Etudier l'inceste - po...aimes-tu, toi

Chapitre V : Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance. (Étude parue ...
Chapitre VII : Le cerveau et la pensée : une illusion ..... Elle tâcherait de n'avoir
qu'à faire jouer un déclic ou à fournir une étincelle, à utiliser instantanément une
énergie que la matière aurait accumulée pendant tout le temps qu'il aurait fallu.

Part of the document


[pic]
Remerciements
Tout d'abord merci à Paulette, Agnès, Aurélie, Danielle et Lydia, sans
lesquelles ce mémoire n'existerait pas, ou serait bien différent. Merci de
votre confiance, de votre accueil, du temps très conséquent que vous avez
consacré à ces récits ... c'est beaucoup et c'est important. Puis à François Laplantine et Axel Guioux, pour avoir dirigé ce mémoire ...
pour votre patience, votre présence tout au long de ce travail un peu
mouvementé. Merci aussi à Marie-Carmen Garcia, enseignante en sociologie, pour la
possibilité de présentation en exposé durant son cours, courant avril, des
premiers aboutissements de ce travail, et pour ses cours de sociologie, en
1995-1996, à l'université Lyon 1, alors que j'étais en D.E.U.G M.A.S.S,
ainsi qu'à Lyon 2 en 2006 et 2008.
Merci pour les échanges d'alors et ceux de maintenant, merci pour votre
soutien tout au long de mes études en sciences humaines. Merci à Martin Soares, enseignant en anthropologie, pour les échanges de
courriels, les moments de discussion ... qui souvent ont eu peu à voir
avec cette recherche, mais ont puissamment contribué à sa réalisation. Merci à l'ensemble des enseignant/e/s de sociologie anthropologie pour
leurs cours. Merci à Jacques Pellegri, ex-directeur adjoint de l'agence ANPE Lyon Opéra.
Pour dire ce que je te dois ce mot sera trop court. Merci pour ta présence
dans ce bureau en compagnie de notre DRH, à la réputation méritée, présence
qui a rendue possible mon embauche alors que j'étais en position difficile,
en 2002. Merci pour ton attention durant tout le temps que je suis restée
employée à l'Agence. Merci pour m'avoir répondu en 2004, quand j'étais au
bord du vide. Enfin, merci pour ta présence et ton soutien lorsque ce
mémoire n'était encore qu'un projet même pas écrit. Merci à Yves Laurent, également connu à l'ANPE (via le même syndicat que
Jacques). Merci pour ta présence trop brève, ornée d'inoubliables chapeaux,
et surtout d'humour et de chaleur humaine. En janvier 2005, Yves, tu as
décidé de quitter ce monde. Merci à Léo Thiers Vidal pour ses passages furtifs dans ma vie, pour les
écrits qu'il laisse. En novembre 2007, je m'apprêtais à reprendre contact
pour discuter ensemble de mon thème de recherche, proche de tes
préoccupations. Mais c'est à ce moment-là que toi aussi, tu as décidé de
quitter ce monde, devenu trop difficile pour des raisons que tu as
emportées avec toi, et qui t'appartiennent à toi seul. Merci à Michel Roche, psychothérapeute, pour n'avoir été ni sourd ni
aveugle en 1996. Merci à Bernard, rencontré via le groupe Déjacque, pour sa présence de 1991
à 1996, et pour avoir été, presque, un parent adoptif pour moi. Merci à Jacqueline Allombert, pour ses cours de philosophie, et à Mr Maury,
pour ses cours d'Histoire, au lycée. Merci à Plume, chat de gouttière, qui n'est resté qu'un an, en 1986, et à
Osiris, également chat de gouttière, là depuis 18 ans. Merci à Mr Grimm et tou/te/s les autres, pour les contes lus la nuit durant
les années 80, à Jules Vernes et aux rédacteurs/trices des livres de la
bibliothèque verte, pour les aventures dans leurs mondes imaginaires, quand
le monde réel était insupportable. Merci à Mme Krispi, institutrice de C.P, qui m'a appris à lire et à ...
écrire. Merci à Fabien et Violaine pour leur amitié au début des années 1980, dans
la classe de Mme Krispi et un peu avant. Ce mémoire est un peu dédié à mon oncle, Jean-Luc Poyet, pour les rues de
la ville dans lesquelles nous avons chacun erré nos souffrances durant les
années 1990 sans jamais nous y rencontrer hélas. Enfin, merci aux étoiles pour leur(s) lumière(s), aux arbres pour l'air qui
nous permet de vivre et pour leur beauté.
Paroles Courant 2005, un soir, dans un squat que j'ai participé à ouvrir, nous
discutons toutes deux autour de la table.
Quelques mois auparavant, dans un autre squat, nous avions discuté autour
d'une autre table : une plus grande table, d'une dizaine de personnes.
Discuté du rendez-vous chez une avocate, d'où je revenais, amère. C'est
ainsi qu'elles ont su ce qui m'était arrivé.
C'est ainsi que, peu à peu, les mois suivant, plusieurs d'entre elles m'ont
fait savoir ce qui leur était arrivé ...
Et ce soir, autour de cette table plus petite dans ce squat plus petit,
cette fille me dit « Sophie, ma mère m'a confié un secret ». Quel secret ? Sa mère a été abusée par un cousin, elle vient de le lui dévoiler. C'est la
première fois que cette mère en parle, et c'est à sa fille qu'elle choisit
de le faire.
Silence. Durant lequel je me souviens de ma famille, de ce que j'en ai
appris au fil des années. D'où ma question, d'instinct : « Et ... il n'y a
pas d'autres secrets, dans ta famille ? ».
Dans la mienne, à ma grande surprise, il y en a eu tant, aussi atroces,
insoupçonnés tant qu'aucune parole ne venait les éclairer.
Elle me répond : « si, il y en a un autre, il me concerne moi, mais c'est
un secret pas grave, pas comme celui-là ». Je poursuis : « c'est à
dire ? ».
Le secret pas grave, pas comme celui-là, c'est sa relation sexuelle avec
son cousin, à elle. « J'y prenais du plaisir ». « J'étais consentante ».
Enfant, ado. Sensation de malaise, j'entre dans le brouillard par ses
propos. Me souviens de ses attaques de panique, de ses malaises, qui me
rappellent là, à tort ou à raison, les miens.
Consentante. Plaisir. Son cousin a commencé au même âge que celui de sa
mère. Etrange cette sensation de malaise que je ressens. Consentante.
Plaisir. Pas grave. Secret. Les mots. Ces mots.
Etrange cette sensation de malaise, de doute, que je ressens. Déjà
ressentie auparavant. Où ? Quand ?
Quand ma famille me reproche d'exagérer, de mettre le bronx pour rien. Pour
rien ? Consentante. Plaisir. Pas grave. Secret. Les mots. Ces mots.
Consentante. Plaisir. Pas grave. Secret. Les mots. Ces mots ...
Moi aussi, j'étais consentante, moi aussi, j'ai pris du « plaisir », selon
mon incesteur ... et longtemps selon ce que je croyais, c'était même moi
qui lui demandais ce qu'il me faisait, parce qu'il n'y avait pas de
violence, pas de coups, pas de sang autour de ces moments, dans mes
souvenirs.
Lieu.
Une salle, pleine de miroirs, déformants. Renvoient des images. Jamais la
bonne. Brouillard. Croire aux images. Images destructrices. Miroirs
menteurs : mes cauchemars à moi sont plein de violence, de sang répandu par
ses mots meurtriers. C'est un enfer.
Pour le secret de cette fille du squat, je ne sais pas. Je sais juste que
le « plaisir » peut aussi démolir[1].
Un tas de pierres. Un à un, briser les miroirs.
Sortir du brouillard.
Sommaire Introduction : étudier l'inceste : quelques raisons d'un choix 1
I - Panorama et perspectives 2
1) L'inceste : un phénomène important mais peu connu 2
2) Les travaux existant en anthropologie sur ce sujet 3
3) Mon questionnement et ma problématique de départ 8
II-Méthodologie et questionnements que cela suscite pour l'anthropologie
9
1) De l'observation participante au récit 9
2) De l'objectivité aux points de vue 11
III-Obstacles et rencontres 14
3) Mes relations avec le terrain, et ses difficultés (parfois)
surprenantes pour moi 14
a. Ma première difficulté : moi 14
b. Ma seconde difficulté : autour de moi 16
c. Ma troisième difficulté : des associations paradoxales, ou
« l'anthropologue-victime d'inceste » comme étrangeté ? 17
d. Une dernière difficulté : la mise au secret des incesté/e/s par
leurs proches 22
4) Présentation des personnes avec qui j'ai eu des entretiens 23
5) Le cadre et ses garant/e/s légitimes 25
6) Mais au fait ... une étude non psychologique de l'inceste est-elle
pertinente ? 26
IV-Décrire la démolition ... et ses suites 28
1) La vie de famille : ouvrons la porte et allumons la lumière 28
a. « Hitler, je l'avais à la maison » 28
b. Les rôles de l'argent 38
c. Les rôles des mères : absence de recours et efficacité de la
honte 40
2) Les incestées et les hommes ... mais aussi les femmes, et les ami/e/s
44
3) Le rôle du travail 49
4) Incestées et psychothérapies 52
5) L'inceste : une frontière floue, une hiérarchie des abus ? 61
6) Victimes d'inceste et Justice 70
7) La parole et ses effets : généalogies de l'inceste 77
Conclusion 83
Annexes 86 Introduction : étudier l'inceste : quelques raisons d'un choix
Un élément fondamental, fondateur de ce choix, est ma situation de
victime, moi-même, d'abus sexuel incestueux, dans une famille bien
française, de la fin du 20e siècle, en milieu urbain et sans problèmes de
chômage ou d'alcoolisme (parents et apparenté/e/s fonctionnaires d'Etat).
Dès lors, je ne sais pas si j'ai choisi ce sujet, ou si c'est lui qui s'est
imposé à moi. Tout ce que je sais, c'est que c'était celui-là ou rien. Je n'aurais pas pu faire ce premier mémoire sur un autre sujet. Tout
autre sujet m'apparaissait en effet futile à l'époque, hormis bien sûr ceux
ayant trait aux phénomènes de violence, tels l'excision, ou encore la
torture et la répression sournoise et brutale effectuée par les dictatures.
Et puis, comme une évidence : on n'en parle pas, ici aussi. Les familles
comme ma famille d'origine, cela n'existe pas. Et si cela n'existe pas, je
n'ai rien à faire ici. Ou alors, il faut que j'en parle moi, puisque
personne d'autre n'en a l'idée,