Etude de je me souviens - Académie de Nancy-Metz

Georges Perec meurt le 3 mars 1982 à l'hôpital Charles-Foix d'Ivry-sur-Seine des
suites d'un cancer du poumon. 2 ? « Je me souviens ». Georges Perec ...

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Albumania 2004-2005 « Je me souviens.... »
Etude de l'album
Je me souviens
Georges Perec - Yvan Pommaux
Hachette 1978 pour le texte,
Editions du Sorbier 1997 pour les illustrations Document réalisé par Nicole FRAGA, conseillère pédagogique et
Catherine LAPOINTE, enseignante, pour l'étude graphique. Contact : Nicole.Fraga@ac-nancy-metz.fr A - Contextualisation du texte de PEREC
1 - Biographie
Georges Perec est né à Paris le 7 mars 1936. Ses parents étaient des
émigrés d'origine juive polonaise. Il devient très tôt orphelin : son père
est tué au front en juin 1940 ; sa mère ne reviendra pas d'Auschwitz où
elle fut déportée en 1943.
Ces fractures de l'enfance laisseront en lui leur marque indélébile. De ses
parents, il dira : « ... j'écris parce qu'ils ont laissé en moi leur marque
indélébile et que la trace en est l'écriture ; l'écriture est le souvenir
de leur mort et l'affirmation de ma vie. » Ecrire restera toujours pour lui
« essayer méticuleusement de retenir quelque chose, de faire survivre
quelque chose. »
A l'automne 1942, la soeur aînée de son père, Esther Bienenfeld, le fait
venir à Villard-de-Lans où elle est réfugiée avec son mari et sa fille Ela.
En 1945, il revient vivre à Paris chez son oncle et sa tante qui
l'adopteront. Après avoir été lycéen à Claude-Bernard puis à Etampes, il
entreprend des études d'histoire et de lettres vite abandonnées. Après son
service militaire (1958 - 1959) et un séjour de plus d'un an en Tunisie, il
rédige des notules pour la Nouvelle Revue française et les Lettres
nouvelles et quelques textes d'esthétique littéraire dans Partisans.
En 1965, paraît Les Choses, qui connaît un vif succès et remporte le Prix
Renaudot. Georges Perec ne cesse alors d'écrire avec une remarquable
diversité d'inspiration, tout en travaillant pour gagner sa vie. Seront
explorées des possibilités d'écriture romanesque aussi différentes que
celle de Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?, Un homme qui
dort, La Disparition (roman lipogrammatique écrit sans e), Les Revenentes
(où la seule voyelle utilisée est le e), La Vie mode d'emploi («
romans » qui renouvelle de manière magistrale les façons et les enjeux du
genre - prix Médicis 1978), Un cabinet d'amateur et « 53 jours »
(inachevé).
Georges Perec s'est confronté à des champs d'expérience très larges : la
poésie (Ulcérations, La Clôture, Alphabets), reposant sur des contraintes
oulipiennes ; l'écriture autobiographique (La Boutique obscure, W ou le
souvenir d'enfance - admirable synthèse de fiction et d'autobiographie -,
Je me souviens) ; l'essai (Espèces d'espaces, Penser/classer) ; le théâtre
(L'Augmentation, La Poche Parmentier).
En 1974, il adapte pour le cinéma et tourne avec B. Queysanne Un homme qui
dort (prix Jean Vigo). A partir de 1976, il rédigera les « Mots croisés »
de l'hebdomadaire Le Point.
Georges Perec meurt le 3 mars 1982 à l'hôpital Charles-Foix d'Ivry-sur-
Seine des suites d'un cancer du poumon. 2 - « Je me souviens »
Georges Perec, définissait ses « Je me souviens » ainsi lors de leur
parution, en 1978 : « Ces "je me souviens" ne sont pas exactement des souvenirs, et surtout pas
des souvenirs personnels, mais des petits morceaux de quotidien, des choses
que, telle ou telle année, tous les gens d'un même âge ont vues, ont
vécues, ont partagées, et qui ensuite ont disparu, ont été oubliées ; elles
ne valaient pas la peine d'être mémorisées, elles ne méritaient pas de
faire partie de l'Histoire, ni de figurer dans les Mémoires des hommes
d'Etat, des alpinistes et des monstres sacrés.
Il arrive pourtant qu'elles reviennent, quelques années plus tard, intactes
et minuscules, par hasard ou parce qu'on les a cherchées, un soir entre
amis ; c'était une chose que l'on avait apprise à l'école, un champion, un
chanteur ou une starlette qui perçait, un air qui était sur toutes les
lèvres, un hold-up ou une catastrophe qui faisait la une des quotidiens, un
best-seller, un scandale, un slogan, une habitude, une expression, un
vêtement ou une manière de le porter, un geste, ou quelque chose d'encore
plus mince, d'inessentiel, de tout à fait banal, miraculeusement arraché à
son insignifiance, retrouvé pour un instant, suscitant pendant quelques
secondes une impalpable petite nostalgie. » Résultat ? 480 « je me souviens », 480 moments ramenés à la surface de nos
mémoires. B- Etude du texte, thème et propos de l'album
Les 20 « je me souviens » choisis par Yvan Pommaux ne sont pas présentés
dans l'ordre du texte de Perec ; ce dernier ne comporte pas en effet de
chronologie véritable, on y trouve pêle-mêle des évocations de l'enfance ou
des préoccupations qui concerneraient plutôt l'adolescence...
Pommaux a donc ordonné les « je me souviens » qu'il a sélectionnés pour
permettre de construire une narration, projetant ainsi ses propres
souvenirs dans les phrases de Perec.
Ces petits morceaux de quotidien, tels que les définit Pérec, appartiennent
à ce qu'on pourrait appeler la micro histoire, que partage une génération
donnée, sorte de monde référent qui se caractérise par son extrême banalité
et sa légèreté. Pommaux a choisi les phrases en résonance avec sa propre
vie et une présentation chronologique de ces phrases ;
Dans l'album, il a choisi :
- de préciser la situation d'énonciation : un vieil homme, à la
terrasse d'un café, parle à deux enfants contemporains. Il donne au lecteur
le lieu, des personnages absents dans le texte, l'époque de cette rencontre
(âge des protagonistes, cadre, indices vestimentaires).
- d'évoquer des repères personnels de sa vie (rencontre amoureuse,
séparation...) en ne parlant que des objets, du décor, de l'air du temps...
Ce procédé confère à l'album un sentiment de pudeur, les mots banalisant
les repères alors que l'image comporte une charge affective réelle.
Le monde référent du texte se situe autour des années 50, avec beaucoup de
zones d'ombre pour les lecteurs des générations suivantes. Roland Brasseur,
dans son livre « je me souviens de « je me souviens » », collection
l'iutile aux éditions du Castor Astral en 1998 , sous-titré « notes pour
« je me souviens » de Georges Perec à l'usage des générations oublieuses »,
utilise la même numérotation que Pérec et fournit une quantité de notes,
d'explications, de références historiques qui facilitent la compréhension
du livre de Pérec et le travail de la mémoire. ( voir quelques extraits en
annexe 2) Dans cet album, Yvan Pommaux nous parle des éléments qui caractérisent une
génération donnée, en les mettant en scène dans une rencontre
intergénérationnelle qui souligne l'importance de cette transmission du
futile, de l'éphémère, du banal.
La micro histoire ancre chacun de nous dans un espace-temps donné, qu'il ne
suffit pas de partager avec sa classe d'âge, mais qui doit être transmis
aux générations suivantes, comme autant de traces d'humanité.
C - étude au plan graphique : travail de Catherine Lapointe
1) Lecture linéaire de l'image
. Page de titre:
Deux personnages contemporains (identifiables à leur tenue, leurs
rollers..), accompagnés d'un chien surgissent sur la feuille. La vitesse du
déplacement (traits, diagonales corporelles..) renvoie à la fulgurance du
souvenir (thème annoncé dans le titre)
. Page 1:
L'image est dynamique: cadrage de type plongée, dessin nerveux, net,
fréquent en BD. Elle initie l'histoire et place résolument les personnages
représentés dans la contemporanéité.
. Pages 2 et 3:
On entre dans le souvenir par l'évocation écrite et dessinée, inscrite dans
une "bulle" envahissant la double page au point de reléguer le narrateur
dans le coin en bas à gauche. Les 2 images se superposent en plans et se
différencient d'elles-mêmes par le style: l'une, contemporaine, de genre
BD, avec un clin d'?il: le chaton contournant l'image; l'autre, désuète,
vecteur du souvenir, travaillée au crayon, sur fond sépia ou pastel.
. Autres pages:
Le cadrage des personnages contemporains évolue au cours des pages 4 à 7.
En plan de plus en plus rapproché, ils finissent par s'évanouir dès les
pages 8 et 9 laissant le champ totalement libre au souvenir. Ils
réapparaissent, tel un flash en page 16, pour soutenir le lecteur dans la
reconnaissance du personnage principal qui passe à ce moment-là de
l'enfance (pansement sur les genoux, culottes courtes) à l'adolescence -
âge adulte (pantalon, imperméable et même tenue militaire, séducteur
courtisant une jeune femme) puis disparaissent à nouveau pour ne revenir
qu'à la fin du livre en pages 29 et 30.
Dès lors que les personnages contemporains disparaissent, l'image souvenir
s'inscrit totalement dans la double page, le texte en est exclu et se
retrouve projeté dans le cadre, les "marques" graphiques de parole
disparaissent totalement.
. Page 30:
Les enfants en rollers reprennent leur course, renvoyant le vieux monsieur
à son propre passé, celui-ci n'apparaît plus qu'au travers d'une vitre-
écran au contour brutalement délimité et qui reprend les couleurs passées
des fonds des évocations antérieures.
2) Des détails sémantiques spécifiques
. Le béret:
Le béret du narrateur se retrouve transplanté dans la "bulle" toujours
caractérisé par son noir profond qui le décolle du dessin assourdi. Il est
un point essentiel pour décoder le sens de l'image, il est le fil
conducteur qui relie le passé au présent et permet d'identifier le
personnage. . Dans l'image de type BD, les différents éléments iconographiques
renvoient à notre époque (vêtements, mobilier...) . Dans l'image évoquant le passé, les différents éléments
iconographiques (vêtements, mobilier, objets divers, cadre de vie,
véh