LA SPONDYLARTHRITE ANKYLOSANTE : un rhumatisme ...

L'utilisation d'un traitement de fond est envisagée en cas de contre-indication ou
d'intolérance au traitement de première intention (AINS), ou en cas d'échec du
traitement de première intention, c'est-à-dire après emploi pendant trois mois
minimum [35]. Les DMARD (Disease-Modifying Antirheumatic Drugs) n'ont
montré ...

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LA SPONDYLARTHRITE ANKYLOSANTE : un rhumatisme inflammatoire chronique
Frédérique Astier
Docteur en Pharmacie
frederique.astier@etu.unilim.fr Xavier Guillot
Docteur en médecine - Rhumatologie
Praticien hospitalier - CHU de Besançon
xavier.guillot@yahoo.fr
La spondylarthrite ankylosante (SA) est le chef de file d'un groupe de
rhumatismes inflammatoires chroniques communément appelés
spondylarthropathies (ou plus récemment spondyloarthrites). Ces pathologies
sont caractérisées par des manifestations cliniques et radiologiques
communes telles que des lombalgies inflammatoires, une atteinte des
insertions tendineuses (enthèses) et des articulations périphériques, ainsi
que des manifestations extra-articulaires touchant le tube digestif, la
peau, le c?ur, les yeux et les poumons. Elles présentent également le même
terrain génétique prédisposant, dominé par l'antigène HLA-B27 (Human
Leukocyte Antigen B27). Cette maladie, dont les origines sont encore
méconnues, touche le sujet jeune et prédomine chez le sexe masculin. Au
cours de son évolution, des dommages structuraux et fonctionnels peuvent
survenir, tels que la rigidification de la colonne (ankylose), avec pour
conséquence une altération de la qualité de vie. EPIDEMIOLOGIE
La spondylarthrite ankylosante est une maladie rhumatismale inflammatoire
chronique, encore trop peu connue, qui touche en France 0,3 à 0,4 % de la
population, préférentiellement des sujets jeunes.
La prévalence de la maladie diminue avec l'âge, ainsi les premiers
symptômes apparaissent dans 80 % des cas avant l'âge de 30 ans, contre
seulement 5 % des cas après 45 ans [1]. L'âge moyen de survenue de la
maladie est de 26 ans [pic][1, 2].
Au niveau mondial, les hommes sont majoritairement touchés, ceci se traduit
par un sex-ratio moyen de 2 hommes pour 1 femme [pic][3, 4]. Cependant,
celui-ci peut varier de 2 à 9 hommes pour 1 femme [5]. En France, il
semblerait qu'actuellement la prévalence de la maladie soit identique dans
les deux sexes [pic][6].
Celle-ci serait en étroite corrélation avec la fréquence du HLA-B27 (Human
Leukocyte Antigen B-27) dans les différentes populations [pic][1, 3, 5], ce
qui se traduit au niveau mondial par l'existence d'un gradient décroissant
Nord/Sud [7]. En France, la prévalence du HLA B27 est d'environ 8% dans la
population générale. Les populations de l'hémisphère Nord seraient ainsi
plus touchées que celles de l'hémisphère Sud et présenteraient une
fréquence du HLA-B27 grandement supérieure.
ETIOLOGIE
Les mécanismes déclenchant l'apparition de la SA n'ont pas encore été à ce
jour totalement élucidés, mais on suspecte des facteurs génétiques et
environnementaux (microbiote intestinal) d'en être responsables. Ainsi, des
souris transgénique pour [le HLA B27 ?] élevées en milieu stérile ne
développent pas de SPA. La SA est une maladie polygénique. Ceci est démontré par l'existence de
formes familiales de la maladie, par un fort taux de concordances entre
jumeaux monozygotes et par une héritabilité élevée chez les personnes
apparentées à des sujets atteints [8]. Cependant, plus de 50% de la
prédisposition génétique reste à démontrer.
Parmi les gènes impliqués, on retrouve notamment le HLA-B27, le gène codant
pour le récepteur de l'IL-23 (IL-23R) qui serait plutôt un modulateur de la
sévérité de la maladie, le gène ERAP1 et le gène ARTS1 (Aminopeptidase
Regulator of TNFR1 Shedding) codant pour une aminopeptidase du réticulum
endoplasmique [9]. Le HLA-B27
Le HLA-B27 est une molécule appartenant au Complexe Majeur
d'Histocompatibilité (CMH) de classe I, région génétique localisée sur le
bras court du chromosome 6 (6p) qui code pour des molécules intervenant
dans les réponses immunitaires innée et adaptative [pic][8, 10, 11].
Cette molécule est organisée en hétérodimère, ce qui signifie qu'elle est
composée de deux sous-unités différentes, une chaîne lourde ? divisée en
trois domaines ?1, ?2, ?3, associée de manière non covalente à une chaîne
légère appelée ?2 microglobuline [pic][8, 10, 11].
Son rôle habituel est de présenter aux lymphocytes T CD8+ (LTCD8+) des
peptides antigéniques d'origine endogène [12].
Le système HLA est très polymorphe, et ceci se traduit par un nombre
important d'allèles pour chaque locus, chaque allèle pouvant également
posséder divers variants alléliques. En ce qui concerne l'allèle HLA-B*27,
plus de 80 variants alléliques ont été découverts à travers le monde [13]
et tous dérivent d'un variant allélique ancestral : le HLA-B*2705 [pic][4,
8, 10, 11]. De plus, deux sous-types (B*2706 et B*2709) retrouvés dans les
populations du Sud-Est Asiatique et en Sardaigne, ne semblent pas être liés
au développement de la maladie. Les raisons de cette non-association avec
la maladie restent encore méconnues [10]. En France, 7,5 % de la population est porteuse de l'antigène HLA-B27 mais
seulement 5% des porteurs développeront la maladie, ce qui confirme que
d'autres facteurs génétiques en dehors du CMH prédisposent à la maladie.
L'antigène B27 ne serait responsable que de 25% de la prédisposition
génétique dans l'hérédité de la SPA, les autres facteurs génétiques
identifiés jusqu'à présent ne représentant que 4%. Cependant 90 à 95 % des
patients spondylarthritiques sont HLA-B27 positifs (fréquence variable
selon le type de spondyloarthrite). Toutes ces données permettent de
calculer un risque relatif, soit le risque de développer la maladie
lorsqu'un individu est porteur du HLA-B27, supérieur à 100 [pic][8, 11,
14]. PHYSIOPATOLOGIE
[pic] Stade I : L'inflammation
Les processus inflammatoires surviennent principalement au niveau de deux
tissus : l'enthèse et le tissusynovial.
L'enthèse désigne la zone d'insertion dans l'os des ligaments, des tendons
et de la capsule articulaire. Il existe deux types d'enthèses, la fibreuse
et la fibrocartilagineuse. La première constitue les points d'attache
métaphysaires et diaphysaires et est formée d'un tissu conjonctif à base de
collagène. La seconde correspond à la zone d'insertion au niveau des
épiphyses des os longs ou du carpe ou du tarse. Elle est composée de 4
zones histologiques distinctes (zone tendineuse = fibre de collagène ;
fibrocartilage ; minéralisation du fibrocartilage et os) [pic][12, 15].
L'enthèse est capable de supporter de fortes contraintes mécaniques, elle
sert ainsi à compenser les modifications de pression et à tamponner les
impacts [15]. Parmi les nombreuses hypothèses énoncées pour tenter
d'expliquer la survenue des processus inflammatoires au niveau de
l'enthèse, deux d'entre elles semblent retenir le plus d'attention.
La première correspond à l'action du stress mécanique appliqué à l'enthèse.
Celui-ci faciliterait l'apparition de microtraumatismes responsables d'une
augmentation de la vascularisation locale qui favoriserait le dépôt
d'antigènes bactériens. Ces épitopes antigéniques seraient reconnus par les
TLR (Toll Like Receptor)[8], une famille de récepteurs impliqués dans les
réponses inflammatoires et dans les mécanismes de défense vis-à-vis des
organismes pathogènes [16]. Ils sont exprimés à la surface de différents
types cellulaires comme les monocytes, macrophages et les cellules
dendritiques, et reconnaissent deux types de ligands :
Les PAMPs (Pathogen Associated Molecular Patterns), des épitopes
antigéniques partagés par un grand nombre de microbes.
Les DAMPs (Damages Associated Molecular Patterns), des signaux de dangers
libérés par des cellules endommagées, tels que les protéines du choc
thermique ou la fibronectine.
La stimulation des TLR, par la reconnaissance de leur ligand est ensuite
responsable d'une activation des cellules de l'immunité innée grâce aux
voies de signalisation intracellulaire, puis de la production par ces
cellules de médiateurs inflammatoires comme le TNF-? (Tumor Necrosis Factor
?), l'IL-1 (Interleukine 1), l'IL-6 (Interleukine 6) et le TGF-?
(Transforming Growth Factor) [16].
Les microtraumatismes peuvent également favoriser la libération, par des
cellules nécrotiques, de DAMPs déclenchant ou entretenant l'inflammation,
notamment lorsqu'ils sont associés à des composants bactériens [17]. La deuxième hypothèse fait appel à un mécanisme auto-immun.
L'immunisation de souris avec de l'aggrécane ou avec son domaine globulaire
G1 permettant sa liaison avec l'acide hyaluronique, aboutit à des symptômes
typiques de la SA [pic][1, 4]. De plus, 62 % des patients
spondylarthritiques possèdent des LT-CD4+ dirigés contre le domaine G1 de
l'aggrécane. Ce domaine G1 est également retrouvé au niveau du squelette
axial, de l'uvée et des cellules musculaires lisses du tissu artériel, où
sont localisées les principales atteintes de la SA [4]. Cette dernière
hypothèse n'est pas contradictoire avec celle du stress mécanique car les
tissus porteurs du domaine G1 de l'aggrécane subissent tous des stress
mécaniques. L'inflammation chronique se développe plus facilement dans les tissus
proches et au contact des enthèses car ceux-ci sont plus accessibles à
l'infiltration cellulaire et à l'angiogénèse [18]. La membrane synoviale
est le tissu qui tapisse l'