L'étonnante aventure de la mission Barsac - La Bibliothèque ...

Pas d'histoires ! c'est le but éternel de tous les employés de la terre. ...... dans l'
exercice de son emploi, quand le planton de service ? un rengagé de la ...... À
quelques pas, un « médecin » traitait un malade suivant les prescriptions du
Codex nègre. ...... Ainsi sont immédiatement ? automatiquement, ai-je dit ?
corrigées les ...

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Jules Verne

L'étonnante aventure de
la mission Barsac




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Jules Verne


L'étonnante aventure


de la mission Barsac


roman



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La Bibliothèque électronique du Québec
Collection À tous les vents
Volume 772 : version 1.0

Du même auteur, à la Bibliothèque :

|Famille-sans-nom |L'école des Robinsons |
|Le pays des fourrures |César Cascabel |
|Docteur Ox |Le pilote du Danube |
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|Maître du monde |Mathias Sandorf |
|Les tribulations d'un |Le sphinx des glaces |
|Chinois en Chine |Voyages et aventures du capitaine|
|Michel Strogoff |Hatteras |
|De la terre à la lune |Cinq semaines en ballon |
|Sans dessus dessous |Un billet de loterie |
|L'Archipel en feu |Le Chancellor |
|Le chemin de France |L'île mystérieuse |
|L'île à hélice |La maison à vapeur |
|Clovis Dardentor |Le village aérien |
|L'Étoile du Sud |L'invasion de la mer |
|L'épave du Cynthia |Les frères Kip |















L'étonnante aventure

de la mission Barsac

















Première partie








1





L'affaire de la Central Bank




Assurément, l'audacieux cambriolage qui a tant occupé la presse sous le
nom de l'affaire de la Central Bank et qui a eu, quinze jours durant,
l'honneur de ses manchettes, n'est pas effacé de toutes les mémoires,
malgré les années écoulées. Peu de crimes, en effet, ont excité la
curiosité publique autant que celui-ci, car il en est peu qui aient réuni
au même degré l'attrait du mystère et l'ampleur du forfait, et dont
l'accomplissement ait exigé une aussi incroyable audace, une aussi farouche
énergie.

On en lira donc peut-être avec intérêt le récit incomplet encore, mais
scrupuleusement véridique. Si ce récit n'éclaire pas absolument tous les
points restés dans l'ombre jusqu'ici, il apportera du moins quelques
précisions nouvelles, et redressera ou coordonnera les informations parfois
contradictoires données à l'époque par les journaux.

Le vol, on le sait, a eu pour théâtre l'Agence DK de la Central Bank,
située près de la Bourse de Londres, au coin de Threadneedle Street et de
Old Broad Street, et dirigée alors par Mr Lewis Robert Buxton, fils du lord
de ce nom.

Cette agence comporte essentiellement une vaste pièce, divisée en deux
fractions inégales par un long comptoir de chêne, qui se développe
parallèlement aux deux rues, lesquelles se coupent à angle droit. On y
accède, au croisement de ces deux rues, par une porte vitrée, en pan coupé,
précédée d'une sorte de tambour de plain-pied avec le trottoir. En entrant,
on aperçoit à gauche, derrière un grillage à fortes mailles, la caisse, qui
communique par une porte également grillagée avec le bureau proprement dit,
où se tiennent les employés. À droite le comptoir de chêne est interrompu à
son extrémité par un battant mobile, permettant au besoin d'aller de la
partie destinée au public dans celle qui est réservée aux employés, ou vice
versa. Au fond de cette dernière, s'ouvre d'abord, près du comptoir, le
cabinet du chef de l'agence, lequel cabinet commande un réduit sans autre
issue, puis, en suivant la muraille perpendiculaire à Threadneedle Street,
un couloir donnant accès au vestibule commun à tout l'immeuble auquel
appartient le local.

D'un côté, ce vestibule passe devant la loge du concierge et conduit à
Threadneedle Street. De l'autre, après avoir desservi le grand escalier, il
aboutit à une porte vitrée à deux battants, qui dissimule à la vue du
dehors l'entrée des caves et l'escalier de service, qui fait face à celle-
ci.

Tels sont les lieux où se sont déroulées les principales péripéties du
drame.

Au moment où il commence, c'est-à-dire à cinq heures moins vingt
exactement, les cinq employés de l'agence s'occupent de leurs travaux
habituels. Deux d'entre eux sont plongés dans leurs écritures. Les trois
autres répondent à autant de clients accoudés sur le comptoir. Quant au
caissier, il fait, sous la protection de son grillage, le compte des
espèces, qui, en ce jour de liquidation, atteignent le total imposant de
soixante-douze mille soixante-dix-neuf livres, deux shillings et quatre
pence, soit un million huit cent seize mille trois cent quatre-vingt-treize
francs quatre-vingts centimes.

Ainsi qu'il a été dit, l'horloge de l'agence marque cinq heures moins
vingt. Dans vingt minutes, par conséquent, on fermera ; la devanture en fer
sera baissée, puis, un peu plus tard, les employés se disperseront, leur
journée de travail finie. Le sourd grondement des voitures et le bruit de
la foule parviennent du dehors à travers les glaces de la vitrine,
obscurcies par le crépuscule de ce dernier jour de novembre.

C'est à ce moment que la porte s'ouvrit et qu'un homme entra. Le nouveau
venu, après avoir jeté un coup d'?il rapide dans le bureau, se retourna à
demi et fit au-dehors, à l'adresse, sans doute, d'un compagnon resté sur le
trottoir, un geste de la main droite, dont le pouce, l'indicateur et le
médius redressés mimaient d'une manière claire le nombre 3. Leur attention
eût-elle été éveillée, les employés n'auraient pu voir ce geste que leur
cachait la porte entrouverte, et l'eussent-ils vu, qu'ils n'auraient
évidemment songé à établir aucune corrélation entre le nombre des personnes
alors accoudées sur le comptoir et celui des doigts qui étaient ainsi
montrés comme un signal.

Son signal donné, si c'en était un, l'homme acheva d'ouvrir la porte, la
referma après s'être introduit dans le bureau, et alla prendre rang
derrière l'un des clients précédents, indiquant ainsi son intention
d'attendre, pour faire connaître ses désirs, que ce client eût terminé et
se fût retiré.

Un des deux employés libres se leva, et, se dirigeant vers lui,
demanda :

- Vous désirez, monsieur ?...

- Merci, monsieur, j'attendrai, répondit le nouveau venu, en
accompagnant sa réponse d'un mouvement de la main, destiné à faire entendre
qu'il voulait précisément avoir affaire à l'employé à proximité duquel il
s'était arrêté.

Celui qui avait obligeamment interpellé se rassit sans insister et
reprit son travail, la conscience apaisée par cette tentative de zèle, et
satisfait en somme qu'elle eût ce résultat négatif. L'homme attendit donc,
sans que personne fît plus attention à lui.

La singularité de son aspect eût justifié cependant plus sérieux examen.
C'était un gaillard de haute taille, qui à en juger par sa carrure, devait
être d'une force peu commune. Une magnifique barbe blonde encadrait son
visage au teint bronzé. Quant à son rang social, on ne pouvait le présumer
d'après sa mise ; un long cache-poussière en soie grège le recouvrant
jusqu'aux pieds.

Le client derrière lequel il était placé ayant terminé ce qu'il avait à
faire, l'homme au cache-poussière lui succéda et entretint, à son tour, le
représentant de la Central Bank des opérations qu'il désirait entreprendre.
Pendant ce temps, la personne qu'il avait remplacée ouvrait la porte
extérieure et sortait de l'agence.

Cette porte se rouvrit immédiatement et livra passage à un deuxième
personnage aussi singulier que le premier dont il semblait être, en quelque
sorte, la copie. Même stature, même carrure, même barbe blonde entourant un
visage sensiblement cuivré, même long cache-poussière de soie grège
dissimulant les vêtements de son propriétaire.

Pour ce dernier personnage, il en fut comme pour son sosie. Comme celui-
ci, il attendit patiemment derrière l'une des deux personnes encore
accoudées au comptoir, puis son tour venu, il engagea conversation avec
l'employé devenu libre, tandis que le client gagnait la rue.

De même que précédemment, la porte se rouvrit aussitôt. Un troisième
individu fit son entrée et alla prendra rang à la suite du seul des trois
clients primitifs qui restât. De taille médiocre, tout en largeur et trapu,
son visage coloré encore assombri par une barbe noire, ses vêtements
recouverts d'un long pardessus gris, celui-ci offrait à la fois des
différences et des analogies avec ceux qui, avant lui, s'étaient livrés à
semblable manège.

Enfin, lorsque la dernière des trois personnes qui se trouvaient
précédemment dans l'agence eût terminé ses affaires et céda la place, ce
fut à deux hommes que la porte aussitôt rouverte livra passage en même
temps. Ces deux hommes, dont l'un semblait doué d'une vigueur herculéenne,
étaient vêtus l'un et l'autre de ces longs paletots-sacs communément
désignés sous le nom d'ulsters, que la rigueur de la saison ne justifiait
pas encore, et, de même que pour les trois premiers, une barbe abondante
garnissait leurs visages assez montés de ton.

Ils s'introduisirent d'une manière bizarre : le plus grand entra
d'abord