Amoris Laetitia - sainte anne de montjuzet

Les paroles de saint Jean-Paul II nous éclairent : « Notre Dieu, dans son mystère le plus ... Un exercice responsable de la paternité implique donc que les conjoints ... Familiaris consortio, n. 13), il décrit la façon dont les époux, dans leur amour ... [169] Mais une personne mariée peut vivre la charité à un degré très élevé.

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EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE
AMORIS LAETITIA / LA JOIE DE L'AMOUR
DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS
AUX ÉVÊQUES, AUX PRÊTRES ET AUX DIACRES, AUX PERSONNES CONSACRÉES
AUX ÉPOUX CHRÉTIENS ET À TOUS LES FIDÈLES LAÏCS
SUR L'AMOUR DANS LA FAMILLE


1. La joie de l'amour qui est vécue dans les familles est aussi la joie de
l'Église. Comme l'ont indiqué les Pères synodaux, malgré les nombreux
signes de crise du mariage, « le désir de famille reste vif, spécialement
chez les jeunes, et motive l'Église ».[1] Comme réponse à cette aspiration,
« l'annonce chrétienne qui concerne la famille est vraiment une bonne
nouvelle ».[2]

2. Le parcours synodal a permis d'exposer la situation des familles dans le
monde actuel, d'élargir notre regard et de raviver notre conscience de
l'importance du mariage ainsi que de la famille. En même temps, la
complexité des thèmes abordés nous a montré la nécessité de continuer à
approfondir librement certaines questions doctrinales, morales,
spirituelles et pastorales. La réflexion des pasteurs et des théologiens,
si elle est fidèle à l'Église, si elle est honnête, réaliste et créative,
nous aidera à trouver davantage de clarté. Les débats qui se déroulent dans
les moyens de communication ou bien dans les publications et même entre les
ministres de l'Église, vont d'un désir effréné de tout changer sans une
réflexion suffisante ou sans fondement, à la prétention de tout résoudre en
appliquant des normes générales ou bien en tirant des conclusions
excessives à partir de certaines réflexions théologiques.

3. En rappelant que « le temps est supérieur à l'espace », je voudrais
réaffirmer que tous les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux ne doivent
pas être tranchés par des interventions magistérielles. Bien entendu, dans
l'Église une unité de doctrine et de praxis est nécessaire, mais cela
n'empêche pas que subsistent différentes interprétations de certains
aspects de la doctrine ou certaines conclusions qui en dérivent. Il en sera
ainsi jusqu'à ce que l'Esprit nous conduise à vérité entière (cf. Jn 16,
13), c'est-à-dire, lorsqu'il nous introduira parfaitement dans le mystère
du Christ et que nous pourrons tout voir à travers son regard. En outre,
dans chaque pays ou région, peuvent être cherchées des solutions plus
inculturées, attentives aux traditions et aux défis locaux. Car « les
cultures sont très diverses entre elles et chaque principe général [...] a
besoin d'être inculturé, s'il veut être observé et appliqué ».[3]

4. De toute manière, je dois dire que le parcours synodal a été d'une
grande beauté et a offert beaucoup de lumière. Je remercie pour tous les
apports qui m'ont aidé à contempler les problèmes des familles du monde
dans toute leur ampleur. L'ensemble des interventions des Pères, que j'ai
écouté avec une constante attention, m'a paru un magnifique polyèdre,
constitué de nombreuses préoccupations légitimes ainsi que de questions
honnêtes et sincères. Pour cela, j'ai retenu opportun de rédiger une
Exhortation Apostolique post-synodale pour recueillir les apports des deux
Synodes récents sur la famille, en intégrant d'autres considérations qui
pourront orienter la réflexion, le dialogue ou bien la praxis pastorale, et
qui offriront à la fois encouragement, stimulation et aide aux familles
dans leur engagement ainsi que dans leurs difficultés.

5. Cette Exhortation acquiert un sens spécial dans le contexte de cette
Année Jubilaire de la Miséricorde. En premier lieu, parce que je la
considère comme une proposition aux familles chrétiennes, qui les stimule à
valoriser les dons du mariage et de la famille, et à garder un amour fort
et nourri de valeurs, telles que la générosité, l'engagement, la fidélité
ou la patience. En second lieu, parce qu'elle vise à encourager chacun à
être un signe de miséricorde et de proximité là où la vie familiale ne se
réalise pas parfaitement ou ne se déroule pas dans la paix et la joie.

6. Dans le développement du texte, je commencerai par une ouverture
inspirée par les Saintes Écritures, qui donne un ton approprié. De là, je
prendrai en considération la situation actuelle des familles en vue de
garder les pieds sur terre. Ensuite, je rappellerai certains éléments
fondamentaux de l'enseignement de l'Église sur le mariage et la famille,
pour élaborer ainsi les deux chapitres centraux, consacrés à l'amour. Pour
continuer, je mettrai en exergue certains parcours pastoraux qui nous
orientent pour la construction de foyers solides et féconds selon le plan
de Dieu, et je consacrerai un chapitre à l'éducation des enfants. Après, je
m'arrêterai sur une invitation à la miséricorde et au discernement pastoral
face à des situations qui ne répondent pas pleinement à ce que le Seigneur
nous propose, et enfin je tracerai de brèves lignes de spiritualité
familiale.

7. Vu la richesse apportée au parcours synodal par les deux années de
réflexion, cette Exhortation aborde, de différentes manières, des thèmes
nombreux et variés. Cela explique son inévitable longueur. C'est pourquoi,
je ne recommande pas une lecture générale hâtive. Elle sera plus bénéfique,
tant pour les familles que pour les agents de pastorale familiale, s'ils
l'approfondissent avec patience, morceau par morceau, ou s'ils cherchent en
elle ce dont ils peuvent avoir besoin dans chaque circonstance concrète. Il
est probable, par exemple, que les couples s'identifient plus avec les
chapitres quatre et cinq, que les agents pastoraux soient intéressés
surtout par le chapitre six, et que tous se sentent interpellés par le
chapitre huit. J'espère que chacun, à travers la lecture, se sentira appelé
à prendre soin avec amour de la vie des familles, car elles « ne sont pas
un problème, elles sont d'abord une opportunité ».[4]



PREMIER CHAPITRE

À LA LUMIÈRE DE LA PAROLE



8. La Bible abonde en familles, en générations, en histoires d'amour et en
crises familiales, depuis la première page où entre en scène la famille
d'Adam et d'Ève, avec leur cortège de violence mais aussi avec la force de
la vie qui continue (cf. Gn 4), jusqu'à la dernière page où apparaissent
les noces de l'Épouse et de l'Agneau (Ap 21, 2.9). Les deux maisons que
Jésus décrit, construites sur le roc ou sur le sable (cf. Mt 7, 24-27),
sont une expression symbolique de bien des situations familiales, créées
par la liberté de leurs membres, car, comme l'écrivait le poète : « toute
maison est un chandelier ».[5] Entrons à présent dans l'une de ces maisons,
guidés par le psalmiste, à travers un chant qu'on proclame aujourd'hui
encore aussi bien dans la liturgie nuptiale juive que dans la liturgie
chrétienne :

« Heureux tous ceux qui craignent le Seigneur
et marchent dans ses voies !
Du labeur de tes mains tu te nourriras,
heureux es-tu ! À toi le bonheur pour toi !
Ton épouse : une vigne fructueuse
au c?ur de ta maison.
Tes fils : des plants d'olivier
à l'entour de la table.
Voilà de quels biens sera béni
l'homme qui craint le Seigneur.
Que le Seigneur te bénisse de Sion !
Puisses-tu voir Jérusalem
dans le bonheur tous les jours de ta vie,
et voir les fils de tes fils !
Paix sur Israël ! » (Ps 128, 1-6).

Toi et ton épouse

9. Franchissons donc le seuil de cette maison sereine, avec sa famille
assise autour de la table de fête. Au centre, nous trouvons, en couple, le
père et la mère, avec toute leur histoire d'amour. En eux se réalise ce
dessein fondamental que le Christ même évoque avec force : « N'avez-vous
pas lu que le Créateur, dès l'origine, les fit homme et femme ? » (Mt 19,
4). Et il reprend le mandat de la Genèse : « C'est pourquoi l'homme
quittera son père et sa mère et s'attache à sa femme, et ils deviennent une
seule chair » (Gn 2, 24).

10. Les deux grandioses premiers chapitres de la Genèse nous offrent
l'image du couple humain dans sa réalité fondamentale. Dans ce texte
initial de la Bible, brillent certaines affirmations décisives. La
première, citée de façon synthétique par Jésus, déclare : « Dieu créa
l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, homme et femme il les
créa » (1, 27). De manière surprenante, l'''image de Dieu'' tient lieu de
parallèle explicatif précisément au couple ''homme et femme''. Cela
signifie-t-il que Dieu est lui-même sexué ou qu'il a une compagne divine,
comme le croyaient certaines religions antiques ? Évidemment non, car nous
savons avec quelle clarté la Bible a rejeté comme idolâtres ces croyances
répandues parmi les Cananéens de la Terre Sainte. La transcendance de Dieu
est préservée, mais, puisqu'il est en même temps le Créateur, la fécondité
du couple humain est l'''image'' vivante et efficace, un signe visible de
l'acteur créateur.

11. Le couple qui aime et procrée est la vraie ''sculpture'' vivante (non
pas celle de pierre ou d'or que le Décalogue interdit), capable de
manifester le Dieu créateur et sauveur. C'est pourquoi, l'amour fécond
arrive à être le symbole des réalités intimes de Dieu (cf. Gn 1, 28 ; 9, 7
; 17, 2-5.16 ; 28, 3 ; 35, 11 ; 48, 3-5). C'est ce qui justifie que le
récit de la Genèse, en suivant ce qui est appelé la '' tradition
sacerdotale'', soit traversé par diverses séquences généalogiques (cf. 4,
17-22 .25-26 ; 5 ; 10 ; 11, 10-32 ; 25, 1-4.12-17.19-26 ; 36) : car la
capacité du couple humain à procréer est le chemin par lequel passe
l'histoire du salut. Sous ce jour, la relation féconde du couple devient
une image pour découvrir et décrire le mystère d