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... en s'en distanciant. J'espère fournir ici quelques outils pour la réalisation d'un
tel exercice. .... Mesure, S., Renaut, A., Alter Ego. ... Van Parijs, P., Real Freedom
for All. What (if anything) can justify capitalism ?, Clarendon, Oxford, 1995. Enfin ...
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Argument
D'après A. Rey, le mot "argument" n'est devenu courant qu'au 19e siècle
" avec des applications particulières à la publicité et à la vente "
(1998 : argument). Il est utilisé dans trois domaines, avec des acceptions
différentes. En logique, il correspond à un terme désignatif ; en
littérature, à un discours abrégeant un autre discours ; en rhétorique
argumentative, il se définit comme un énoncé légitimant une conclusion.
En logique On désigne par argument d'une fonction chacune des places vides ou
variables (notées x, y, z...) associées à cette fonction. En grammaire de
la langue naturelle, la fonction correspond au verbe (prédicat) ; ainsi le
verbe "donner" correspond à un prédicat à trois arguments "x donne y à z".
Le nombre d'arguments correspond à la valence du verbe. Lorsque des noms
d'objets convenablement choisis (respectant les relations de sélection
imposées par le verbe) sont substitués à chacunes des variables on obtient
une phrase, exprimant une proposition (vraie ou fausse) : "Pierre donne une
pomme à Jean".
En littérature L'argument d'une pièce de théâtre ou d'un roman correspond au schéma, au
résumé ou au fil directeur de l'intrigue. La critique littéraire n'utilise
pas les dérivés "argumenter", "argumentation" avec les sens correspondant à
cette acception, qui, par ailleurs, ne s'oppose pas à "conclusion".
En rhétorique argumentative La théorie rhétorique argumentative distingue traditionnellement trois
types d'arguments (ou preuves*) : les arguments éthiques, pathétiques et
logiques. Les arguments éthiques, liés à la personne du locuteur (son
autorité*, son éthos*) ainsi que les arguments pathétiques, d'ordre
émotionnel* (pathos*), ne s'expriment pas forcément par un énoncé. Pour
inspirer la confiance ou émouvoir la meilleure stratégie n'est pas
forcément de dire qu'on est une personne de confiance ou qu'on est ému, il
est préférable d'agir dans des registres sémiotiques non verbaux.
Seul l'argument dit logique est propositionnel : c'est un énoncé (ou un
fragment de discours) vraisemblable* qui exprime une raison avancée pour
accréditer une proposition controversée, ayant le statut de conclusion.
Pour exprimer la relation argument / conclusion, on a également recours aux
oppositions suivantes :
- énoncé consensuel / énoncé dissensuel, contesté, disputé ;
- énoncé relevant de la doxa* / énoncé exprimant un point de vue
spécifique ;
- énoncé plausible / énoncé douteux ;
- énoncé sur lequel ne pèse pas la charge de la preuve* / énoncé qui
supporte la charge de la preuve ;
- du point de vue fonctionnel, énoncé légitimant / énoncé légitimé ;
Si l'argument est contesté, il doit alors être lui-même légitimé. Au cours
de cette nouvelle opération, il a le statut de conclusion avancée par un
locuteur et soutenue par une série d'arguments, qui sont des sous-arguments
par rapport à la conclusion primitive). Si l'accord ne se réalise sur aucun
énoncé, la régression peut être infinie et la dispute éternelle.
L'accord du public* sur les énoncés stables, susceptibles de servir de
support à la conclusion, n'est pas forcément assuré, celui de l'adversaire
encore moins. Le choix de ce qui sera retenu comme vraisemblable est donc
une affaire de stratégie, adoptée en fonction des circonstances. "Argument" est parfois pris au sens de "argumentation". Appartiennent à la
même famille conceptuelle les mots argumentateur, celui qui argumente et
argumentaire, ensemble d'arguments mobilisables en vue d'un objectif
particulier ("argumentaire d'un parti politique, argumentaire de
vente..."). Le mot est récent, 1960 (Rey 1998 : argument). Par extension,
l'argumentaire attaché à une question est constitué par l'ensemble des
arguments mobilisés par l'une ou l'autre partie lorsque la question est
débattue. (Voir Argumentation, Doxa, Preuve, Probable) Argumentation
L'argumentation est au c?ur de la conception ancienne de la rhétorique*.
Après avoir connu une forme de discrédit, lié au déclin de la rhétorique et
à l'emprise de certaines formes de scientisme, les études d'argumentation
ont été refondées dans la seconde partie du 20e siècle à partir des travaux
de C. Perelman & L. Olbrechts-Tyteca (1958/1970), S. Toulmin (1958), C. L.
Hamblin (1970), ainsi que ceux de J.-B Grize et O. Ducrot dans les années
1970.
Le discours argumentatif a été caractérisé de façon intra-discursive par
ses différentes formes structurelles, et, de façon extra-discursive, par
l'effet perlocutoire qui lui serait attaché, la persuasion*. Cet effet est
mis au premier plan par la définition néoclassique de C. Perelman & L.
Olbrechts-Tyteca, pour qui " l'objet de [la théorie de l'argumentation] est
l'étude des techniques discursives permettant de provoquer ou d'accroître
l'adhésion des esprits aux thèses qu'on présente à leur assentiment "
(1958/1970 : 5).
Nous distinguerons d'abord l'argumentation définie comme l'expression d'un
point de vue, en plusieurs énoncés, ou en un seul, voire en un seul mot ;
et l'argumentation comme mode spécifique d'organisation d'une constellation
d'énoncés - les deux définitions n'étant d'ailleurs pas incompatibles.
L'argumentation comme présentation d'un point de vue, éclairage,
schématisation Si l'on définit l'argumentation comme une tentative pour modifier les
représentations de l'interlocuteur, il est clair que toute information joue
ce rôle et qu'elle peut être dite argumentative en ce sens (Benveniste
1966 : 242). Tout énoncé, toute succession cohérente d'énoncés
(descriptive, narrative) construit un point de vue ou " schématisation ",
dont l'étude constitue l'objet de la logique naturelle*. Pour J.-B. Grize,
l'argumentation est " une démarche qui vise à intervenir sur l'opinion,
l'attitude, voire le comportement de quelqu'un ", par les moyens du
discours. " Telle que je l'entends, l'argumentation considère
l'interlocuteur, non comme un objet à manipuler mais comme un alter ego
auquel il s'agira de faire partager sa vision. Agir sur lui, c'est chercher
à modifier les diverses représentations qu'on lui prête, en mettant en
évidence certains aspects des choses, en en occultant d'autres, en en
proposant de nouvelles, et tout cela à l'aide d'une schématisation
appropriée " (Grize, 1990 : 40). Un énoncé informatif classique comme "Il
est 8h" est argumentatif en ce sens : " Argumenter cela revient à énoncer
certaines propositions qu'on choisit de composer entre elles.
Réciproquement, énoncer, cela revient à argumenter, du simple fait qu'on
choisit de dire et d'avancer certains sens plutôt que d'autres " (Vignaux
1981 : 91).
L'argumentation comme composition d'énoncés Comme discours logique, l'argumentation est traditionnellement définie dans
le cadre d'une théorie des trois opérations mentales : l'appréhension, le
jugement et le raisonnement. Par l'appréhension, l'esprit conçoit une idée
d'un objet ; par le jugement, il affirme ou il nie quelque chose de cette
idée, pour aboutir à une proposition ("l'homme est mortel") ; par le
raisonnement, il enchaîne des jugements, de façon à progresser du connu à
l'inconnu.
Sur le plan linguistique, ces opérations cognitives correspondent
respectivement à : 1/ l'ancrage référentiel du discours au moyen d'un
terme ; 2/ la construction de l'énoncé par imposition d'un prédicat à ce
terme ; 3/ l'enchaînement des propositions ou argumentation, par lesquelles
on produit des propositions nouvelles à partir de propositions déjà
connues. L'argumentation sur le plan discursif correspond ainsi au
raisonnement sur le plan cognitif.
Comme discours naturel monologique l'argumentation " part de propositions
non douteuses ou vraisemblables, et en tire ce qui, considéré seul, paraît
douteux ou moins vraisemblable " (Cicéron Divisions : 46). Dans cette
perspective, l'argumentation est une procédure permettant de stabiliser un
énoncé contesté en le connectant à un énoncé soustrait à la contestation.
Dans une perspective dialogique-rationnelle " L'argumentation est une
activité verbale et sociale, ayant pour but de renforcer ou d'affaiblir
l'acceptabilité d'un point de vue controversé auprès d'un auditeur ou d'un
lecteur, en avançant une constellation de propositions destinées à
justifier (ou à réfuter) ce point de vue devant un juge rationnel " (van
Eemeren & al. 1996 : 5).
Formes du discours argumentatif propositionnel La linguistique textuelle distingue cinq types de séquences* : narratif,
descriptif, argumentatif, explicatif et dialogal (Adam 1996 : 33). On peut
considérer que les structures suivantes correspondent à autant de
caractérisations, compatibles, de la séquence de base argumentative.
Argument, conclusion*. Soit une suite d'énoncés {E1, E2}. Cette suite est
argumentative si l'on peut la paraphraser par un ou plusieurs des énoncés
suivants : "E1 appuie, étaye, motive, justifie... E2" ; "E1, donc, d'où...
E2" ; "E2, puisque, étant donné que... E1"
La théorie de l'argumentation dans la langue formule la même relation sous
un mode qui s'est avéré extrêmement fertile : la conclusion, c'est ce qu'on
a en vue, ce à quoi on veut en venir quand on énonce l'argument : "Si le
locuteur énonce E1, c'est dans la perspective de E2" -> "La raison pour
laquelle il énonce E1, c'est E2" -> "Le sens de E1, c'est E2".
Argument, conclusion, topos*. Généralement le lien argument-conclusion est
assuré par un topos*, souvent implicite ; la cohérence de l'enchaînement
"le vent se lève, il va pleuvoir" est fondée sur le topos "en général,
quand le vent se lève, il pleut". On dit parfois qu'il y a plus dans
l'argument que dans la conclusion, dans la mesure où l'argument est plus
assuré que la conclusion (qui n'est qu'une projection hypothétique de
l'argument). On peut aussi dire qu'il y a moins, dans la mesure où la
conclusion ne fait pas que développer analytiquement l'argument, elle est
le produit de cet argument enrichi par sa combinaison avec un principe
général ou topos.
Le modèle de S. Toulmin (1958 : chap. 3) articule la cellule argumentative
monologique autour de cinq élémen