choix pédagogiques - Christophe Chomant

Tout le temps de la journée scolaire ? sinon le maximum de ce temps ? doit être
exploité en vue de cet exercice. Le maître ne doit donc pas parler ni agir à sa
place. D'une façon générale, il doit parler et agir le moins possible. Cet
enseignant doit au contraire créer ? par l'organisation de la classe, le matériel,
les tâches à ...

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Christophe CHOMANT
Professeur d'école
École maternelle de Quincampoix
Circonscription de Bois-Guillaume
CHOIX PÉDAGOGIQUES EN ÉCOLE MATERNELLE Février 2005
« Ce que j'entends, je l'oublie ;
ce que je fais, je le comprends ;
ce que je vis, je le retiens. »
Confucius
« Le meilleur moyen de comprendre,
c'est de faire. »
Kant
« Apprends-moi à faire seul ! »
Maria Montessori
Il semble utile (d'essayer) de définir noir sur blanc sa propre action
pédagogique : ceci aide à la clarifier et la rendre cohérente ; c'est
également un moyen simple de l'exposer, à des parents d'élèves ou
partenaires éducatifs.
Ces choix se sont esquissés et affinés, par observation, réflexion et
expérimentation, au fil d'une quinzaine d'années de remplacement en écoles
maternelles et élémentaires, ainsi qu'au sein de « l'enfance inadaptée »,
au Centre Départemental de l'Enfance à Canteleu.
Trois enseignants, par leur clairvoyance, leur rigueur ou leur
engagement , ont particulièrement aiguisé mon regard et ma réflexion :
Monique Cabos, Lydie Langlois et Christian Basire. Je les en remercie.
Les pages qui suivent décrivent la pédagogie que j'essaie de mettre en
place au sein de ma classe de petite section à l'école maternelle Hélène
Boucher de Quincampoix. Généralités
Principes pédagogiques généraux Trois principes sont essentiels à mes yeux : l'éducation à l'autonomie,
le contrôle individuel systématique des apprentissages et le respect de la
personne.
Éducation à l'autonomie, parce que l'enfant entre à l'école avec la chape
de l'affection maternelle, qui certes le protège mais à la fois freine la
construction de sa personnalité. L'éducation à l'autonomie permet à
l'enfant non seulement de se libérer de cette dépendance, mais aussi de le
préparer à devenir un citoyen responsable.
L'activité autonome permet en outre au maître de s'occuper des enfants de
manière individuelle et poursuivre le second objectif d'individualisation
des apprentissages.
Tout ce qui peut être réalisé par l'enfant lui-même (comme se servir en
matériel, organiser son atelier, valider et ranger son travail, enfiler une
blouse, s'habiller, etc.) sera encouragé, appris et pratiqué de manière
habituelle.
Cette autonomie, outre qu'elle développe la liberté et la responsabilité
de l'enfant, optimise la disponibilité du maître pour intervenir
individuellement auprès des élèves, et surtout ceux qui en ont le plus
besoin.
Contrôle individuel des apprentissages, parce qu'une des missions de
l'école maternelle reste de préparer au cours préparatoire et parce que
nombre d'activités d'une classe maternelle (comme par exemple les puzzles,
les jeux de stratégie et même la peinture) échappent (souvent) à une
validation systématique. Or, je crois possible de livrer au cours
préparatoire (sauf cas pathologique avéré) des enfants tous capables
d'apprendre à lire et compter (indépendamment du problème de maturité que
pose l'apprentissage de la lecture par des enfants de six ans). Il semble
vrai que « l'attention, la mémoire, la capacité d'évocation des savoirs
mémorisés, la capacité de perception et de traitement des informations,
leur représentation par le langage sont, sauf exception douloureuse,
données à tous[1] » (même si on observe par ailleurs une diversité
naturelle des potentialités cognitives et des tempéraments).
Ce contrôle des activités de l'enfant peut être réalisé par deux
principaux moyens : l'auto-validation des travaux laissés en libre-service
et une individualisation de la relation maître-élève dans les tâches de
lecture, d'écriture et de comptage.
Il faut bien avoir à l'esprit, en outre, le fait qu'une classe d'élèves
n'est pas un « bloc-groupe », mais un ensemble d'individus, irréductibles
au groupe, que le groupe ne transcende pas. En conséquence, l'enseignant
doit s'adresser non pas à un « groupe » mais à des individus, et mieux
encore à chaque individu. Dans cette optique, la « réussite des élèves »,
ce n'est pas la réussite globale (et plus ou moins parfaite) du « groupe-
classe », mais la pleine réussite de chacun : chaque élève doit réussir,
doit développer pleinement ses propres potentialités dans chaque domaine
d'activité.
Respect de la personne : sachons en permanence nous mettre à la place des
élèves, et demandons nous si les activités proposées et le climat de la
classe nous sembleraient supportables, agréables, intéressants et
enrichissants. Sachons nous taire ou parler peu (mais laisser parler et
agir l'élève), cultiver le calme, la paix et la sérénité dans la classe, ne
jamais interdire ou demander quoi que ce soit sans en expliquer les raisons
réelles (qui doivent poursuivre l'intérêt propre de l'élève, et que l'élève
doit comprendre). Parce que l'élève est un être humain à part entière,
comme une grande personne. Le climat et les résultats d'une classe où
l'enseignant veillera à ces principes de respect ne s'en porteront que
mieux. Les lois dans la classe Liberté et autonomie ne signifient pas pour autant absence de loi.
Considérant la nature de l'homme (et de l'enfant), seul le respect d'un
système de lois permet le travail et la liberté dans un climat de paix et
de sécurité. Un enfant aime travailler - et travaille mieux - dans un cadre
serein, calme, pacifique, sécuritaire, qui exclue toute violence physique
ou verbale, agitation, tension ou autres désordres stressants.
Quelques principes très simples, applicables dès la petite section,
concourent à cet ordre paisible : « ne pas frapper autrui, ne pas crier, ne
pas jeter d'objets, ne pas confisquer à autrui son bien, ranger à sa place
ce que l'on a sorti » (chaise comprise).
Ces principes s'appliquent d'ailleurs également aux adultes : ne pas
saturer l'espace de paroles, ne pas crier, ne pas terroriser, ne pas
s'énerver, ne pas agir de manière injuste ou irréfléchie, ne pas demander
ou interdire quoi que soit sans en exposer des raisons compréhensibles.
Le maître reste évidemment l'initiateur et le contrôleur des lois, sans
démagogie ni naïveté rousseauïste, et sachant par ailleurs qu'une règle est
d'autant mieux respectée que l'enfant en comprend l'utilité pour son
bénéfice propre.
Les lois d'une classe maternelle, tout comme en élémentaire, sont en
outre naturellement respectées par un enfant aimé et respecté lui-même, par
un enfant plongé dans des activités captivantes, et par un enfant à qui
l'adulte fait confiance. En fait, le respect des lois relève moins
« d'autorité » (et encore moins d'autoritarisme !) que d'organisation et de
conditions de vie en classe qui sont heureuses et enrichissantes. Le comportement du maître L'enfant vient à l'école pour « s'exercer ». Tout le temps de la journée
scolaire - sinon le maximum de ce temps - doit être exploité en vue de cet
exercice. Le maître ne doit donc pas parler ni agir à sa place. D'une façon
générale, il doit parler et agir le moins possible. Cet enseignant doit au
contraire créer - par l'organisation de la classe, le matériel, les tâches
à disposition et la méthode pédagogique - des conditions optimales pour un
exercice permanent de l'enfant (exercice langagier, réflexif, lecteur,
graphique, physique...). Le rôle de l'enseignant n'est pas de parler ou
agir de façon magistrale (parfois désordonnée, souvent inefficace), mais de
s'effacer au contraire devant l'activité de l'enfant, surtout à l'école
maternelle. Que fait-il, alors ? Il va auprès de chacun, veille au bon
déroulement des activités, questionne, encourage, gratifie, signale les
erreurs, aiguille, suggère, stimule de façon individuelle...
Cette disponibilité lui procure en outre la possibilité de mener une
action particulière, quasi-préceptorale, auprès d'un petit groupe : atelier
de graphisme, de pré-lecture, apprentissage d'un jeu de société, etc., ce
pour le plus grand bénéfice de chacun (au lieu de papillonner et brasser de
l'air autour d'ateliers multiples dont il maîtrise mal les efforts, progrès
et réussites individuels[2]).
Il va de soi qu'un tel comportement de la part du maître ne peut se
pratiquer que dans une classe fonctionnant de manière relativement
autonome.
La langage du maître doit être de registre soutenu, sa syntaxe rigoureuse
et son vocabulaire précis, même (et surtout !) à destination d'enfants de
moins de trois ans. L'apprentissage de la communication et de la logique
syntaxique commence dès cet âge. On pourrait même dire que l'essentiel du
travail de langage mené en école maternelle - et notamment en petite
section - consiste à ne s'adresser aux élèves que de façon claire, avec une
syntaxe cohérente et un vocabulaire rigoureux[3]. Ainsi acquerront-ils des
bases solides pour le langage et s'exprimeront-ils eux-mêmes. À l'inverse,
une séquence formelle de « langage » au milieu d'un discours quotidien
manquant de cohérence et de rigueur semble de peu d'utilité.
Le maître doit rester calme et maître de lui-même en toute circ