26-2 : Dominance Cérébrale - Resodys

Maîtrise les concepts d'information génétique, de nutrition, de pétrographie, de
géodynamisme, de stratigraphie et de .... -A partir d'exercices de travaux dirigés.

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Bases Neurologiques de la Dominance Cérébrale Que les deux hémisphères fonctionnent de manière différente et
complémentaire est une propriété fascinante du cerveau humain qui, jusqu'à
présent, n'a pas reçu une explication simple et univoque. Au contraire, il
apparaît que ce qu'il est convenu d'appeler la dominance cérébrale est une
qualité probablement multifactorielle, répondant à des mécanismes sous-
jacents de nature diverse, innés pour les uns, environnementaux pour
d'autres, ayant abouti, au cours des âges, à une caractéristique majeure du
cerveau humain, la latéralisation des fonctions, fruit d'une longue
évolution sans doute destinée à optimiser les relations cerveau-cognition.
En outre, la distribution de cette qualité dans une population donnée est
inégale entre les individus et varie selon les fonctions en cause,
répondant à une règle selon laquelle une majorité des individus présentent
un pattern dit « typique », parce que le plus fréquent, alors que les
autres divergent de ce pattern typique. Enfin, chez un individu donné, la
latéralisation de diverses fonctions semble se faire de manière conjointe,
en particulier pour les deux les plus largement étudiées : la
latéralisation du langage et la préférence manuelle, toutes deux étant chez
la grande majorité des individus liées à l'hémisphère gauche. A l'inverse,
la spécialisation de l'hémisphère droit pour les émotions, l'attention, les
processus visuo-spatiaux, entre autres, a été beaucoup moins souvent prise
en considération dans la recherche des mécanismes neurobiologiques
responsables.
Historiquement, la notion de dominance cérébrale a été étroitement liée à
la description d'asymétries sur le cerveau, asymétries volontiers
considérées comme la marque d'un processus très précoce, du reste déjà
présent chez les primates non-humains. Ce n'est que depuis une vingtaine
d'années (Geschwind & Galaburda, 1985; Habib & Galaburda, 1986) que la
neuropsychologie a commencé à intégrer des notions issues d'autres
disciplines mais aptes à éclairer d'un jour nouveau une asymétrie de
fonction connue depuis plus de cent ans (Broca, 1865). Aujourd'hui, cet
aspect est devenu une discipline en soi et continue à intriguer les
chercheurs de tous bords.
Ce chapitre envisage successivement les principaux facteurs connus pour
déterminer la dominance cérébrale : l'anatomie du cerveau, la génétique, le
sexe et les hormones sexuelles, de même que certains facteurs
d'environnement, susceptibles d'exercer des pressions mécaniques ou
culturelles sur certains aspects de la latéralisation et l'interaction
entre ces différents facteurs. Diverses données, provenant de différents
domaines des neurosciences, incluant notamment les travaux d'imagerie
cérébrale, seront présentées, discutées, et mises en perspective dans le
but de proposer un modèle explicatif apte à rendre compte du plus grand
nombre de faits.
1- Anatomie du cerveau : des asymétries corticales Depuis le travail princeps de Geschwind et Levitsky (1968), il est habituel
de rapprocher le concept de dominance cérébrale de la présence d'asymétries
morphologiques sur la surface du cerveau. Ces auteurs, observant 100
cerveaux humains de sujets décédés de cause non neurologique, ont mesuré
l'étendue macroscopique du Planum temporale, et remarqué que dans 65% des
cas, il existait une asymétrie de cette structure en faveur de l'hémisphère
gauche. Cette petite région corticale triangulaire, dont la majeure partie
est enfouie dans la fissure sylvienne, en arrière du gyrus de Heschl (qui
abrite l'aire auditive primaire), fait partie intégrante de l'aire de
Wernicke et apparaissait donc comme un bon candidat pour abriter les
mécanismes qui déterminent la spécialisation de l'hémisphère gauche pour le
langage. Suite à ce travail princeps, de nombreux travaux ont été publiés,
confirmant dans l'ensemble les données de ces auteurs (Witelson, 1983;
Geschwind et Galaburda, 1984, 1985; Habib et Galaburda, 1986, Galaburda &
Habib, 1987; Witelson & Kigar, 1988, Witelson, 1991).
En fait, comme cela a été démontré par la suite à plusieurs reprises
(Rubens et al., 1976; Habib et al., 1984), l'asymétrie macroscopique du
cerveau ne concerne pas le seul Planum temporale mais intéresse toute la
configuration d'ensemble de la région sylvienne postérieure (figure 1). En
particulier, la terminaison de la scissure de Sylvius se fait souvent de
manière nettement différente sur l'hémisphère gauche, où elle est
horizontale, et sur l'hémisphère droit où la scissure affecte, dans son
tiers postérieur, un trajet ascendant parfois strictement vertical. Ainsi,
Yeni-Komshian & Benson (1976) ont retrouvé une scissure plus longue à
gauche sur 84% de 25 cerveaux (montrant du reste de troublantes analogies
avec le cerveau de certains singes), alors que la même année, Rubens et al.
(1976), par une méthode de superposition des tracés des scissures droite et
gauche, retrouvaient une asymétrie nette en faveur de la scissure gauche
sur 25 de 36 cerveaux. En fait, l'asymétrie sylvienne retentit sur
l'asymétrie de l'opercule pariétal, une région de cortex située face au
Planum temporal sur l'autre berge de la scissure de Sylvius, qui s'en
trouve généralement plus développée à gauche, et sur celle de la région
pariétale postérieure qui a elle pour corollaire un plus fort développement
du lobule pariétal inférieur droit, ce qui pourrait être rapproché de la
spécialisation de l'hémisphère droit pour les processus attentionnels ou
visuo-spatiaux (Eidelberg et Galaburda, 1984). INSERER PAR ICI FIGURE 1 Ainsi, il est devenu habituel de considérer un type horizontal de
scissure sylvienne, principalement rencontré sur l'hémisphère gauche, et un
type ascendant, ou horizontal et ascendant, plus souvent rencontré sur les
hémisphères droits (Witelson & Kigar, 1992; Aboitiz et al., 1992). Pour
Steinmetz (1990), il existerait en fait quatre types distincts, le plus
fréquent, ou type I, caractérisé par une bifurcation terminale de la
scissure de Sylvius, avec une courte branche descendante et une branche
ascendante de longueur et d'obliquité variables, le type II où la
terminaison sylvienne est strictement horizontale, sans bifurcation, le
type III, où il existe deux gyri entre le sillon post-central et la
terminaison sylvienne, formant un volumineux opercule pariétal, et le type
IV, le plus rare, où à l'inverse la terminaison sylvienne se confond avec
le sillon post-central, ce qui se traduit par une absence d'opercule
pariétal (figure 2).
INSERER PAR ICI FIGURE 2
Citons enfin ici les asymétries retrouvées sur le cortex cérébral dans
d'autres régions que la région sylvienne postérieure : l'aire de Broca
(Albanese et al., 1989), la région motrice (Amunts et al., 1996), le volume
respectif de différents lobes (petalia), avec un aspect classique dénommé
« torque » selon lequel, chez la majorité des individus, le lobe occipital
gauche et le lobe frontal droit font protrusion de quelques millimètres de
plus que leur homologue, laissant leur empreinte sur la voûte crânienne.
Enfin, le gyrus de Heschl, hébergeant l'aire auditive primaire, juste en
avant du Planum temporal, est habituellement asymétrique, et peut même
présenter deux circonvolutions au lieu d'une sur certains hémisphères
droits, posant alors aux anatomistes la question de sa limite avec le
Planum.
Ainsi, pour résumer, on remarquera que si l'attention des chercheurs
s'est initialement concentrée sur la question du Planum temporal, sans
doute en raison de l'influence du papier initial de Geschwind, on pourrait
tout aussi bien considérer comme cruciale l'asymétrie d'autres régions
corticales périsylviennes. Du reste, certains ont même suggéré que c'est
« la forme et non les dimensions de la région sylvienne postérieure qui est
asymétrique » (Binder et al.,1996).
Toutefois, des asymétries ont été constatées au niveau de l'architecture
même du Planum temporal (Galuske et al., 2000; Chance et al., 2006) : la
microarchitecture cellulaire du cortex auditif serait franchement
asymétrique, incluant le nombre et l'espacement des microcolonnes qui sont
tous deux plus forts à gauche. Il a également été noté une connectivité
plus dense dans le Planum gauche, conséquence d'un plus grand nombre
d'axones myélinisés intra-corticaux, qui aurait comme corollaire un
traitement plus rapide de l'information (Anderson et al., 1999), permettant
au seul hémisphère gauche de prendre en compte les changements acoustiques
très brefs et en succession rapide caractéristiques du langage humain
(Tallal et al., 1995). Ainsi, cette architecture « minicolumnaire » du
cortex auditif et du Planum temporale fournirait un substrat plausible de
la latéralisation gauche des aspects eprceptifs du langage.
2- Signification fonctionnelle des asymétries anatomiques
Il va de soi que si l'on veut pouvoir attribuer une quelconque importance
aux asymétries anatomiques décrites ci-dessus dans le phénomène de la
dominance cérébrale, il reste encore à prouver leur lien avec l'asymétrie
fonctionnelle. A cet égard, ce sont presque exclusivement deux aspects de
cette asymétrie fonctionnelle qui ont été étudiés : la manualité et la
latéralisation du langage. En outre, il a fallu attendre l'introduction de
l'IRM, soit le début des années 90, pour voir les premières publications
mettant en rapport un indice d'asymétrie anato