directives seulement ont été adoptées dans le
domaine de la fiscalité directe. Ces directives portent sur les trois
thèmes suivants: premièrement, la coopération administrative entre les
États membres pour l'établissement et le recouvrement de l'impôt (directive
77/799/CEE, en ce qui concerne l'échange de renseignements; directive
76/308/CEE sur le recouvrement de créances, modifiée à plusieurs reprises,
dont le champ d'application a été étendu aux impôts sur le revenu et sur la
fortune par la directive 2001/44/CE, et qui a été codifiée par la directive
2008/55/CE); deuxièmement, la répartition du pouvoir d'imposition entre les
États membres pour la taxation d'opérations effectuées entre des sociétés
situées dans des États membres différents: d'une part, le versement de
dividendes par une filiale à sa société mère (directive 90/435/CEE),
d'autre part, les fusions, scissions, apports ou échanges d'actions
(directive 90/434/CEE) et, enfin, les paiements d'intérêts et de redevances
(directive 2003/49CE), et, troisièmement, la fiscalité de l'épargne des
particuliers (directive 2003/48/CE, visant à garantir l'imposition dans
l'État de résidence des intérêts versés dans un autre État membre).
Il s'ensuit que les États membres demeurent compétents pour définir
l'étendue de leur pouvoir de taxation en matière d'impôt direct, en
particulier l'assiette et le taux de l'impôt, ainsi que les modalités de
recouvrement. Ils sont également compétents, dans les nombreuses situations
transfrontalières qui ne sont pas couvertes par les directives précitées,
pour se répartir le pouvoir de taxation. L'article 293 du traité dispose, à
cet égard, que les États membres engageront entre eux des négociations en
vue d'assurer l'élimination de la double imposition à l'intérieur de la
Communauté en ce qui concerne leurs ressortissants. Toutefois, à ce jour,
ils n'ont adopté que la convention 90/436/CEE, dont le champ d'application
se limite à la correction des bénéfices des entreprises associées. La fiscalité directe demeure donc une compétence réservée des États
membres. Pour autant, en matière fiscale comme dans l'exercice de leurs autres
compétences réservées, les États membres ne doivent pas méconnaître les
engagements qu'ils ont souscrits dans le traité. La Cour exprime ce
principe par la formule rituelle selon laquelle, si la fiscalité directe
relève de la compétence des États membres, ces derniers doivent exercer
celle-ci dans le respect du droit communautaire. Concrètement, la compétence réservée des États membres en matière de
fiscalité directe se trouve encadrée par deux types de normes
communautaires, d'une part, les règles en matière d'aides d'État, c'est-à-
dire les articles 87 et 88 du traité ainsi que les actes de droit dérivé
pris pour leur application, et, d'autre part, les libertés de circulation
instaurées par le traité.
Il s'agit > de la liberté de circulation des travailleurs, prévue à l'article 39,
> de la liberté d'établissement, prévue à l'article 43,
> de la libre prestation des services, énoncée à l'article 49, ainsi que
> de la liberté de circulation des capitaux et des paiements, prévue à
l'article 56.
> de la liberté de circulation et de séjour des citoyens de l'Union,
conférée par l'article 18. Dans le cadre de la présente étude, nous nous limiterons à la présentation
des grandes lignes de l'encadrement de la compétence des États membres dans
le domaine de la fiscalité directe par ces libertés de circulation. La liberté de circulation des travailleurs, la liberté d'établissement et
la libre prestation des services ont pour objet de permettre aux
ressortissants communautaires d'exercer des activités professionnelles dans
n'importe quel État membre de la Communauté, en qualité de travailleur
salarié ou de travailleur indépendant, à titre permanent ou temporaire,
dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État. La liberté de
circulation des capitaux, quant à elle, prohibe toute restriction aux
mouvements de capitaux non seulement au sein de l'Union, mais également
entre les États membres et les pays tiers. Les libertés d'établissement, de prestation des services et de circulation
des capitaux sont également garanties par le traité en faveur des sociétés
constituées en conformité avec la législation d'un État membre et qui ont
leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal
établissement à l'intérieur de la Communauté, et qui poursuivent un but
lucratif. Enfin, depuis l'entrée en vigueur du traité de Maastricht, le 1er novembre
1993, les personnes physiques ressortissantes d'un État membre ont
également, en qualité de citoyen de l'Union, le droit de circuler et de
séjourner dans l'État membre de leur choix, dans les conditions harmonisées
au niveau communautaire. Les États membres, dans le cadre de l'exercice de leur compétence réservée
en matière fiscale, ne doivent donc pas porter atteinte à ces différentes
libertés de circulation. Cette prohibition des mesures contraires aux libertés de circulation
entraîne des conséquences importantes pour les autorités des États membres,
en particulier pour leurs juridictions. En premier lieu, conformément au principe de primauté du droit
communautaire, dégagé par la Cour de justice dans l'arrêt du 15 juillet
1964, Costa (6/64, Rec. p. 1141), et en vertu de l'effet direct de chacune
des libertés de circulation in