L'Opium

4 juin 2012 ... Relis Tarkos (Expressions libres 5 et 5 bis). ...... où étaient imprimées les photos
d'une chatte et d'un chat humains. ...... la jeunesse, l'amour); sensations à la fois
douloureuses et jouissives, ...... concluant d'un royal : « Je pardonne » qui fera
écho à son interview ...... Claude corrige : ce sont des iguanes.

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|Paul BONNETAIN |
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|L'OPIUM |
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|Oh ! just, subtle and mighty opium !... |
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| | à partir de : L'OPIUM par Paul BONNETAIN (1858-1899)
G. Charpentier et Cie, éditeurs, Paris, 1886, 607 pages. Édition en format texte par
Pierre Palpant www.chineancienne.fr
mars 2016
À Alphonse DAUDET Au retour de mon premier voyage en Extrême-Orient, vous m'avez conseillé,
mon cher Maître, d'écrire un roman sur l'opium, J'ai presque aussitôt
rebouclé ma valise et voici que je rentre ramenant votre filleul. Hâlé, le souffle court, les jambes faibles, on sent qu'il a fait campagne
avec son père, et de Hanoï à Pékin, de Canton à Yokohama, couru bien des
mers, traîné par trop de routes. Cependant, je veux vous l'offrir et vous
remercier de votre parrainage. Si las que vous puissiez être des dédicaces,
vous agréerez celle-ci peut-être, en lisant entre ses lignes ma si
reconnaissante affection. Paul BONNETAIN.
Nice, 7 mai 1886.
« Oh, just, subtle and mighty opium ! that to the hearts of poor and rich
alike for the wounds that will never heal and for « the pangs that tempt
the spirit to rebel », bringest an assuaging balm ; eloquent opium ! that
with thy potent rhetoric stealest away the purposes of wrath, and to the
guilty man for one night givest back the hopes of his youth, and hands
washed pure from blood ; and to the proud man a brief oblivion for Wrongs undress'd, and insults unavenged ; that summonest to the chancery of dreams for the triumphs of suffering
innocence, false witnesses and confoundest perjury, and dost reverse the
sentences of unrighteous judges ; thou buildest upon the bosom of darkness,
out of the fantastic imagery of the brain, cities and temples beyond the
art of Phidias and Praxiteles - beyond the splendour of Babylon and
Hekatompylos, and « from the anarchy of dreaming sleep » callest into sunny
light the faces of long-buried beauties and the blessed household
countenances, cleansed from the « dishonours of the grave ». Thou only
givest these gifts to man, and thou hast the keys of Paradise, oh, just,
subtle, and mighty opium ! » (Confessions of an English Opium Eater,
by Thomas de Quincey.) « Ô juste, subtil et puissant Opium ! Toi qui, au c?ur
du pauvre comme du riche, pour les blessures qui ne se
cicatriseront jamais et pour les angoisses qui
induisent l'esprit en rébellion, apportes un baume
adoucissant ; éloquent Opium ! toi qui, par ta
puissante rhétorique, désarmes les résolutions de la
rage, et qui, pour une nuit, rends à l'homme coupable
les espérances de sa jeunesse et ses anciennes mains
pures de sang ; qui, à l'homme orgueilleux, donnes un
oubli passager Des torts non redressés
et des insultes non vengées ; qui cites les faux témoins au tribunal des rêves pour
le triomphe de l'innocence immolée ; qui confonds le
parjure ; qui annules les sentences des juges iniques ;
- tu bâtis sur le sein des ténèbres, avec les matériaux
imaginaires du cerveau, avec un art plus profond que
celui de Phidias et de Praxitèle, des cités et des
temples qui dépassent en splendeur Babylone et
Hekatompylos ; et du chaos d'un sommeil plein de songes
tu évoques à la lumière du soleil les visages des
beautés depuis longtemps ensevelies, et les
physionomies familières et bénies, nettoyées des
outrages de la tombe. Toi seul, tu donnes à l'homme ces
trésors, et tu possèdes les clefs du Paradis, ô juste,
subtil et puissant Opium ! » (Id. traduction de Baudelaire.)
PREMIÈRE PARTIE « Chaque homme porte en lui sa dose d'opium naturel,
incessamment secrétée et renouvelée, et, de la
naissance à la mort, combien comptons- nous d'heures
remplies par la jouissance positive, par l'action
réussie et décidée ? » (Baudelaire : L'invitation au voyage.)
I @ - p.003 Vous êtes un grossier personnage, et je vais vous signaler
à vos chefs ! Sur cette dernière apostrophe au conducteur, Marcel Deschamps sauta hors
du tramway. Le jeune homme était très rouge, ayant commencé par être très pâle, et
les frémissements de sa colère se prolongeaient, leur cause éteinte, sous
cette exaltation que donne aux novices la sensation d'une galerie, d'un
auditoire. - La Madeleine !... glapit l'employé. Le petit véhicule s'arrêtait à sa place habituelle, et tandis que les
chevaux fumants essuyaient mutuellement leurs naseaux sur leur crinière,
oublieux du fouet déjà, et résignés dans l'essoufflement de leur repos, les
voyageurs moins agiles que Marcel, les p.004 dames impotentes, descendaient
à leur tour, en s'appuyant sur le bras rechigné du conducteur. Son dernier passager parti, l'homme racontait sa querelle au contrôleur
gravement occupé à vérifier la feuille de recette et le timbre enregistreur
de la voiture. - Figurez-vous que ce particulier-là... Mais Marcel s'éloignait, voulant ne pas entendre afin de ne point avoir
de plainte à déposer, et satisfait déjà, d'ailleurs, par l'approbation des
vieux messieurs et des vieilles dames qu'il entendait derrière lui
s'entretenir de sa galanterie. Au bout du boulevard Malesherbes, il
ralentit le pas, machinalement, et se laissa dépasser comme si son allure
eût suivi les modifications de son pouls. Pourquoi s'était-il emporté ? Il
se le demandait un peu. La bizarre fantaisie, de jouer les Don Quichotte
bourgeois en tramway pour les beaux yeux d'une matrone à ridicule qu'il
n'avait point seulement vue ! Ah ! Marcel ! Toujours la langue prompte !...
Comme s'il n'était pas habitué aux insolences populacières de ses égaux en
électorat ! Eh ! l'on se « débrouille » parbleu ! La dame n'avait qu'à se
faire comprendre sans impatienter l'employé !... En tout cas, il ne devait
point intervenir, puisqu'avec sa lâcheté bien parisienne, il n'aurait pas
le courage de pousser sa bonne action jusqu'à se déranger pour signer une
plainte dans le bureau du contrôleur !... Les nerfs ! toujours les nerfs ! - Est-ce bien la faute de mes nerfs ?... Il s'arrêta tout à fait, accrochant sa songerie questionneuse à la
réfection d'une cigarette qu'il alluma longuement, sa canne sous le bras.
Des gens passaient. Des bonnes, des soldats, deux filles d'élégance
excentrique. L'une des deux le dévisagea longuement. Ap