Croquis - La Bibliothèque électronique du Québec

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Mgr Camille Roy Études et croquis
[pic] BeQ
Mgr Camille Roy (1870-1943) Études et croquis
« Pour faire mieux aimer la Patrie » La Bibliothèque électronique du Québec
Collection Littérature québécoise
Volume 136 : version 1.0
Ordonné prêtre, Camille Roy poursuit ses études à Paris, puis enseigne
la philosophie et la littérature au Séminaire de Québec, et à l'Université
Laval, dont il sera recteur pendant plusieurs années. Il a écrit de
nombreux livres, notamment de critique littéraire. En 1925, il est couronné
par l'Académie française pour l'ensemble de son ?uvre. On a dit souvent que
son approche était trop complaisante, mais il a le mérite d'avoir aimé
cette littérature et d'être à l'origine du discours critique au Québec.
Études et croquis Édition de référence : Éditions Émile Robitaille, Québec, 1936, deuxième édition.
Au lecteur
On trouvera ici des pages qui nous furent dictées, en différentes
circonstances, par notre désir de servir notre langue, nos lettres
canadiennes, nos traditions, notre apostolat national. Ce sont des articles, des études, des paroles où nous avons essayé de
traduire quelques-unes des meilleures ambitions de notre race. Ce sont
aussi des croquis, quelques dessins où sous les mots transparaissent de
chères images du pays. Tout cela s'adresse à la fois à l'esprit, au c?ur, à l'imagination du
lecteur : et tout cela tend à faire mieux aimer les choses de chez nous, et
à faire mieux servir la patrie. C'est pour cette simple raison que nous osons offrir au public un si
modeste ouvrage. C. R. Croquis
Les jardins en deuil
Impressions de novembre
Les jardins aussi ont leurs deuils et ils leur viennent, comme les
nôtres, de tout ce qui meurt en eux et ne revivra plus. Les jardins nus,
dépouillés, semblent regretter leur parure flétrie. Et c'est pourquoi
novembre les trouve si tristes, nos jardins, même quand aux heures de midi,
il répand sur eux sa lumière tiède.
* * *
Je regardais hier le jardin vaste, impersonnel, et pourtant familier,
dont l'image très douce s'imprime depuis plus de trente ans dans mes
regards et dans mes souvenirs. Vous le connaissez peut-être. Les hauts
bâtiments du Grand Séminaire et de l'Université Laval l'emmurent au nord et
à l'ouest, cependant que vers le soleil du matin, il ouvre, par dessus les
remparts de Québec, ses horizons larges et splendides. C'est le jardin à
demi fermé où n'entrent que la lumière, le vent d'est, la joie des fleurs
et celle des âmes. Des allées longues, dessinées à la française, s'y
croisent à travers les pelouses et les carrés en culture. Au milieu et au
fond, à partir du haut bout de la grande terrasse, une large serre allonge
obliquement son toit aigu et vitré, pendant que tout à côté le vieux
berceau s'enveloppe de vignes folles et sauvages. La petite maison grise du
jardinier, autrefois plus élégante, maintenant humiliée de sa propre
laideur, s'élève sans orgueil au pied de la terrasse aux lilas ; dans son
voisinage prochain, à droite, par delà deux couches chaudes et grasses, se
dresse en écran, appuyé sur un vigoureux tilleul, le haut pan du jeu de
balle. Ici ou là grandissent des peupliers sveltes, de larges marronniers,
des ormeaux vivaces, des bouleaux blancs aux feuilles odorantes ; pendant
l'été, ces jeunes arbres, espoir de nos neveux, humilient par leur facile
abondance le vieux noyer solitaire qui, dans l'ombre de l'Université, étend
encore vers eux ses rameaux noueux et fatigués. Aux heures des récréations, les allées larges s'emplissent de lévites
qui y promènent en soutanes noires leurs pensées graves. Quand la cloche a
rappelé ces hôtes à leurs cellules et à leur travail, le jardin redevient
silencieux et presque désert ; le jardinier l'anime encore de ses
mouvements, cependant que des prêtres, discrètement, circulent au pas lent
de leurs méditations, murmurant des psaumes, ou égrenant le long des plates-
bandes leur chapelet fervent. Il est vraiment beau, notre vieux jardin, quand le soleil y verse sa
chaleur, quand le printemps y fait fleurir ses promesses, quand l'été y
multiplie son abondance. Mais hier, en cette journée de novembre pourtant
très claire, il m'a paru bien sombre. Il n'offrait plus à mes yeux que des
images de la mort. Les pelouses y sont toutes encadrées de deuil ; autour d'elles se
dessinent en larges rubans noirs les plates-bandes dépouillées : là où ont
brillé les roses et les lys, les pensées violettes et les géraniums
écarlates, il n'y a plus que le sol nu. Les massifs de verdure et de
plantes qui renflent en coupoles au milieu des pelouses, sont eux-mêmes
découronnés de leurs parures, et les statues blanches se dressent seules
sur des tertres désolés. Les chèvrefeuilles et les genêts dispersés à
travers les gazons, ont perdu leur dernière grâce : des ficelles
s'enroulent autour de leurs branches et les ramassent en gerbes. Les carrés en culture, où végétaient les richesses potagères, ne sont
plus jonchés que de pourriture et d'ignobles débris. Ils étaient si beaux,
d'une beauté copieuse et pratique, quand hier le soleil d'octobre y faisait
mûrir les derniers fruits, ou qu'ils étalaient sur les sillons le panache
apulent de leurs plantureux légumes ! Il ne reste plus de cette végétation
nourricière qu'une image somptueuse fixée avec complaisance dans les
souvenirs de l'économe ou du jardinier.
* * *
Maintenant, sur les sillons bouleversés comme sur les pelouses encore
vertes ou dans les allées mornes, tombent une à une les feuilles qui
restent encore aux arbres épuisés. Depuis tant de semaines, elles ont
commencé à pleuvoir sur le sol : tantôt arrachées par des vents violents et
brusques, tantôt emportées par un souffle qui a rompu leurs dernières
attaches. Vertes ou jaunes, elles voltigent parfois encore sous la rafale
et se dispersent en tourbillons ailés ; elles se posent sur les gazons ou
s'attardent aux plates-bandes ; quelques jours encore elles rutilent,
brillent comme de larges fleurs rousses sous le soleil de novembre :
dernière et mélancolique parure que l'automne laisse à nos jardins en
deuil. Pendant les longs mois d'été, les papillons butinent au jardin. Ils sont
de toutes couleurs et rivalisent en beautés éclatantes avec tant de
corolles dont le parfum les nourrit. Au mois d'octobre l'on en voit encore,
des blancs surtout, qui voltigent, boivent aux calices, puis, ivres et
rapides, montent deux à deux dans la lumière chaude du midi. Ils sont
disparus maintenant, et l'on ne voit plus, dans l'air trop froid, leurs
vols minuscules et gracieux. Partis aussi les oiseaux, rossignols, merles, pinsons ou mésanges, que
ramènent les printemps et que chassent nos hivers. Par les fenêtres
ouvertes nous arrivaient leurs chansons, et il faisait si bon d'entendre, à
travers les criailleries des moineaux, des notes d'harmonie. Ils sont
partis. Ils ont quitté l'arbre où ils avaient fixé leurs amours, et ils
portent maintenant vers d'autres climats leurs refrains et leurs joies. Seuls restent au jardin les moineaux piailleurs et fidèles. Ils se
rassemblent souvent aux branches nues des arbres. Ramassés en boules grises
et frileuses, ils tiennent des propos monotones ; ils se querellent avec
âpreté et gazouillent avec aigreur. Ne nous en plaignons pas cependant. Ces
oiseaux rudes sont la dernière grâce de nos jardins dépouillés. Comme ils
seraient plus tristes, les jardins, s'ils n'étaient plus traversés par la
bande furieuse des moineaux, si jamais plus, dans les jours froids de
novembre, l'on n'entendait la voix familière de ces tenaces amis ! Oiseaux chanteurs et papillons, feuilles des peupliers et des bouleaux,
panaches rustiques des choux et des asperges, fleurs vives des plates-
bandes : toutes ces créatures harmonieuses ou fragiles, toutes ces parures
élégantes, toutes ces choses qui réjouissent les jardins ou les parfument,
s'en sont allées ou sont pour toujours flétries ; et c'est pourquoi
novembre les trouve si tristes, nos jardins, même quand aux heures de midi
il déploie sur eux sa lumière tiède.
* * *
Je pensais hier à toutes ces choses en regardant le jardin vaste,
impersonnel et pourtant familier du Séminaire. Et, malgré moi, ma pensée
dolente recherchait vers des années lointaines de semblables tristesses ;
elle s'en allait vers d'autres jardins animés, où gisent les débris de nos
souvenirs, et que mettaient aussi en deuil les bises de novembre. Oh ! les jardins modestes que l'on voit dans nos campagnes, qui
prolongent la maison paternelle, entourés de clôtures robustes, et protégés
parfois sur l'un des côtés par la longue corde de bois ! C'est là surtout
que poussent en bel orgueil et que se multiplient sur des carré