Les pays d'Occident d'après le Heou Han chou

Ainsi, quoique il y eût eu soumission (de la part de ces peuples), aucun d'eux
cependant ne s'était corrigé et amendé. ...... climats et de leurs températures, les
chemins qui sont des échelles dans la montagne, des passerelles de bois sur les
gouffres [155], des marches à la corde [156], ou des traversées du désert de
sable, ...

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|Édouard CHAVANNES |
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|LES PAYS D'OCCIDENT |
|d'après le |
|HEOU HAN CHOU |
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à partir de : LES PAYS D'OCCIDENT
d'après le HEOU HAN CHOU
par Édouard CHAVANNES (1865-1918)
T'oung pao, Volume 2:8, 1907, pages 149-234.
mise en format texte par
Pierre Palpant www.chineancienne.fr TABLE DES MATIÈRES Avant-propos Les pays d'occident : Histoire - Royaumes. Appendice: Biographie de Keng Ping - Biographie de Keng Kong.
@ AVANT-PROPOS @ p.149 L'histoire des Han orientaux qui figure dans la liste des histoires
canoniques de la Chine fut écrite par Fan Ye, mort en 445 p.C. Mais cette
?uvre n'est que l'aboutissement de toute une série de travaux antérieurs
qui, commencés dès l'époque des Han orientaux, se poursuivirent jusqu'au
temps de Fan Ye lui-même ; il est certain que celui-ci a dû, dans la
plupart de ses chapitres, reproduire des récits qui furent rédigés
longtemps avant lui [1]. Bien plus, il arrive parfois que Fan Ye nous ait conservé, non plus même
les pages qui furent élaborées par les historiens ses prédécesseurs, mais
quelques uns de ces documents officiels qui sont la source dernière de
l'histoire, puisqu'ils représentent les renseignements que le gouvernement
chinois se procurait par l'intermédiaire de ses agents les plus compétents.
Tel est le cas pour le chapitre du Heou Han chou qui traite des pays
d'Occident ; en effet, après un préambule où Fan Ye retrace rapidement les
vicissitudes de la domination chinoise dans le Turkestan sous la dynastie
des Han orientaux, il ajoute qu'il va s'inspirer du rapport adressé à
l'empereur par le général Pan Yong en l'an 125 de notre ère ou peu avant ;
ce général, fils du célèbre Pan Tch'ao, et neveu de l'historien Pan Kou,
joua un rôle important dans la conquête et l'administration des pays
d'Occident pendant les premières années du deuxième siècle [2] ; p.150 nul
n'était mieux placé que lui pour parler d'une politique à laquelle il avait
directement collaboré. A la fin du même chapitre, Fan Ye ajoute une sorte
de dissertation au cours de laquelle il indique incidemment qu'il a suivi
jusque dans le détail des phrases le rapport de Pan Yong. Il est vrai que, lorsqu'il est question des royaumes du Turkestan
oriental tels que Khoten, Kachgar ou Tourfan, Fan Ye mentionne des
évènements qui se passèrent de 150 à 170 de notre ère. Cette particularité
cependant n'infirme en rien l'importance qu'il faut attribuer au texte de
Pan Yong dans ce chapitre ; c'est bien en effet ce texte lui-même qui
constitue le tableau d'ensemble des pays d'Occident ; seulement, en ce qui
concerne ceux de ces pays qui, plus voisins de la Chine, restèrent plus
longtemps en relations avec elle, l'historien ajoute quelques faits
postérieurs au rapport de Pan Yong. En résumé, le chapitre CXVIII du Heou Han chou traite des pays d'Occident
tels qu'ils apparaissaient à un témoin oculaire écrivant peu avant l'année
125 de notre ère ; quant aux additions faites par Fan Ye, elles ne
dépassent guère l'année 170 de notre ère. Ainsi, quoique la dynastie des
Han orientaux ait duré près de deux siècles, de 25 à 220 p.C., le chapitre
sur les pays d'Occident ne parle que des cent années qui s'écoulèrent de
l'année 25 à l'année 125, en faisant quelques adjonctions relatives aux
évènements qui eurent lieu dans le Turkestan oriental de 125 à 170. La période couverte par ce chapitre est d'une importance capitale dans
l'histoire des relations entre l'Orient et l'Occident. C'est vers l'an 100
de notre ère que devait vivre ce commerçant macédonien Maès Titianus dont
les itinéraires ont permis à Marin de Tyr, puis au géographe alexandrin
Ptolémée, de nous fournir des indications sur les voies de communication à
travers l'Asie Centrale. D'autre part, c'est en l'an 97 de notre ère que
Kan Ying, lieutenant de Pan Tch'ao, fut envoyé en mission de reconnaissance
jusque sur les bords du golfe Persique ; il aurait pu croiser sur les
routes des Pamirs une des caravanes à la solde de Maès Titianus. Une même
impulsion poussait donc simultanément la Chine et l'Orient romain à tenter
alors de se frayer un passage qui leur permît de faire des échanges sans
avoir recours à l'entremise onéreuse de courtiers trop intéressés à
empêcher toute relation entre les deux plus riches civilisations de ce
temps. Au même moment, la navigation ouvrait au commerce des débouchés imprévus
jusqu'ici. Sous le règne de l'empereur Claude (41-54), un pilote grec
d'Egypte, Hippalos, avait eu l'idée de profiter de la régularité des vents
de la mousson pour passer directement du golfe d'Aden dans l'Inde ; cette
découverte de génie permit d'établir un va et vient régulier entre les
ports de l'Inde et ceux de la Mer Rouge ; et, comme les bateaux de l'Inde
se rendaient en Indo-Chine, il fut dès lors possible à des hommes ou à des
marchandises venues de l'Egypte et de la Syrie, d'être transportés par mer
jusqu'en Chine. C'est ainsi que, en l'année 120, des jongleurs du Ta Ts'in,
c'est-à-dire de l'Orient romain p.151 débarquèrent en Birmanie d'où ils
furent envoyés à l'empereur de Chine ; de même, en 166, un marchand se
disant ambassadeur de Marc-Aurèle arriva au Tonkin tout comme y étaient
arrivés avant lui, en 159 et 161, des trafiquants hindous. Ces faits
suffisent à prouver que la navigation entre l'Egypte et l'Inde et entre
l'Inde et le Tonkin avait rendu praticables par la voie de mer des
relations entre la Chine et l'empire romain. Les deux puissances qui, en Asie, s'interposaient entre Rome et la Chine
étaient celle des Parthes, maîtres de la Perse, et celle des Kouchans,
maîtres de l'Inde. Sur les Parthes, l'histoire chinoise ne nous renseigne
guère ; les Romains, grâce aux guerres continuelles qu'ils leur firent,
furent mieux informés à leur sujet. Mais, en ce qui concerne les Kouchans,
les textes chinois, bien qu'encore insuffisants, ont une importance
capitale ; ce sont eux qui nous permettent de suivre dans les étapes
successives de leur migration à travers l'Asie les Ta Yue-tche depuis leur
départ du Kan-sou jusqu'à leur arrivée dans le Badhakhschân ; puis ils nous
montrent les emplacements des cinq principautés qui leur furent soumises et
qui s'étendaient du Wakhân jusqu'au Gandhâra ; c'est la plus méridionale
d'entre elles, celle des Kouchans qui, entre l'an 25 et l'an 50 de notre
ère, s'annexa les quatre autres et se substitua aux princes du
Badhakhschân ; ce furent ces mêmes Kouchans qui, quelque temps plus tard
conquirent l'Inde ; les textes chinois nous apprennent encore l'influence
considérable qu'eurent les Ta Yue-tche à partir de l'an 2 avant notre ère
dans la propagation du Bouddhisme en Asie. Assurément bien des questions
continuent à rester en suspens, mais on peut espérer que le jour où des
fouilles auront été entreprises à Balkh et dans le Badhakhschân, les
historiens chinois permettront une fois de plus la coordination et la
systématisation des résultats mis en lumière par les archéologues et les
numismates ; alors la chronologie et la géographie de l'empire improprement
appelé Indo-scythe pourront être définitivement fixées. Si tel est l'intérêt que présente le chapitre CXVIII du Heou Han chou
pour l'histoire des relations commerciales entre la Chine et l'Orient
romain et pour l'histoire des Indo-scythes, il est évident que ce chapitre
a dû déjà attirer l'attention du monde savant. En effet, les pages qui sont
relatives au Ta Ts'in (Orient romain) et aux Ta Yue-tche (Indo-scythes) ont
fait l'objet d'études si nombreuses qu'il serait difficile de les rappeler
toutes [3]. Cependant, tandis qu'on p.152 s'ingéniait à expliquer et à
commenter toujours les mêmes passages, il ne se trouvait personne pour
donner une traduction du chapitre dans son entier : il m'a semblé que
l'entreprise devait être tentée puisqu'elle permettrait au lecteur de
saisir d'un seul coup d'?il quelle était la situation politique de l'Asie
Centrale au premier siècle de notre ère ; j'ai cru d'ailleurs qu'il serait
bon d'éclairer le texte du chapitre consacré aux contrées d'Occident e