nouveau regard sur le cannabis - Rouen

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NOUVEAU REGARD SUR LE CANNABIS Jean COSTENTIN - Professeur de Pharmacologie
Unité de Neuropsychopharmacologie
FRE 2735 CNRS
Faculté de Médecine & Pharmacie
76183. ROUEN
Résumé :
On assiste au rajeunissement de l'usage du cannabis / marijuana /
shit..., à l'accroissement du nombre de personnes qui s'y adonnent et à la
diffusion de produits dont la teneur en principe actif (le
tétrahydrocannabinol = THC) est décuplée relativement à celle des produits
d'antan. Simultanément sont produites des données épidémiologiques qui
soulignent sa nocivité, tandis que des études neurobiologiques éclairent
enfin ses mécanismes d'action.
Cette revue présente diverses données récemment acquises sur les
récepteurs du THC, sur les substances endogènes qui les stimulent
(endocannabinoïdes), sur les différents effets qu'elles modulent, sur la
pharmacocinétique du THC, ses propriétés addictives intrinsèques, ses
interactions avec l'alcool et l'héroïne, ses effets psychotoxiques en
matière d'anxiété, de dépression, de perturbations cognitives, de
schizophrénie, de comportements violents.
Tous ces éléments sont en rupture flagrante avec les propos erronés et
banalisants qui continuent d'être tenus sur cette drogue.
Depuis une quarantaine d'années (soit presque deux générations)
l'usage "récréatif" du cannabis croit régulièrement dans la population
française, avec des âges d'initiation de plus en plus précoces, alors que
les produits en circulation sont de plus en plus fortement dosés en delta-9-
tétrahydrocannabinol (THC, le principe actif majeur du cannabis). C'est
ainsi que l'Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies
(O.F.D.T.) constate qu'à l'âge de 17 ans près de 60% des garçons déclarent
"avoir expérimenté" le cannabis, tandis qu'environ 15% d'entre eux en
feraient un usage régulier. Il apparaît de plus que 200 000 petits français
en auraient déjà consommé entre 12 et 14 ans. La police des stupéfiants
constate que les produits désormais en circulation sont de plus en plus
fortement dosés en THC, certains ayant des teneurs décuplées relativement à
la marijuana originaire d'Afrique du Nord qui a fondé une certaine
mythologie de cette drogue dans les années 68.
La marijuana, l'ancienne et la nouvelle. Le chanvre indien présente diverses parentés avec le chanvre textile,
mais en diffère par sa composition chimique.
Le Cannabis sativa, variété indica, appartient à la famille des
cannabinacées et à l'ordre des Urticales. Ses feuilles et rameaux courts
séchés (marijuana, kif, dagga, bang, herbe, pot, beuh...) peuvent servir à
la confection de cigarettes ou à bourrer des pipes. On peut aussi isoler
ses fleurs femelles qu'on a rendues stériles en coupant les fleurs mâles
des plants (il s'agit d'une plante dioïque, avec des pieds mâles et des
pieds femelles qui en fait ne se distinguent que lors de la floraison). Ces
fleurs femelles sont très riches en résine, et cette dernière en THC
(sinsemilla, ganja...). On peut, par battage, séparer les grains de résine
appendus à leurs poils. Ils deviendront, après qu'on les ait mélangés à
divers ingrédients (très hétérogènes et parfois peu ragoûtants), une pâte
ferme, de teinte verte à brune, qui correspond au haschich ( = charas,
shit, hasch, teuch...). Celle ci, associée au tabac, permettra la
confection de "joints", ou sera fumée dans des pipes à eau. Des modalités
récentes de réalisation et d'utilisation de celles ci permettent à
l'utilisateur d'installer des concentrations sanguines subitement très
élevées, donnant lieu à des perceptions rappelant celle du " shoot " induit
par l'injection intraveineuse de certaines autres drogues ( cocaïne,
héroïne...). Des extraits alcooliques de la résine conduisent à l'huile de
cannabis, d'une teinte variable, entre vert foncé, marron ou noire, qui
peut être ajoutée à diverses boissons. Le haschich peut encore s'ingérer
sous la forme de confiseries, pâtisseries orientales, formes modernes du
dawamesh ancien, dans lequel l'extrait gras était mêlé à du sucre, de la
vanille, de la cannelle, des pistaches, des amandes, du musc...Dans la
plante les principes actifs, les cannabinoïdes, sont présents à plus de 95
%, sous forme de dérivés carboxyliques intrinsèquement inactifs. C'est la
chaleur de la combustion (cigarette, pipe) ou de la cuisson (avec un corps
gras) qui transformera ces substances en THC.
La toxicomanie est le domaine par excellence du toujours plus, toujours
plus souvent, toujours plus fort ; aussi, pour la satisfaction des drogués,
des produits de plus en plus dosés sont apparus sur le " marché ". Ils sont
issus de sélections génétiques, de cultures sous serre, sans sol (
hydroponiques) où la luminosité, l'hygrométrie sont contrôlées, en opérant
la stérilisation des fleurs mâles, pour accroître, on l'a dit, la teneur en
THC des inflorescences femelles. C'est en particulier le " Nederwiet "
(Paris et Tran, 1998) ou " super-skunk " originaire de Hollande. La culture
du kif dans le Rif marocain, pour ne pas être en reste, modifie également
ses pratiques et le choix de ses graines. L'internet, la poste, et des
officines troubles dans nos villes mettent à la disposition des
particuliers, les semences et matériels leur permettant d'assurer une
production à la mesure de leur consommation, ainsi que diverses recettes
pour la confection de pipes improvisées, au service d'effets
décuplés.(Chabrol et Roura, 2004).. Les principes actifs du cannabis Les principes actifs du cannabis sont réunis sous le vocable de
cannabinoïdes. En fait, parmi plus d'une centaine de constituants déjà
identifiés, celui qui domine, tant par sa quantité que par l'intensité de
ses effets psychotropes, est le delta-9-tetrahydrocannabinol ( figure 1 =
le delta-9-tétrahydrocannabinol ). Il a une structure relativement
complexe, tricyclique, dérivée du benzopyranne.(Figure 1)
Stricto sensu, ce n'est pas un alcaloïde puisqu'il n'entre pas d'atome
d'azote (N) dans sa composition.
Il se présente à l'état pur, telle une colle, insoluble dans l'eau,
soluble dans l'alcool pur ;
Ceci complique notablement son usage expérimental (pesée,
administration à l'animal) et a stimulé la mise au point de succédanés,
développant de semblables effets, mais d'un usage plus commode, tel le HU
210.
C'est à Mechoulam, un chercheur israélien, que l'on doit la
caractérisation princeps de ce THC. On verra que c'est ce même auteur qui,
vingt ans plus tard, a caractérisé la première substance endogène dont le
THC mime les effets ; ce premier "endocannabinoïde" qu'il a désigné
anandamide ( du sanscrit ananda = félicité ). Les récepteurs du THC A partir du THC, s'est engagée la caractérisation du récepteur à
l'origine de ses effets. Après les approches de radio-liaison, la biologie
moléculaire s'en est mêlée. Elle a cloné deux récepteurs différents pour ce
THC. Ce fut d'abord le récepteur central, dit CB1, cloné en 1990 par
Matsuda et coll. ; puis, trois ans plus tard, le récepteur périphérique,
dit CB2, cloné par Munro et coll. (1993). Ce dernier récepteur est présent
au niveau des cellules du système immunitaire, où il paraît "médier" des
effets immunodépresseurs.
Ces récepteurs CB1 et CB2 appartiennent à la très grande famille des
récepteurs à sept hélices transmembranaires couplés aux protéines G (=
RCPG), qui pourrait compter près d'un millier de représentants. Nous
n'envisagerons ici que les récepteurs CB1.
La stimulation des récepteurs CB1 par le THC active une protéine G, de
type Gi (i comme inhibitrice), ce qui a pour effet d'inhiber, à la face
interne de la membrane cellulaire, une activité enzymatique, l'adénylate
cyclase, avec pour conséquence une diminution de la synthèse d'un second
messager, l'AMP-cyclique ( Howlett, 1984 ). C'est de cette même façon
qu'agit la morphine, en stimulant des récepteurs opioides de type mu.
Pourtant, dans le striatum, les récepteurs CB1 pourraient être couplés à
une protéine Gs ; s comme stimulant ; stimulant l'activité adénylate
cyclase et partant la synthèse d'AMP cyclique (Glass et Feider,1997). Les
études se poursuivant, il est apparu, qu'en fait, les récepteurs CB1
s'avéraient capables d'activer au moins six sous types de protéines G, des
types Gi et Go, ce qui leur permet de gérer ou de moduler une grande
variété de systèmes de signalisation intracellulaires (Prather et coll.,
2000). Au nombre de ces derniers citons, outre l'accroissement ou la baisse
des taux d'AMPc, des modifications de courants potassiques (Mu et coll.,
1999) ou de courants calciques ( Mackie et coll., 1995 ), ou encore de la
voie des Mitogen Activated Protein Kinase = MAP kinases ( Bouaboula et
coll., 1995 ).
- La distribution cérébrale des récepteurs CB1 apparaît à la fois
hétérogène et ubiquiste. On en trouve une forte densité dans le cervelet,
la substance noire réticulée, le globus pallidus, l'hippocampe. La densité
est moindre, mais encore notable, dans le tubercule olfactif, le cortex
primaire, le cortex frontal, le striatum ( Herkenham et coll., 1990 ).
- La principale fonction neurochimique de ces récepteurs CB1 paraît
résider dans la modulation de la libération de divers neuromédiateurs.
Ainsi, par exemple, à leur stimulation est associée : une inhibition de la
libération de GABA (Aci