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Des fleurs, p 39. §. 2. De la rose & des préparations que la Chimie en tire, p 40. §
. 3. Comment il faut frire la teinture des roses rouges, p 41. §. 4. La façon de tirer
..... l'esprit & de la teinture, réjouit l'estomac, le cerveau & la matrice, elle dissipe
les ventosités, aide à la digestion, corrige la mauvaise haleine, fortifie l'embryon,
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1
Assise près de la fenêtre entrouverte, Miss Mathilda Hockersnickler, de
Upper Little Puddlepatch, était plongée dans une lecture qui semblait
l'absorber. Visible au travers des rideaux de fine dentelle, un cortège
funéraire défila. Deux voisins se chamaillaient; mais l'aspidistra devant
la fenêtre fit que l'incident échappa 'à Miss Mathilda. Elle était
d'ailleurs occupée à lire.
Posant le livre sur ses genoux, rejetant sur son front les lunettes à
monture métallique, elle frotta ses yeux rougis. Puis ayant replacé les
lunettes sur son nez proéminent, elle reprit sa lecture.
Dans sa cage, un perroquet jaune et vert, aux yeux ronds comme des boutons
de bottine, lança un cri rauque:
- Polly veut sortir, Polly veut sortir! Miss Mathilda bondit.
- Oh, mon Dieu! s'exclama-t-elle, je suis désolée, mon pauvre chéri;
j'avais complètement oublié de t'installer sur ton perchoir.
Ouvrant la petite porte dorée, elle glissa la main à l'intérieur de la
cage et saisit le vieux perroquet déplumé.
- Polly veut sortir! lança à nouveau l'oiseau.
- Oh, toi! Stupide bestiole, répliqua Miss
Mathilda. Ne t'impatiente pas, je vais te mettre sur ton perchoir.
Et tout en lui parlant, elle le posa sur son per- choir familier; long d'environ un mètre cinquante, celui-ci portait un
petit plateau à son extrémité. Puis ayant fixé une petite chaîne autour de
la patte gauche du perroquet, elle s'assura que le bol à eau et le bol à
graines étaient bien remplis.
Le perroquet, après avoir ébouriffé ses plumes, se mit alors la tête sous
l'aile en accompagnant son geste de petits cris enjoués.
- Ah, Polly, dit Miss Mathilda, tu devrais lire avec moi. Ce livre traite
de ce qu'il nous arrive quand nous ne sommes plus sur terre. J'aimerais
savoir ce que croit vraiment l'auteur, ajouta-t-elle en se rasseyant et en
arrangeant ses jupes d'un geste pudique pour cacher ses genoux.
Elle reprit le livre, hésita, puis le replaça finalement sur ses genoux et
tendit le bras pour se saisir d'une longue aiguille à tricoter. Et alors -
avec une vigueur inhabituelle chez une personne de son âge - elle promena
l'aiguille tout le long de son dos.
- Ah! s'exclama-t-elle, comme c'est bon de se
gratter. Je suis sûre qu'il y a quelque chose dans mon cache-corset - peut-
être quelque cheveu. Oh! il faut que je me gratte encore un peu; c'est un
tel soulagemen t.
Et de nouveau elle promena l'aiguille avec vigueur, tandis que son visage
rayonnait de plaisir.
Sa démangeaison calmée, elle remit l'aiguille en place et reprit son
livre.
- La Mort, se dit-elle à elle-même, si seulement je savais ce à quoi cet
auteur croit, après la mort.
Elle s'arrêta de lire un instant, puis tendit la main vers quelques
bonbons qu'elle avait placés près du pot d'aspidistra. En soupirant, elle
se leva et alla offrir un bonbon au perroquet qui la fixait d'un regard
féroce. Il le happa d'un mouvement brus: que.
L'aiguille toujours à la main, un bonbon dans la bouche, Miss Mathilda
s'installa pour reprendre sa lecture.
A peine avait-elle lu quelques lignes qu'elle s'arrêta : « Pourquoi le Père dit-il toujours que si l'on n'est pas un bon
catholique - un bon pratiquant - on ne peut atteindre le Royaume des Cieux?
Je me demande si le Père se trompe et si les gens d'autres religions vont
eux aussi au Ciel.
Un silence intérieur l'envahit, silence qu'elle n'interrompit que par un
faible marmonnement, tandis qu'elle cherchait à se représenter certains
mots peu familiers. Voyage astral, champs célestes.
Miss Mathilda reprit sa lecture. La tête sous l'aile, le perroquet dormait
profondément, et seuls quelques petits tressaillements rappelaient qu'il
était bien vivant. L'horloge d'une église tinta au loin, et Miss Mathilda,
en sursautant, revint sur terre. « Oh Dieu, j'ai complètement oublié le
thé, et je dois aller à la réunion des dames de l'église. »
Elle se leva, tout en prenant le temps de placer un signet brodé dans le
livre qu'elle dissimula sous la table.
Elle se hâta d'aller préparer le thé et seul le perroquet aurait pu
l'entendre murmurer:
- Oh! comme j'aimerais savoir ce que cet auteur croit vraiment - comme je
voudrais pouvoir lui parler. Quel réconfort ce serait!
Sur une lointaine île ensoleillée, qui ne sera pas nommée - bien qu'en
vérité elle puisse l'être, vu que tout ceci est véridique -, un homme de
couleur s'étirait paresseusement sous l'ombre généreuse d'un vieil arbre.
D'un geste nonchalant, il déposa le livre qu'il lisait et tendit le bras
pour atteindre un fruit savoureux qui se balançait au-dessus de lui.
Toujours aussi nonchalamment il cueillit le fruit, l'inspecta pour voir
s'il n'y avait pas d'insectes, puis il le fourra dans sa bouche.
- Sapristi! marmonna-t-il, gêné par la grosseur du fruit. Je ne sais
vraiment pas où ce type-là veut en venir. Pour sûr, j'aimerais savoir à
quoi il croit vraiment.
Il s'étira, essayant de trouver une position plus confortable contre le tronc de l'arbre. Frappant une mouche qui volait, il
la manqua et laissa retomber sa main. Il reprit le livre d'un geste lent.
« La- vie après la mort... le voyage astral... » L'homme feuilleta
rapidement le livre, désirant connaître la fin et se refusant à le
parcourir en entier. Butinant, lisant une page par-ci, une phrase par-là,
il ne cessait de se répéter: « J'aimerais savoir à quoi il croit. »
Mais le soleil était chaud, et le bourdonnement des insectes,
assourdissant. Le sommeil, graduellement, gagna l'homme. Ses mains
laissèrent échapper le livre qui glissa doucement sur le sable. Il se mit
bientôt à ronfler, indifférent à tout ce qui se passait autour de lui.
Un jeune homme qui passait jeta un coup d'?il au Noir endormi, puis
regarda le livre, et à nouveau le dormeur. S'avançant, il parvint à saisir
subrepticement le livre et il s'éloigna d'un air exagérément innocent.
Il entra dans un petit bosquet, puis reparut dans la lumière et traversa
une étendue de sable, à la blancheur aveuglante. Le fracas des vagues
résonnait dans ses oreilles; mais il allait, indifférent à leur bruit, car
c'était là sa vie : le son des vagues contre les rochers du lagon était une
musique quotidienne. Le bourdonnement des insectes comme le crissement des
cigales étaient sa vie - et il n'y prêtait plus attention.
Il marchait tout en soulevant le sable fin avec ses pieds, car il ne
désespérait pas d'y trouver quelque objet de valeur ou quelque pièce de
monnaie; un de ses amis n'avait-il pas ainsi, un jour, déterré une pièce
d'or?
Un étroit filet d'eau le séparait d'une petite langue de terre où se
dressaient trois arbres solitaires. Il la traversa et gagna la bande de
terre. Il s'étendit confortablement après avoir un peu creusé le sable.
Puis, la tête appuyée contre l'arbre, il regarda le livre qu'il avait
subtilisé au dormeur. Après s'être assuré que personne ne l'observait, et certain d'être en
sécurité, il s'installa à nouveau, promenant une main à travers ses cheveux
crépus, de l'autre tenant le livre; il en regarda d'abord le dos afin de
lire la présentation de l'éditeur, puis il le retourna et étudia l'image de
la couverture avec ses yeux bridés; son front et ses lèvres étaient
sillonnés de rides minuscules tandis qu'il marmonnait tout en lisant des
choses qu'il ne comprenait pas.
- Sapristi! Est-ce que ce n'est pas superbe? Peutêtre pourrais-je moi
aussi exprimer ma pensée et alors Abigail serait obligée de faire ce que je
voudrai. Sûr que je suis d'accord avec ça. (Il roula sur le côté, se gratta
le nez pendant un moment puis ajouta :) Je me demande si je peux croire
tout ce qu'il écrit. Le renfoncement obscur de la piece rayonnait d'une atmosphère de sainteté.
Une paix absolue y régnait, rompue seulement par le pétillement des bûches
qui brûlaient dans l'âtre de la vaste cheminée de pierre. De temps à autre,
un jet de vapeur s'échappait, rencontrant les flammes avec un sifflement
furieux - vapeur provenant de la moisissure emprisonnée dans les bûches
encore humides. A d'autres moments c'était comme une petite explosion qui
projetait une pluie d'étincelles. La lumière vacillante venait ajouter à
l'ambiance étrange et au mystère qui baignaient la pièce.
Tournant le dos à la porte, un fauteuil très profond se trouvait près de
la cheminée. Tout proche était placé un vieux lampadaire démodé, fait de
baguettes de cuivre; et dans un recoin, une ampoule électrique jetait une
lumière douce, de teinte verte. La lumière baissa, puis disparut, cachée
par le dos du fauteuil.
On entendit alors une toux sèche et le bruit de pages qu'on tourne. De
nouveau ce fut le silence, ponctué par le pétillement du bois et le bruit
régulier des pages qu'on tourne. Une cloche tinta au loin. C'était un tintement lent qui fut bientôt suivi
d'un bruit de pas chaussés de sandales et d'un doux murmure de voix. Une
porte s'ouvrit, puis se referma avec un bruit sourd. Presque aussitôt
s'éleva la musique d'un orgue tandis que des voix d'hommes entonnaient un
chant. Quand il cessa, on entendit à nouveau le bruissement du papier, puis
le silence retomba, interrompu par des voix marmonnant quelque chose
d'incompréhensible, indéfiniment répété.
Le livre tomba sur le sol avec un bruit sec, et une silhouette se leva
d'un bond.
- Oh Dieu, j'ai dû m'endormir. N'est-ce pas là quelque chose d'étonnant?
La silhouette en robe sombre se baissa pour ramasser le livre, et le
rouvrit à la bonne page. Ayant marqué celle-ci à l'aide d'un signet,
l'homme referma le livre avec respect et le plaça sur la table, près de
lui. Demeuré pendant un moment les mains jointes et le front plissé, il se
leva alors et s'agenouilla en regardant u