Eugen Bertolt Friedrich BRECHT - Comptoir Littéraire

Sous la farce paysanne, on trouve donc une fable profonde et un héros qui ... Le
coeur bat, les genoux tremblent, l'amour s'y abîme. ... Dans ''Tambours dans la
nuit'', le soldat Kragler récupère sa petite amie, quoique "abîmée", et tourne le
dos à ..... des sortes d'exercices dialectiques que comme des ?uvres à part
entière.

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www.comptoirlitteraire.com André Durand présente Bertolt BRECHT (Allemagne) (1898-1956) [pic] Au fil de sa biographie s'inscrivent ses ?uvres
qui sont résumées et commentées
(surtout '' Mère Courage'', pièce étudiée dans un dossier à part).
Bonne lecture ! Né à Augsbourg, en Bavière, le 10 février 1898, dans une famille
bourgeoise, il était le fils d'un employé dans une fabrique de papier qui
en prit la direction en 1914, qui était catholique. Mais il fut élevé dans
le protestantisme de sa mère. Il fut élève du «Gymnasium» d'Augsbourg dans
la revue duquel, à l'âge de quinze ans, sous le pseudonyme de Bertold
Eugen, il publia sa première pièce, ''La Bible''. Puis il entreprit des
études de philosophie puis de médecine à l'université de Munich, mais elles
furent interrompues par la Première Guerre mondiale, quand il fut, en 1918,
mobilisé comme infirmier dans un hôpital militaire à Augsbourg. Cette
expérience confirma sa profonde haine de la guerre, lui inspira son très
violent poème atirique ''La ballade du soldat mort'', et raviva sa
sympathie et sa ferveur pour le socialisme. De cette époque datent sans
doute ses premières ballades, dont ''La légende du soldat mort'', ainsi
qu'une première version de ''Baal''. Après la guerre, toujours entre
Augsbourg et Munich, ce jeune homme, maigre et mal rasé, à la tenue
négligée, qui s'exprimait en dialecte souabe, fréquenta le milieu théâtral,
s'y liant notamment avec Karl Valentin, qui lui inspira peut-être certaines
de ses pièces en un acte, et le milieu révolutionnaire. Il chanta ses
poèmes dans les cabarets littéraires (dont celui de Karl Valentin) en
s'accompagnant lui-même à la guitare. Il participa activement, à Munich, à
la révolution de novembre 1918 qui délivra l'Allemagne du militarisme et de
l'impérialisme et vit la formation du Parti communiste allemand. Fin
janvier 1919, quelques jours à peine après l'écrasement de l'insurrection
spartakiste à Berlin, il entreprit la rédaction d'une pièce qu'il acheva en
six semaines :
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_____ ''Spartakus''
(1919) Drame Un soldat qui revient de guerre retrouve sa fiancée engrossée par un autre,
se fait jeter dehors par les riches parents de la demoiselle, fréquente les
bistrots et les rues du prolétariat, excite les travailleurs à la
révolution et se met à leur tête pour prendre d'assaut le quartier des
journaux. Arrivé à ce point, le manuscrit partait dans différentes
directions. Plusieurs variantes étaient proposées. Dans l'une d'elles, tout
à fait caractéristique, la jeune femme rejoint son soldat en plein combat,
et celui-ci, maintenant qu'il l'a récupérée, laisse tomber la révolution,
prend avec lui la jeune fille (bien qu'un peu « abîmée ») et s'en va. Il en
a jusque-là, la révolution, c'est bon pour les affamés ; maintenant il
rentre chez lui, où un grand lit blanc est tout prêt Commentaire Alors que l'expressionnisme était très à la mode, la pièce était plutôt une
ballade dramatique lancée d'un seul trait, sous une forme très peu
littéraire. Les personnages y parlaient une langue hors des modes, sauvage,
puissante, colorée, qui n'était pas puisée dans les livres mais tirée de la
bouche du peuple.
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_____ ''Hans im Glück''
(1919)
''Jean la chance'' Pièce de théâtre Jean est un paysan simple et naïf, qui se laisse (bien) vivre dans sa ferme-
auberge avec sa femme. Arrive un homme de la ville qui la séduit. Elle
quitte Jean et lui laisse la ferme. Jean échange la ferme contre deux
charrettes, une charrette contre l'amitié, la seconde contre un manège, le
manège contre une oie, l'oie contre la compagnie des hommes... Il est
finalement dépouillé de tout. Commentaire C'est un conte des frères Grimm du même titre qui inspira à Brecht cette
pièce qui est très différente de ses autres pièces, car c'est un texte très
poétique, où les personnages sont dessinés comme au trait. Dans le conte,
Jean est un paysan qui a beaucoup travaillé et qui procède à une série
d'échanges : il échange son lingot d'or contre un cheval, puis contre une
vache, etc. ; il finit avec une pierre qu'il jette dans le puits et se
libère ainsi de toute contrainte, de tout « poids », matériels. Chez
Brecht, Jean, homme bon, naïf, simple, est un être solaire, lumineux, une
figure de la résistance. Il est à la fois innocent et coupable : innocent
de l'état du monde et coupable de ne pas pouvoir / vouloir le combattre.
Jean, au cours de son errance, perd tout ' y trouve-t-il le bonheur?
l'achèvement? la nudité originelle? son identité? la mort? Dans sa bonté
simple, il est agi. Ce n'est pas du tout pessimiste. Il meurt, mais il n'a
cédé sur rien. Il est simplement inapte à ce monde-là.
Sous la farce paysanne, on trouve donc une fable profonde et un héros qui
annonçait les grandes figures à venir, de Galy Gay à Schweik. Brecht fait
d'ailleurs se rapprocher les deux personnages, même s'ils sont comme des
doubles inversés. Dans les deux cas, on voit que le monde ne permet pas
d'être un homme bon et qu'il faut trouver en soi la force de se défendre
contre la brutalité du monde. Jean la Chance peut être considéré comme le
chaînon manquant qui permet de mieux comprendre l'?uvre de Brecht. Le conte
initiatique hisse haut cette interrogation brechtienne : comment conserver
la bonté dans un monde vénal, régi par le mensonge?
Le texte était resté inabouti, divisé en plusieurs manuscrits. Dans le
manuscrit A, il y a presque tout jusqu'à la scène de la cave. Cette scène,
telle quelle, était incompréhensible car non reliée avec le reste. Il y
avait ensuite les manuscrits B (B1, B2, ..., B6) qui sont de petits bouts
de textes, comme si Brecht avait voulu reprendre des scènes. Cela a servi
pour écrire la fin. La mort de Jean n'est ni dans la version A, ni dans la
version B. Mais des phrases éparses existantes ont permis de constituer la
scène de la fin. « Une masse noire dans l'herbe, comme un sac vide », par
exemple, a bien été écrit par Brecht, qui mettait cette phrase dans la
bouche de la mère.
La maison d'édition L'Arche retrouva les manuscrits et les fit connaître à
quelques personnes. Le Théâtre des Treize Vents, à Montpellier, a uni à la
version A des fragments de B. Cet ensemble squelettique a été rapproché des
autres pièces de Brecht grâce aux poèmes de Brecht de cette époque qui
parlent aussi de Jean la Chance, traitent des mêmes thèmes que ceux qu'on
trouve dans ''Jean la Chance'', poèmes mis en musique par Stephen Warbeck,
de sorte que la soirée s'organise, comme les grandes oeuvres de Brecht,
avec ces « songs » qui interrompent l'action pour lui donner un autre nerf,
une autre émotion. Le texte a vraiment l'intelligence rusée et le coup de
poing rageur des pièces connues du dramaturge allemand.
La pièce, qui n'avait jamais été montée, ni en France, ni à l'étranger, a
ainsi été créée en 2006 par le Théâtre des Treize Vents qui a ensuite été
invité au Berliner Ensemble, pour le cinquantième anniversaire de la mort
de Brecht.
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_____ Brecht fut marqué par la disparition prématurée de Rosa Luxemburg et de
Liebknecht. Tout en poursuivant ses études, il devint, en 1919, «dramaturg»
au "Kammerspiele" de Munich, ce qui décida de son orientation future. Il
vint à Berlin proposer sa deuxième pièce au metteur en scène Max Rheinhardt
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_____ "Baal"
(1920) Drame Baal, ivrogne, assassin, homme fou et libre, poète attaché à sa perte, est
seul, irrémédiablement seul, même si Jeanne, Émilie, Sophie traversent sa
vie, figures de passion et de dévotion, car il n'est habité que par la
douleur. Il n'a qu'un seul ami, Ekart, double, diable, frère, qui
l'accompagne envers et contre tous. Commentaire Cette superbe pièce de Brecht, restée restée inachevée, était encore plus
violente, plus sauvage, que ''Spartakus'', était tout à fait
expressionniste. Le coeur bat, les genoux tremblent, l'amour s'y abîme. On
y sent vibrer la peau du monde, le beau, le laid, le sale, le pur.
Mais Max Reinhardt la refusa. Elle ne fut jouée qu'en 1923.
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_____ Cet échec humiliant fut cependant, pour Bertolt Brecht, jeune homme
efflanqué à la casquette et au manteau de cuir rapé, l'occasion de faire
connaissance avec le tourbillon de Berlin. Bien que fasciné par la capitale
comme un jeune provincial pouvait l'être, il ne s'y sentait pas tout à fait
à l'aise. Berlinois non de coeur, mais de raison, il était convaincu que
les grandes cités étaient les foyers de tous les changements fondamentaux
du siècle. Mais, mangeant à peine et logeant dans un réduit glacé, la vie
misérable qu'il devait mener