Cours sur la Notion de genre littéraire - Le capes de lettres ...

Les lexèmes et morphèmes qui servent de marques de reprise appartiennent
tous à des constituants de l'énoncé, ils contribuent à sa valeur de vérité et, au
plan ...... distribué au Québec, celui de Dufief (1995), qui présente 100 exercices
à trous sur les marqueurs de relation, avec leur corrigé, répartis en onze emplois.

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Envoyé par Myriam. La notion de genre littéraire.
Introduction : forme, style et genre littéraire 1. Introduction : forme, style et genre littéraire Je commencerai par vous raconter une histoire. C'est celle du « soldat de
Baltimore ». Stendhal la relate dans Racine et Shakespeare en 1823, et elle
est alors toute récente. Je cite Stendhal :
L'année dernière (août 1822), le soldat qui était en faction dans
l'intérieur du théâtre de Baltimore, voyant Othello qui, au cinquième acte
de la tragédie de ce nom, allait tuer Desdemona, s'écria : "Il ne sera
jamais dit qu'en ma présence un maudit nègre aura tué une femme blanche."
Au même moment le soldat tire son coup de fusil, et casse un bras à
l'acteur qui faisait Othello.
C'est une histoire très riche, qui plaisait beaucoup à Roland Barthes, de
qui je la tiens. J'en ai seulement retrouvé la source récemment. Elle
intéressait Stendhal dans le cadre d'une réflexion sur l'illusion, et elle
illustrait à ses yeux « l'illusion parfaite ». Pour Barthes, cette histoire
témoignait de ce que le réalisme aurait dû être pour être réellement
réaliste. Mesurée à la réaction du soldat de Baltimore, le comportement du
lecteur de roman le plus passionné - ou de la lectrice : pensez cette fois
au modèle de Mme Bovary - paraît bien timoré.
Ici, ce que le soldat de Baltimore introduit, c'est l'idée de convention
littéraire. La littérature, comme tout discours suppose, des conventions,
et la première de ces conventions, c'est qu'il s'agit de littérature. Le
soldat de Baltimore n'était jamais entré dans un théâtre, il n'avait jamais
vu une pièce de théâtre, il ne savait pas à quoi s'attendre. La littérature
est une attente. Entrer en littérature, comme lecteur ou comme spectateur,
mais aussi comme auteur, c'est intégrer un système d'attentes. La première,
au sens de la plus fréquemment sollicitée par l'?uvre littéraire, c'est
l'attente de fiction, la willing suspension of disbelief, la suspension
volontaire de l'incrédulité, ainsi que l'appelait Coleridge. Mais elle
n'est pas universelle : dans des Mémoires, un journal ou une
autobiographie, le lecteur s'attend par exemple à lire ce qui a eu lieu,
suivant un pacte de véridicité. Et elle n'est pas la seule : pour aller
tout de suite aux antipodes, lisant un poème intitulé « sonnet », je
m'attends à y trouver quatorze vers, deux quatrains suivis de deux tercets,
ou encore un dizain suivi d'un distique.
L'attente, ai-je envie de dire, est générique. Je viens à un livre, ou à
une pièce, avec une attente générique : c'est une tragédie, un sonnet, un
roman policier, une autobiographie, une thèse, une dissertation, un mémoire
de maîtrise... Je choisis exprès des genres hétéroclites, pour souligner
que les conventions génériques peuvent être de nature très différente :
formelle, thématique, stylistique... Le soldat de Baltimore méconnaissait
un des traits définitoires du genre théâtre, l'un des grands genres
modernes.
Le genre est une convention discursive. Du moins est-ce sous cette
acception - je l'annonce donc d'emblée - qu'il a été réhabilité dans les
études littéraires après une période durant laquelle il a été peu présent,
peu considéré, où entre l'?uvre ou le texte et la littérature il n'y avait
pour ainsi dire pas de médiations. À la question : qu'est-ce qu'un genre ?
j'ai donc déjà proposé une réponse, une réponse qui sera à l'horizon de ce
cours. Disons d'entrée de jeu que si la notion de genre a une validité par-
delà les procès qu'elle a subis, c'est du côté de la lecture, de la
phénoménologie de la lecture. Lisant, je fais une hypothèse sur le genre ;
cette hypothèse guide ma lecture ; je la corrige si le texte la contredit ;
non, ce n'est pas un sonnet français ; non ce n'est pas une tragédie
classique ; non, ce n'est pas roman noir ; au bout du compte cette ?uvre
n'appartient peut-être à aucun genre défini, mais pour que j'arrive à cette
conclusion, il faut que je l'aie lue en faisant des hypothèses sur son
appartenance générique et en révisant ces hypothèses au fur et à mesure de
ma lecture.
Vous sortez d'un cours sur le baroque. On aurait pu décrire le baroque de
façon analogue : du point de vue du lecteur ou du spectateur, comme un
système d'attentes. Les traits distinctifs repérés par [Wolfflin] pouvaient
être compris de la sorte. Mais le baroque est-il un genre ? Non : plus
probablement un style. Mais entre un genre et un style, les points de
rencontre sont forts, et les deux mots viennet de la même notion latine. Il
y a une poétique baroque s'il y a un système de traits de reconnaissance
d'une ?uvre baroque. Un style, individuel ou collectif, est une signature
permettant la reconnaissance.
Forme, genre, style : ainsi ai-je intitulé cette première leçon. Vous voyez
que nous sommes en plein dedans, in medias res. Et d'une certaine façon je
vous ai déjà dit à peu près l'essentiel de ce que je vous redirai ce
semestre en treize leçons. Mais avant de continuer, quelques mots
d'introduction quand même. 2. Genre et théorie Le titre de ce cours est donc : Théorie de la littérature : la notion de
genre. Avant la notion de genre, j'consacré ce cours aux notions
fondamentales de la littérature, aux notions littéraires communes et à leur
théorisation, c'est-à-dire à la manière dont elles ont été critiquées,
repensées, élaborées par la théorie littéraire. J'entends donc ici théorie
au sens de théorie critique, de réflexion métacritique sur la littérature,
d'épistémologie et de déontologie des études littéraires, ou tout
simplement de vigilance critique : le but de la théorie, à mon sens, c'est
de savoir ce qu'on fait quand on le fait. Vous voyez que je n'entends pas
théorie dans le sens positif d'un système quel qu'il soit. Je ne vais vous
exposer un système, vous demander d'y croire, de jouer au « soldat de
Baltimore ». Au contraire, la théorie est pour moi la critique de tous les
systèmes : leur questionnement, leur mise en doute. La théorie proteste
toujours, contre toutes les doctrines. Je voudrais faire de vous des
protestants de la théorie, des démons de la théorie, suivant le titre donné
au livre qui a résulté des premières années de ce cours. Ce qui
m'intéresse, c'est de montrer, de mettre en scène les conflits du sens
commun et de la théorie, la résistance du sens commun, les excès de la
théorie. Avant de parler du genre, les notions à propos desquelles nous
avions décrit ces antagonismes étaient les suivantes : l'auteur, le monde,
le lecteur, le style, l'histoire, la valeur, et bien sûr la littérature.
Toujours d'un point de vue sceptique, ironique, désabusé, non dupe.
C'est cette ironie théorique que je souhaite exercer avec vous cette année
sur la notion de genre littéraire.
Mais, direz-vous, pourquoi aviez-vous laisser de côté la notion de genre
jusqu'ici ? Pourquoi ne pas l'avoir intégré à ces quelques notions
fondamentales ? Quand on pense à la littérature, à une ?uvre littéraire, on
pense spontanément, naturellement, à un auteur qui l'a écrite, à un lecteur
qui la lit, au monde dont elle parle, au style dans lequel elle est écrite.
Mais ne pense-t-on pas aussi spontanément, aussi naturellement au genre
auquel elle appartient : ceci, c'est un roman, c'est du théâtre, c'est une
tragédie, une épopée, un roman policier, de la science-fiction, un essai.
En effet, et je crois même qu'entre le sens commun et la théorie
littéraire, l'antagonisme à propos du genre a été du même ordre que leurs
hostilités au sujet de l'auteur, du monde, du lecteur, du style, etc. Et la
même démarche est possible. Pour le sens commun sur la littérature, les
genres existent ; la littérature est faite de genres ; les ?uvres se
rangent dans des genres, comme à la FNAC. Pour la théorie littéraire en
revanche, c'est-à-dire pour les formalismes qui ont dominé le XX ème.
siècle, depuis le formalisme russe jusqu'au structuralisme, les genres
littéraires n'ont pas de pertinence ; seuls comptent le texte et la
littérarité. L'?uvre moderne échappe par définition aux genres. Les avant-
gardes littéraires, dont la théorie a été généralement solidaire, ont
dénoncé les genres comme des contraintes périmées : voyez les
Illuminations, les Chants de Maldoror, Nadja. Les surréalistes condamnaient
le roman, arbitraire, lawless. Gide cherchait dans Les Faux-Monnayeurs à
faire un roman pur qui éliminât du roman tout ce qui ne lui appartenait pas
en propre. Mais que resterait-il ? On sait qu'Édouard, son romancier
fictif, était conduit à l'échec par cette ambition surhumaine, mais Gide
tirait son épingle du jeu en biaisant avec les contraintes qu'il imposait à
son personnage. L'utopie avant-gardiste du xxe siècle a postulé l'idéal de
l'abolition des genres. « Les genres littéraires sont des ennemis qui ne
vous ratent pas », écrivait cependant Michaux (L'Époque des illuminés).
Autrement dit, les genres sont les plus forts. Pour la théorie, le genre,
comme les autres notions précitées, était une notion pré-théorique,
historique, idéologique, essentialiste, classique.
Mais le genre est revenu sur la scène des études littéraires, par plusieurs
biais. D'une part avec la réhabilitation de la rhétorique contre l'histoire
littéraire. Or le genre, comme on le verra dès la prochaine leçon, relève
de la rhétorique, ne serait-ce que par son nom : genera dicendi, les genres
du discours. Et des théoriciens comme Gérard Genette ou Tzvetan Todorov ont
réintroduit une réflexion sur les genres, et même sur le système des genres
(voir