Arborescence - Le Donjon du Dragon

Planescape Chapitre 7: Sigil Directeurs de Projet Ken Marable
Gabriel Sorrel
Editeurs Gabriel Sorrel
Sarah Wallen
Rédacteur Todd W. Stewart
Mise en page Sarah Hood
Jeremy Pignat Traducteur
Jeremy Pignat
L'homme s'assit derrière son bureau, caché derrière une pile de parchemins
faiblement éclairés par la lumière incandescente des bougies. Lentement et
délicatement, il trempa sa plume dans l'encrier et se mit à écrire. Au
début ce n'était que du charabia, puis peu à peu les mots prirent du sens
avec le grattement de la plume et de l'encre sur le parchemin, des mots qui
avaient d'ailleurs bien plus de sens pour lui que pour les autres. Ils lui
venaient comme un torrent d'informations et il luttait pour leur donner une
structure, un sens ; et du chaos qui encombrait son crâne il réussit à
apporter une signification et un but. Les noms, les endroits, les
évènements et même les suppositions. Tout prenait son sens sous les traits
marqués d'encre, ils devenaient plus précis et plus libres à l'approche de
la fin de la page. D'un geste de la main, il lança une poignée de sables et
l'encre sécha pour qu'il puisse placer le feuillet sur la pile avec les
autres. Encore trois comme celles-ci et il aurait terminé sa journée de
travail ; en gardant son optimisme sur les semaines à venir. Bien des
décisions devront être prises et il va falloir trouver des gens pour les
accomplir. Et alors la signification et le but seront évidents pour tout le
monde. Son soulagement fut brutalement interrompu par des coups hésitants à la
porte. Il reposa doucement sa plume et attendit patiemment que la personne
entre, d'ailleurs il savait, comme bien d'autres choses, que ce moment
allait arriver. " Entre, Sarifel, je t'attendais." Les flammes des bougies se tortillèrent
sous l'effet d'un courant d'air et un tieffelin à l'allure d'orphelin
entra. D'un geste nerveux de la main, Sarifel ôta les cheveux bruns de son
front olivâtre pour les remettre derrière les deux petites cornes qui lui
poussaient sur le devant du crâne. Il resta ensuite sans bouger, attendant
que l'homme derrière le bureau lui adresse la parole. " Vu que vous avez
passé l'essentiel de votre vie à Sigil, j'ai encore du mal à comprendre
comment vous avez réussi à progresser à ce point. En fait, tout ça reste
obscur, même pour moi. Alors répondez-moi franchement. Avez-vous fait ce
que je vous ai demandé ? " Son expression restait neutre même s'il tordait
ses doigts dans l'attente de la réponse. "Tout s'est bien passé. J'ai vendu l'information pour un peu de jonc et je
me suis arrangé pour qu'elle tombe dans les Oreilles de quelques biges qui
ne manqueront pas de la répandre." "Est-ce que l'arcanaloth s'est doutée de quelque chose ?" Cette question
était la plus importante, et pour la première fois une vague irritation
vint masquer les brillants yeux verts qui semblait regarder le serviteur
comme à travers les vitres du magasin, et qui semblaient pouvoir lire dans
son esprit comme dans un livre ouvert. "Non... Enfin, j'en sais rien. J'étais tellement concentré par les détails
que je n'ai dit ni plus ni moins que ce que vous m'avez demandé de répéter.
Il semble que ça ait marché, même si je n'en ai pas obtenu le prix que je
voulais. Le chacal m'a vraiment parlé comme à un sous-fifre." "Le jonc a peu d'importance. Le 'loth en sait plus sur l'endroit d'où je
viens que moi. Plus que nous deux réunis, mais ça n'est pas très important
quand on vend des secrets et des objets de foi." Il sourit tranquillement,
et vit le même sourire sur les lèvres du tieffelin. "J'ai un autre travail
pour toi, un paquet à remettre à un autre élu, cette fois-ci dans les
Limbes. Mais je te donnerais les détails plus tard. Pour le moment tu peux
prendre un peu de repos. Tu as fait du bon travail, Sarifel. " Le tieffelin sourit de fierté, "Je suis heureux que vous m'approuviez.
Comme d'habitude je vais coucher tout ce qui m'est arrivé par écrit et je
vous le remettrais en mains propres demain matin." Il lui tourna alors le
dos, mais se mit à marmonner tandis que les portes se refermaient
violemment derrière lui, "ça n'est pas comme si vous saviez déjà tout ce
qui m'est arrivé avant que je l'écrive. Que je sois maudit si j'arrive à
comprendre comment vous arrivez à sortir tout ça de ma tête, et à
l'emporter dans l'air." Au fond de la pièce, tandis que les pas du tieffelin s'éloignaient et
résonnaient dans le couloir, l'homme sourit en un rictus. "C'est ça, et
d'ailleurs tu n'as pas la moindre idée de ce que tu es en train de faire.
Les secrets sont comme mes amis ; ils se dissimulent dans les zones d'ombre
ou, bien plus souvent, dans notre volonté de nous voiler la face. Suis donc
cette voie et voiles-toi la face, et tu finiras par ne plus croire en rien,
regardes bien où tout cela va te mener. Vérifie que tu as bien des yeux
pour voir et des oreilles pour entendre. Mais tu n'en as pas, et c'est pour
ça que tu me suis. Lorsqu'enfin tu ouvriras les yeux, tu te rendras compte
que tu aurais préféré qu'ils restent clos. Pour le moment je vais seulement
observer les effets de tes actes, et je suis sûr que j'en serais ravi."
Sigil: La Cité des Portes
Bienvenue, lecteur, permets-moi de me présenter sur ces pages tachées
d'encre et de sueur, de sang et de trahison, et fruit de mon honnête
labeur. Au cas où ce volume se trouverait séparé de ses frères de savoir et
de mystères, de conseils et d'avertissements, permets-moi là encore
d'écrire une préface à l'encre usée de ma plume. A ceux qui ont déjà lu mes
?uvres précédentes, heureux de vous revoir, et à ceux qui découvrent mes
écrits, bienvenue. J'ai rédigé bon nombre de volumes par le passé, et parmi
eux le célèbre Manifeste du Factol, ce volume à lui seul m'ayant valu une
condamnation à mort de la main des Rédempteurs. Et pourtant je suis toujours en vie, la Mort Rouge s'est séparée en deux
entités et ma sentence s'est perdue dans les Limbes. Qui a fini par avoir
le dernier mot, hein ? Le but de cet ouvrage est le même que celui des volumes précédents et de
ceux qui viendront dans le futur : la diffusion objective de la vérité.
Sans aucun doute, beaucoup d'entre vous douteront que mes écrits soient
totalement vrais, ou supposeront qu'ils se basent sur des opinions fausses
voire falsifiées, et que je cherche à manipuler les évènements et les
opinions de mes lecteurs. Et pourtant je vous assure que ce n'est pas le
cas. Mon existence se situe hors des jeux de la politique, des
personnalités et des crédos qui hantent la Cité des Portes, et elle n'est
pas prête de s'y inscrire. Considérez-moi plutôt comme votre guide
personnel des endroits, des personnes et des légendes qui constituent
Sigil. Tout au long de ces pages, qui n'ont été revues ni par un quelconque
censeur, ni par un quelconque juge, vous découvrirez bien des choses sur la
Cage de tous les jours ainsi que quelques contes plus obscurs que seules
les barbes blanches, les Seigneurs Dorés ou les Chevaliers de la Poste qui
occupent les sous-sols de la ville connaissent. Seule Son Effroyable
Majesté pourrait mettre un terme à mon travail, mais elle ne s'est jamais
opposée à mes efforts jusqu'à aujourd'hui. Vous venez tout juste de débarquer dans la Cité des Portes ? Alors lisez
bien ces pages et essayez d'en apprendre le plus possible sur la cité dans
laquelle vous vous trouvez. Mes écrits pourraient bien vous sauver la vie,
ou vous éviter un horrible gâchis. Vous considérez déjà la ville comme
votre port d'attache ? Et bien vous pourriez bien trouver dans ces lignes
deux ou trois choses qui enrichiront votre soi-disant connaissance de la
Cage et de ses habitants. Faites ce que vous désirez des informations que contiennent ces pages ; mon
objectif est simplement de figer des faits que d'autres pourraient vouloir
modifier pour qu'ils collent à leurs vues. Mes mots ont toujours eu
l'accent de la vérité. Prenez-moi à défaut si vous y arrivez, mais je sais
qu'ils disent la vérité. Faites-moi confiance une fois de plus. Comme toujours votre guide dans la vérité.
- L'Editeur.
La Première impression du Béjaune Quel que soit le quartier par lequel vous y entrez, le premier pas que vous
ferez dans Sigil sera toujours une expérience unique, même si elle n'est
pas toujours très plaisante : c'est un évènement remarquable qu'on oublie
difficilement dans sa vie. Vous serez tout d'abord confronté à ce
picotement des yeux caractéristique ainsi qu'à une lutte acharnée pour que
l'air saturé de poussière et de suie pénètre dans vos poumons, vos
oreilles et votre nez seront ensuite assaillis de toute part par les sons
et les odeurs de milliers de mondes, de Plans ainsi que de leurs habitants.
Vous avancerez lentement dans les bancs de poussière blanche qui vous
entourent comme du brouillard, et les nuages bas qui donnent à la ville sa
météo unique au monde. En un mot : Sigil est horriblement morne et grise
autant qu'elle est surprenante et confondante. Cette brume quasi permanente et ces bancs de fumée constituent la météo
moyenne de Sigil. Même si la cité n'est pas