François Lescoffit - unBlog.fr
Cet exercice de solfège dégénérait en une mascarade des plus fantaisistes. ...
Ce prof de maths, récemment ?parti ad patres,? qui me nota si bien cette ..... Et si
on était tenté de l'oublier, ?là où est ton trésor, là sera bientôt ton coeur?, ..... De
toute façon, qu'on la chasse, pourchasse dans quelque domaine que ce soit, ...
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François Lescoffit LA BRISURE
Récit
La liberté d'expression À ma fille...
LA VOLONTÉ DE SAVOIR
"Nous devons toujours nous donner
la possibilité de reconnaître nos
erreurs passées et de changer
le cours de notre action."
K. Arrow
Peut-on vivre impunément ou, mieux, respirer, pendant plus de quarante
ans dans un monde clérical, souvent plus que traditionaliste, sans en
être profondément modifié dans les structures mêmes de son être ?
Inutile de biaiser, louvoyer, ratiociner, le fait s'impose : le clerc
est toujours là, même après dix-huit ans de "désert" professionnel dans
un établissement public. Un clerc, certes plus lucide, plus serein même,
prêt à tout regarder en face, à tout entendre et surtout à tout vouloir
comprendre plus que jamais.
Quand, à l'occasion, je revois des "anciens" toujours dans la
"structure", je suis bien obligé de reconnaître la longueur du chemin
parcouru en solitaire (sous influence!). Il m'arrive de me demander
spontanément : "Que m'est-il arrivé ?"; et me voilà remontant à mes six
ans (puisque, parait-il, c'est à cet âge que pour la première fois j'ai
émis le désir - mot piégé s'il en est ! - de remplacer plus tard mon
vieux "recteur" commençant à déclarer forfait).
Et je retombe alors sur l' ÉNORME problème du milieu familial, dont se
régalent et s'engraissent parfois, les "psy" de tous poils et de toutes
obédiences.
Quand je pense que dans ma famille, trois garçons, sinon quatre (il
s'en est fallu de peu) et une fille ont suivi cette "vocation", je peux
deviner, à coup sûr, l'existence d'un milieu névrogène (dixit en son
temps Marc Oraison, grand scrutateur, "introspecteur", sondeur des âmes
cléricales devant l'Eternel !).
Eugen Drewermann, dans son livre Kleriker, avance des éléments
intéressants pour comprendre l'origine d'un tel choix, à première vue,
bien surprenant si on le considère avec le recul du temps. Si j'ai bien
compris l'auteur, des composantes névrotiques chez la mère et une
défaillance du père engendreraient chez l'enfant une "insécurité
ontologique" qui le pousserait à vouloir devenir un être exceptionnel
mais dans un cadre institutionnel relativement protecteur. La mère s'est
sacrifiée à son enfant sans pouvoir être totalement et pleinement mère
et épouse; l'enfant en réponse, pour ne pas perdre cet amour, se
sacrifie à son tour pour sa mère et cela bien avant l' oedipe. Le père
dans ce foyer apparemment idéal, n'assume pas vraiment son rôle et
demeure une charge supplémentaire pour la mère qui n'y suffit déjà plus.
L'insécurité ontologique de l'enfant et son impossibilité à assumer
cette mauvaise relation entre ses parents dont la mère est la principale
victime, engendrent chez lui sentiments de culpabilité, tendances
réactionnelles à la réparation, et surcompensation par un sentiment
exagéré de sa responsabilité vis à vis de la mère.
En fonction de cette hypothèse inspirée de la psychologie des
profondeurs, il ne me faudrait pas moins d'une monographie détaillée,
pour tenter de clarifier et expliciter mon itinéraire personnel. Peut-
être que par proximité, par extrapolation et nombreuses adaptations
(quelle prétention!) l'évolution de ma fratrie pourrait y trouver
quelque explication. Las moi, je ne suis pas au bout de mes peines !
Somme toute, ces pages que je vais tenter d'écrire voudraient, mis à
part le plaisir de retrouver les parfums de mon enfance et de ma
jeunesse, tendre vers un seul but : COMPRENDRE .
Comprendre comment, dès mon plus tendre âge, j'en suis venu à me
considérer comme l'élu de Dieu (ce mot d'élu me gêne beaucoup; c'est
pourtant le terme biblique);
Comment cette croyance d'être "choisi" (?) est née subjectivement chez
moi encore enfant .
Comment j'ai réagi à cette "vocation" tout au long des années, ce que
j'en ai ressenti et ce que j'en ai fait.
Et "en finale" - ce n'est pas la moindre question - pourquoi et
comment, progressivement, je me suis éloigné, pris mes distances par
rapport à cet engagement et plus largement par rapport à l'Eglise en
général .
Avec perplexité, je me demande quelle méthode choisir pour organiser,
structurer ces souvenirs - réflexions ?
Si je me mets à vouloir faire mon petit analyste, ce sera ennuyeux et
présomptueux; à la rigueur un mauvais démarquage de bouquins
spécialisés.
Si je tape bout à bout des mots, au fil de mes souvenirs et de mes
pensées, ces pages seront informelles, "pagailleuses" et je n'en tirerai
que peu de lucidité sur cet itinéraire brisé.
Peut-être faudrait-il tenter de concilier ces deux manières de faire?
Si je retiens cette dernière solution, elle entravera quelque peu ma
spontanéité, mais apportera quelques lumières. UN NID FAUSSEMENT DOUILLET... De plus en plus, au fil des ans, je suis étonné de constater à quel
point la figure du père tient peu de place dans les conversations
familiales. On a beau invoquer la mort tardive de la génitrice, ce fait
n'explique pas tout.
Personnellement, je n'ai compris que très tard (et avec quelle émotion
!), en lisant par hasard un roman de France Nespo un jour de grippe,
combien m'avait été douloureuse à vivre la paralysie de mon père,
jouissant par ailleurs d'une grande vitalité (jamais malade); en
apparence seulement, car mes souvenirs d'adolescent, laissent deviner
chez lui un tempérament à tendance dépressive. Le café était sa drogue
favorite et comme il travaillait (profession libérale permet) à deux pas
de la cuisine, il pouvait en user à souhait et même en abuser. Se
couchant très tard dans la nuit pour raison impérative de charges de
travail, il papillonnait le matin (quand il n'avait pas de rendez-vous)
au point de perdre beaucoup des avantages conquis de haute lutte par un
travail acharné, la veille au soir !
Quand son image me revient à l'esprit, j'ai du mal à croire que j'aie
pu avoir un oedipe conflictuel avec cet homme; il suscitait si peu la
combativité, semblant toujours prêt à céder aux injonctions de la vie en
général et de sa femme en particulier. Celle-ci rappelait souvent
(suprême délicatesse !) que c'était sous son influence, pour ne pas dire
sous sa pression, qu'il avait enfin créé ce cabinet de comptabilité,
avait acheté cette maison où nous vivions depuis ma très tendre enfance;
et je ne suis pas sûr que l'automobile et le téléphone (peu courants à
cette époque) n'aient pas la même origine.
Mais cette image un peu doucereuse de mon père ne provient-elle pas du
fait que je déployais et dépensais toute mon énergie "psychique" pour
résister (le mot ne me semble pas trop fort) à l'hégémonie totalitaire
de ma mère? Inacceptable pour elle, de penser tout haut et encore moins
d'agir dans un sens qui aurait été contraire au sien. Je devine, grâce à
des lectures sur le développement de la personnalité, qu'elle n'était
pas aussi bien dans sa peau qu'elle voulait le laisser entendre. Elle
avait épousé mon père, répétait-elle souvent, parce que lui avait
l'instruction et elle la santé; pour se marier ,elle s'était brouillée
avec son propre père, un savoyard géant, rustique et têtu pour lequel
elle avait la plus grande admiration empreinte de révérence amoureuse.
(L'oedipe avait dû laisser de sérieuses séquelles !)
Je crois que jusqu'à son départ pour le Ciel (auquel elle prétendait
croire très ferme, et sur l'existence duquel son sur-moi ne supportait
aucun doute pas plus d'elle-même que des autres), j'aurai lutté pied à
pied pour sauvegarder un peu d'autonomie par rapport à cette femme qu'à
la fois j'aimais, admirais et craignais, le tout dans un mélange
détonnant, qui surprenait ou choquait selon leur sensibilité, mes
proches.
Très tôt, le combat fut rude, au moins pour moi. Etant d'une santé
fragile, je fus sous sa coupe plus longtemps que la moyenne de mes
frères et soeurs et plus particulièrement, à l'âge de douze ans,où je
dus rester à la maison pendant au moins dix-huit mois (les antibiotiques
n'existaient pas encore et la médecine utilisait prudemment la durée).
Je me rappelle que même à cet âge encore tendre, je défendais
vaillamment mon pré carré, mon espace vital minimum. Je trouvais
toujours des coins ou des recoins inaccessibles dans la maison et le
jardin où échapper à son autoritarisme; à ses yeux, sans doute, exercice
de l'amour maternel, aux miens, certainement, empêcheuse de vivre en
jeune garçon découvrant les joies de l'indépendance. Dieu merci, les
médecins m'interdisaient la scolarité à l'extérieur, non les activités
les plus paisibles des enfants de mon âge. Je connaissais au centimètre
près, les passages difficiles sinon dangereux du toit, les branches les
plus inhospitalières des grands cerisiers du jardin où même la pui