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LEON DENIS
________ LE PROBLEME DE L'ETRE ET DE
LA DESTINEE
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Crescit eundo.
ETUDES EXPERIMENTALES SUR LES ASPECTS IGNORES DE L'ETRE HUMAIN LES DOUBLES PERSONNALITES - LA CONSCIENCE PROFONDE LA RENOVATION DE LA MEMOIRE LES VIES ANTERIEURES ET SUCCESSIVES, ETC. (Les témoignages ; les faits ; les lois.)
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NOUVELLE EDITION CONFORME A L'EDITION DE 1922
UNION SPIRITE FRANÇAISE ET FRANCOPHONE
INTRODUCTION ________ Une constatation douloureuse frappe le penseur au soir de la vie. Elle
devient encore plus poignante à la suite des impressions ressenties à son
retour dans l'espace. Il s'aperçoit alors que l'enseignement dispensé par
les institutions humaines en général - religions, écoles, universités -
s'il nous apprend beaucoup de choses superflues, en revanche ne nous
apprend presque rien de ce que nous avons le plus besoin de connaître pour
la conduite, la direction de l'existence terrestre et la préparation à l'Au-
delà.
Ceux à qui incombe la haute mission d'éclairer et de guider l'âme humaine
semblent ignorer sa nature et ses véritables destins.
Dans les milieux universitaires, une complète incertitude règne encore sur
la solution du plus important problème que l'homme se soit jamais posé au
cours de son passage sur la terre. Cette incertitude rejaillit sur tout
l'enseignement. La plupart des professeurs et instituteurs écartent
systématiquement de leurs leçons tout ce qui touche au problème de la vie,
aux questions de but et de finalité.
Nous retrouvons la même impuissance chez le prêtre. Par ses affirmations
dénuées de preuves, il ne réussit guère à communiquer aux âmes dont il a la
charge une croyance qui ne répond plus ni aux règles d'une saine critique
ni aux exigences de la raison.
En réalité, dans l'Université comme dans l'Eglise, l'âme moderne ne
rencontre qu'obscurité et contradiction en tout ce qui touche au problème
de sa nature et de son avenir. C'est à cet état de choses qu'il faut
attribuer en grande partie les maux de notre temps : l'incohérence des
idées, le désordre des consciences, l'anarchie morale et sociale.
L'éducation que l'on dispense aux générations est compliquée ; mais elle
n'éclaire pas, pour elles, le chemin de la vie ; elle ne les trempe pas
pour les luttes de l'existence. L'enseignement classique peut apprendre à
cultiver, à orner l'intelligence ; il n'apprend pas à agir, à aimer, à se
dévouer. Il apprend encore moins à se faire une conception de la destinée
qui développe les énergies profondes du moi et oriente nos élans, nos
efforts vers un but élevé. Pourtant, cette conception est indispensable à
tout être, à toute société, car elle est le soutien, la consolation suprême
aux heures difficiles, la source des mâles vertus et des hautes
inspirations.
Carl du Prel rapporte le fait suivant[1] :
«Un de mes amis, professeur à l'Université, eut la douleur de perdre sa
fille, ce qui raviva en lui le problème de l'immortalité. Il s'adressa à
ses collègues, professeurs de philosophie, espérant trouver des
consolations dans leurs réponses. Ce fut une amère déception : il avait
demandé du pain, on lui offrit une pierre ; il cherchait une affirmation,
on lui répondit par un "peut-être" !»
Francisque Sarcey, ce modèle accompli du professeur d'Université,
écrivait[2] : «Je suis sur cette terre. J'ignore absolument comment j'y
suis venu et pourquoi on m'y a jeté. Je n'ignore pas moins comment j'en
sortirai et ce qu'il adviendra de moi quand j'en serai sorti.»
On ne peut l'avouer plus franchement : la philosophie de l'école, après
tant de siècles d'études et de labeur, n'est encore qu'une doctrine sans
lumière, sans chaleur, sans vie[3]. L'âme de nos enfants, ballottée entre
des systèmes divers et contradictoires : le positivisme d'Auguste Comte, le
naturalisme d'Hegel, le matérialisme de Stuart Mill, l'éclectisme de
Cousin, etc., flotte incertaine, sans idéal, sans but précis.
De là le découragement précoce et le pessimisme dissolvant, maladies des
sociétés décadentes, menaces terribles pour l'avenir, auxquelles s'ajoute
le scepticisme amer et railleur de tant de jeunes hommes qui ne croient
plus qu'à la fortune et n'honorent que le succès.
L'éminent professeur Raoul Pictet signale cet état d'esprit dans
l'Introduction de son dernier ouvrage sur les sciences physiques[4]. Il
parle de l'effet désastreux produit par les théories matérialistes sur la
mentalité de ses élèves, et conclut ainsi :
«Ces pauvres jeunes gens admettent que tout ce qui se passe dans le monde
est l'effet nécessaire et fatal de conditions premières, où leur volonté
n'intervient pas ; ils considèrent que leur propre existence est forcément
le jouet de la fatalité inéluctable, à laquelle ils sont attachés, pieds et
poings liés.
Ces jeunes gens cessent la lutte à la rencontre des premières difficultés.
Ils ne croient plus à eux mêmes. Ils deviennent des tombes vivantes, où ils
enferment pêle-mêle leurs espérances, leurs efforts, leurs désirs, fosse
commune de tout ce qui a fait battre leur coeur jusqu'au jour de
l'empoisonnement.»
Tout ceci n'est pas seulement applicable à une partie de notre jeunesse,
mais aussi à beaucoup d'hommes de notre temps et de notre génération, chez
qui on peut constater une sorte de lassitude morale et d'affaissement.
F. Myers le reconnaît à son tour : «Il y a, dit-il[5], comme une
inquiétude, un mécontentement, un manque de confiance dans la vraie valeur
de la vie. Le pessimisme est la maladie morale de notre temps.»
Les théories d'outre-Rhin, les doctrines de Nietzsche, de Schopenhauer,
d'Haeckel, etc., n'ont pas peu contribué, elles aussi, à développer cet
état de choses. Leur influence s'est partout répandue. On doit leur
attribuer, en grande partie, ce lent travail, oeuvre obscure de scepticisme
et de découragement, qui se poursuit dans l'âme contemporaine.
Il est temps de réagir avec vigueur contre ces doctrines funestes et de
rechercher, en dehors de l'ornière officielle et des vieilles croyances, de
nouvelles méthodes d'enseignement, qui répondent aux impérieux besoins de
l'heure présente. Il faut préparer les esprits aux nécessités, aux combats
de la vie actuelle et des vies ultérieures ; il faut surtout apprendre à
l'être humain à se connaître, à développer, en vue de ses fins, les forces
latentes qui dorment en lui.
Jusqu'ici, la pensée s'est confinée en des cercles étroits : religions,
écoles ou systèmes qui s'excluent et se combattent réciproquement. De là
cette division profonde des esprits, ces courants violents et contraires
qui troublent et bouleversent le milieu social.
Apprenons à sortir de ces cercles rigides et à donner un libre essor à la
pensée. Chaque système contient une part de vérité ; aucun ne contient la
réalité tout entière. L'univers et la vie ont des aspects trop variés, trop
nombreux pour qu'aucun système puisse les embrasser tous. De ces
conceptions disparates, il faut dégager les fragments de vérité qu'elles
contiennent, les rapprocher, les mettre d'accord ; puis, les unissant aux
nouveaux et multiples aspects de la vérité que nous découvrons chaque jour,
s'acheminer vers l'unité majestueuse et l'harmonie de la pensée.
La crise morale et la décadence de notre époque proviennent, pour une
grande part, de ce que l'esprit humain s'est immobilisé trop longtemps. Il
faut l'arracher à l'inertie, aux routines séculaires, le porter vers les
hautes altitudes, sans perdre de vue les bases solides que vient lui offrir
une science agrandie et renouvelée. Cette science de demain, nous
travaillons à la constituer. Elle nous procurera le critérium
indispensable, les moyens de vérification et de contrôle, sans lesquels la
pensée, livrée à elle même, risquera toujours de s'égarer. *
* * Le trouble et l'incertitude que nous constatons dans l'enseignement se
répercutent et se retrouvent, disions-nous, dans l'ordre social tout
entier.
Partout, au-dedans comme au-dehors, c'est un état de crise inquiétant. Sous
la surface brillante d'une civilisation raffinée, se cache un malaise
profond. L'irritation s'accroît dans les rangs sociaux. Le conflit des
intérêts, la lutte pour la vie deviennent de jour en jour plus âpres. Le
sentiment du devoir s'est affaibli dans la conscience populaire, au point
que beaucoup d'hommes ne savent plus même où est le devoir. La loi du
nombre, c'est-à-dire de la force aveugle, domine plus que jamais. De
perfides rhéteurs s'appliquent à déchaîner les passions, les mauvais
instincts de la foule, à répandre des théories malsaines, parfois
criminelles. Puis, quand le flot monte et que le vent souffle en tempête,
ils se dérobent ou éludent toute responsabilité.
Où est donc l'explication de cette énigme, de cette contradiction frappante
entre les aspirations généreuses de notre temps et la réalité brutale des
faits ? Pourquoi un régime qui avait suscité tant d'espérances menace-t-il
d'aboutir à l'anarchie, à la rupture de tout équilibre social ?
L'inexorable logique va nous répondre : La démocratie, radicale ou
socialiste, dans ses masses profondes et dans son esprit dirigeant,
s'inspirant, elle aussi, des doctrines négatives, ne pouvait aboutir qu'à
un résultat négatif pour le bonheur et l'élévation de l'humanité. Tant vaut
l'idéal, tant vaut l'homme ; tant vaut la nation, tant vaut le pays !
Les doctrines négatives, dans leurs conséquences extrêmes, aboutissent
fatalement à l'anarchie, c'est-à-dire au vide, au néant social. L'histoire
humaine en a déjà fait plusieurs fois la pénible expérience.
Tant qu'il s'est agi de détruire les restes du passé, de donner le dernier