Maupassant - La paru.. - Free

Lotions d'eau froide, nourriture modérée, beaucoup d'exercice. ...... et une table
immense, chargée de livres, de papiers et de journaux, occupait le milieu de ......
Quelle opinion avez-vous des messieurs à casquette de soie qui font sur les ......
Il imita la voix enrouée des crieurs des rues et beugla: "Le secret pour faire des ...

Part of the document


[La] parure et autres contes parisiens [Document électronique] / Guy de
Maupassant ; texte établi par Marie-Claire Bancquart,... "Coco, coco, coco frais!" J'avais entendu raconter la mort de mon oncle Ollivier. Je savais qu'au moment où il allait expirer doucement, tranquillement, dans
l'ombre de sa grande chambre dont on avait fermé les volets à cause d'un
terrible soleil de juillet, au milieu du silence étouffant de cette
brûlante après-midi d'été, on entendit dans la rue une petite sonnette
argentine. Puis, une voix claire traversa l'alourdissante chaleur: "Coco
frais, rafraîchissez-vous Mesdames, coco, coco, qui veut du coco?" Mon
oncle fit un mouvement, quelque chose comme l'effleurement d'un sourire
remua sa lèvre, une gaieté dernière brilla dans son oeil qui, bientôt
après, s'éteignit pour toujours. J'assistais à l'ouverture du testament. Mon cousin Jacques héritait
naturellement des biens de son père; au mien, comme souvenir, étaient
légués quelques meubles. La dernière clause me concernait. La voici: "A mon
neveu Pierre, je laisse un manuscrit de quelques feuillets qu'on trouvera
dans le tiroir gauche de mon secrétaire; plus 500 francs pour acheter un
fusil de chasse, et 100 francs qu'il voudra bien remettre de ma part au
premier marchand de coco qu'il rencontrera!..." Ce fut une stupéfaction générale. Le manuscrit qui me fut remis m'expliqua
ce legs surprenant. Je le copie textuellement: "L'homme a toujours vécu sous le joug des
superstitions. On croyait autrefois qu'une étoile s'allumait en même temps
que naissait un enfant; qu'elle suivait les vicissitudes de sa vie,
marquant les bonheurs par son éclat, les misères par son obscurcissement.
On croit à l'influence des comètes, des années bissextiles, des vendredis,
du nombre treize. On s'imagine que certaines gens jettent des sorts, le
mauvais oeil. On dit: "Sa rencontre m'a toujours porté malheur." Tout cela
est vrai. J'y crois. - Je m'explique: Je ne crois pas à l'influence occulte
des choses ou des êtres; mais je crois au hasard bien ordonné. Il est
certain que le hasard a fait s'accomplir des événements importants pendant
que des comètes visitaient notre ciel; qu'il en a placé dans les années
bissextiles; que certains malheurs remarqués sont tombés le vendredi, ou
bien ont coïncidé avec le nombre treize; que la vue de certaines personnes
a concordé avec le retour de certains faits, etc. De là naissent les
superstitions. Elles se forment d'une observation incomplète,
superficielle, qui voit la cause dans la coïncidence et ne cherche pas au
delà. "Or, mon étoile à moi, ma comète, mon vendredi, mon nombre treize, mon
jeteur de sorts, c'est bien certainement un marchand de coco. "Le jour de ma naissance, m'a-t-on dit, il y en eut un qui cria toute la
journée sous nos fenêtres. "A huit ans, comme j'allais me promener avec ma bonne aux Champs-Elysées,
et que nous traversions la grande avenue, un de ces industriels agita
soudain sa sonnette derrière mon dos. Ma bonne regardait au loin un
régiment qui passait; je me retournai pour voir le marchand de coco. Une
voiture à deux chevaux, luisante et rapide comme un éclair, arrivait sur
nous. Le cocher cria. Ma bonne n'entendit pas; moi non plus. Je me sentis
renversé, roulé, meurtri... et je me trouvai, je ne sais comment, dans les
bras du marchand de coco qui, pour me réconforter, me mit la bouche sous un
de ses robinets, l'ouvrit et m'aspergea... ce qui me remit tout à fait. "Ma bonne eut le nez cassé. Et si elle continua à regarder les régiments,
les régiments ne la regardèrent plus. "A seize ans, je venais d'acheter mon premier fusil, et, la veille de
l'ouverture de la chasse, je me dirigeais vers le bureau de la diligence,
en donnant le bras à ma vieille mère qui allait fort lentement à cause de
ses rhumatismes. Tout à coup, derrière nous, j'entendis crier: "Coco, coco,
coco frais!" La voix se rapprocha, nous suivit, nous poursuivit. Il me
semblait qu'elle s'adressait à moi, que c'était une personnalité, une
insulte. Je crois qu'on me regardait en riant: et l'homme criait toujours:
"Coco frais!" comme s'il se fût moqué de mon fusil brillant, de ma
carnassière neuve, de mon costume de chasse tout frais en velours marron. "Dans la voiture je l'entendais encore. "Le lendemain, je n'abattis aucun gibier, mais je tuai un chien courant que
je pris pour un lièvre; une jeune poule que je pris pour une perdrix. Un
petit oiseau se posa sur une haie; je tirai, il s'envola; mais un
beuglement terrible me cloua sur place. Il dura jusqu'à la nuit... Hélas!
mon père dut payer la vache d'un pauvre fermier. "A vingt-cinq ans, je vis, un matin, un vieux marchand de coco, très ridé,
très courbé, qui marchait à peine, appuyé sur son bâton et comme écrasé par
sa fontaine. Il me parut être une sorte de divinité, comme le patriarche,
l'ancêtre, le grand chef de tous les marchands de coco du monde. Je bus un
verre de coco et je le payai vingt sous. Une voix profonde qui semblait
plutôt sortir de la boîte en fer-blanc que de l'homme qui la portait gémit:
"Cela vous portera bonheur, mon cher monsieur." "Ce jour-là je fis la connaissance de ma femme qui me rendit toujours
heureux. "Enfin, voici comment un marchand de coco m'empêcha d'être préfet. "Une révolution venait d'avoir lieu. Je fus pris du besoin de devenir un
homme public. J'étais riche, estimé, je connaissais un ministre; je
demandai une audience en indiquant le but de ma visite. Elle me fut
accordée de la façon la plus aimable. "Au jour dit (c'était en été, il faisait une chaleur terrible), je mis un
pantalon clair, des gants clairs, des bottines de drap clair aux bouts de
cuir verni. Les rues étaient brûlantes. On enfonçait dans les trottoirs qui
fondaient; et de gros tonneaux d'arrosage faisaient un cloaque des
chaussées. De place en place des balayeurs faisaient un tas de cette boue
chaude et pour ainsi dire factice, et la poussaient dans les égouts. Je ne
pensais qu'à mon audience et j'allais vite quand je rencontrai un de ces
flots vaseux; je pris mon élan, une... deux... Un cri aigu, terrible, me
perça les oreilles: "Coco, coco, coco, qui veut du coco?" Je fis un
mouvement involontaire des gens surpris; je glissai... Ce fut une chose
lamentable, atroce... J'étais assis dans cette fange... mon pantalon était
devenu foncé, ma chemise blanche tachetée de boue; mon chapeau nageait à
côté de moi. La voix furieuse, enrouée à force de crier, hurlait toujours:
"Coco, coco!" Et devant moi, vingt personnes que secouait un rire
formidable, faisaient d'horribles grimaces en me regardant. "Je rentrai chez moi en courant. Je me changeai. L'heure de l'audience
était passée." Le manuscrit se terminait ainsi: "Fais-toi l'ami d'un marchand de coco, mon petit Pierre. Quant à moi, je
m'en irai content de ce monde, si j'en entends crier un, au moment de
mourir." Le lendemain, je rencontrai aux Champs-Elysées un vieux, très vieux porteur
de fontaine qui paraissait fort misérable. Je lui donnai le billet de cent
francs de mon oncle. Il tressaillit stupéfait, puis me dit: "Grand merci,
mon petit homme, cela vous portera bonheur." "Les dimanches d'un bourgeois de Paris" I Préparatifs de voyage Monsieur Patissot, né à Paris, après avoir fait, comme beaucoup d'autres,
de mauvaises études au collège Henri IV, était entré dans un ministère par
la protection d'une de ses tantes, qui tenait un débit de tabac où
s'approvisionnait un chef de division. Il avança très lentement et serait peut-être mort commis de quatrième
classe, sans le paterne hasard qui dirige parfois nos destinées. Il a aujourd'hui cinquante et deux ans, et c'est à cet âge seulement qu'il
commence à parcourir, en touriste, toute cette partie de la France qui
s'étend entre les fortifications et la province. L'histoire de son avancement peut être utile à beaucoup d'employés, comme
le récit de ses promenades servira sans doute à beaucoup de Parisiens qui
les prendront pour itinéraires de leurs propres excursions, et sauront, par
son exemple, éviter certaines mésaventures qui lui sont advenues. M. Patissot, en 1854, ne touchait encore que 1 800 francs. Par un effet
singulier de sa nature, il déplaisait à tous ses chefs, qui le laissaient
languir dans l'attente éternelle et désespérée de l'augmentation, cet idéal
de l'employé. Il travaillait pourtant; mais il ne savait pas le faire valoir: et puis il
était trop fier, disait-il. Et puis sa fierté consistait à ne jamais saluer
ses supérieurs d'une façon vile et obséquieuse, comme le faisaient, à son
avis, certains de ses collègues qu'il ne voulait pas nommer. Il ajoutait
encore que sa franchise gênait bien des gens, car il s'élevait, comme tous
les autres d'ailleurs, contre les passe-droits, les injustices, les tours
de faveur donnés à des inconnus, étrangers à la bureaucratie. Mais sa voix
indignée ne passait jamais la porte de la case où il besognait, selon son
mot: "Je besogne... dans les deux sens, Monsieur." Comme employé d'abord, comme Français ensuite, comme homme d'ordre enfin,
il se ralliait, par principe, à tout gouvernement établi, étant fanatique
du pouvoir... autre que celui des chefs. Chaque fois qu'il en trouvait l'occasion, il se postait sur le passage de
l'Empereur afin d'avoir l'honneur de se découvrir: et il s'en allait tout
orgueilleux d'avoir salué le chef de l'Etat. A force de contempler le souverain, il fit comme beaucoup: il l'imita dans
la coupe de sa barbe, l'arrangement de ses cheveux, la forme de sa
redingote, sa démarche, son geste - combien d'hommes, dans chaque pays,
semblent des portraits du Prince! - Il avait peut-être une vague
ressemblance avec Napoléon III, mais ses cheveux étaient noirs - il les
teignit. Alors la similitude fut absolue; et, quand il rencontrait dans la
rue un autre monsieur représentant aussi la figure impériale, il en était
jaloux et le regardait dédaigneusement. Ce besoin d'imitation devint
bientôt son idée fixe, et, ayant entendu un huissier des Tuileries
contrefaire la voix de l'Empere