chimie - S2PB

Un même motif, la maille, est répété à l'identique selon un réseau régulier. ..... de
la Société des explorateurs français, donne des fourmis dans les jambes. ... Ne
plus se livrer, de manière régulière, à l'exercice de la géophotographie .... à se
développer à très grande vitesse, avec une croissance mondiale à deux chiffres.

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LE JOURNAL DU CNRS numéro 216/217 Janvier février 2008
TITRE : LA TERRE
SOMMAIRE :
CHIMIE Les rois du design
ARCHÉOLOGIE Les cubistes du Néolithique
GÉNOMIQUE Une bactérie pirate à l'assaut des plantes
ÉNERGIE Les flammes sous contrôle
ASTROPHYSIQUE L'Univers en continu
PALÉONTOLOGIE L'ADN de Neandertal parle
GÉOPHOTOGRAPHIE Sur la route...
KENYA En attendant les premiers hommes
Pôles de compétitivité Optitec.
Programme Amazonie Des labos parmi les arbres
Nantroseize Percer le secret de la vague géante
ENQUETE ANNEE INTERNATIONALE DE LA TERRE
CHIMIE Les rois du design À Versailles, des chimistes conçoivent des molécules avant de les
assembler, brique par brique, comme dans un jeu de Lego. Visite dans un des
laboratoires les plus en vue de la chimie française.
Le campus verdoyant de l'Institut Lavoisier de Versailles (Institut CNRS
Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines) abrite des composés
quasi miraculeux! L'article paru dans Science en 2005 à leur sujet en
témoigne, puisqu'il est le plus cité au monde dans les publications
scientifiques de chimie (d'après la revue Science Watch). ! De quoi s'agit-
il ? « Venez, je vais vous montrer...», invite Gérard Férey, l'?il
pétillant et le sourire en coin. Maintenant que cet institut, qu'il a créé
ex nihilo il y a près de dix ans, « vole de ses propres ailes », ce membre
de l'Académie des sciences a renoncé à le diriger et se consacre au groupe
de solides poreux dont il est responsable. Dans son bureau, sous l'?il
complice de Marie Curie, de Frédéric Joliot, et du reste de la célèbre
famille de scientifiques, encadrés sur ses murs, il montre une grosse
boule, savant assemblage de tiges en plastique. « Nous savons fabriquer des
solides cristallins (un cristal est un solide polyédrique dont le grand
nombre d'atomes, de molécules ou d'ions, est ordonné de manière régulière
et périodique. Un même motif, la maille, est répété à l'identique selon un
réseau régulier.), hybrides organique-inorganique (Les éléments de la
chimie organique sont : le carbone (C), l'hydrogène (H), l'oxygène (0),
l'azote (N), le phosphore (P) et le soufre (S).), dans lesquels se répète,
de manière périodique, cette forme : une sorte de grande cage, un trou en
somme, d'environ quatre nanomètres de diamètre (1 nanomètre = 10-9 mètre).
C'est dix fois plus gros que ceux des autres laboratoires ! » À l'échelle
atomique, ces trous sont en effet gigantesques. Car les atomes, minuscules
«billes» qui composent toutes choses, ne mesurent qu'un dixième de
nanomètre environ. Un solide dit « poreux » est donc, à l'échelle atomique,
l'équivalent d'un gruyère aux trous énormes, très nombreux, et répartis de
manière parfaitement régulière. Mais à quoi servent-ils? Gérard Férey
sourit et explique : « La nature a horreur du vide... Ces trous sont bien
sûr faits pour être remplis. » On peut par exemple y piéger et y stocker
des gaz comme l'hydrogène ou le dioxyde de carbone (CO2), dont les rejets
trop importants en ont fait l'une des pires menaces pour l'environnement.
Mieux encore : confiné dans les trous, ce gaz occupe un volume bien plus
faible. Résultat : 1 cm3 d'un MIL (Matériau de l'Institut Lavoisier)
composé d'atomes métalliques et de molécules organiques permet de piéger
près de 400 cm3 de CO2 ! « C'est le matériau le plus efficace du marché
pour ce gaz-là », insiste Gérard Férey. Que faire ensuite de cette « éponge
» gonflée de déchets carbonés ? « Il s'agit de faire réagir les déchets
avec un autre produit chimique, au sein même du cristal, pour les rendre
non polluants. Et peut-être même les détruire. »Mais le chimiste préfère
rester discret : « Un brevet est en cours... »
« Nous avons aussi un brevet d'application pour les molécules
médicamenteuses », reprend Gérard Férey. « Elles ont toujours de grandes
dimensions. » Avec leurs gros trous, les MIL sont donc les seuls solides
poreux à pouvoir prétendre les stocker. Avant de les relarguer dans
l'organisme. Alors, bientôt une seule pilule à avaler et qui délivrera
petit à petit un mois de traitement ? « C'est l'idée oui... Le gain en
confort du malade serait appréciable. L'industrie pharmaceutique est très
intéressée... », lâche le chimiste encore tenu au secret. Mais le plus
étonnant vient ensuite : « Nous venons de publier un article dans Science 6
sur des composés capables de gonfler de 300 %! Leur structure en forme de
"cage" peut s'élargir considérablement. Puis retourner à l'état initial !
», s'enthousiasme-t-il. Les applications de ces réservoirs hautement
extensibles ? Très prometteuses mais absolument top secrètes... «
L'important, c'est que nous avons expliqué le pourquoi de notre résultat »,
insiste Gérard Férey. Cette approche tranche avec la chimie classique qui
consiste surtout à mélanger des composants, voir ce qui se passe,
tâtonner... et, si un résultat est obtenu, le publier. « En créant
l'Institut Lavoisier, je voulais faire une chimie ciblée pour des
applications ciblées. Grâce à notre groupe de résonance magnétique
nucléaire (RMN), nous sommes actuellement les seuls au monde à développer
des méthodes in situ pour voir comment - et pourquoi - les produits désirés
se forment pendant la réaction. » Ensuite, ces rois du design à l'échelle
moléculaire peuvent pratiquement « jouer » au Lego. Avec les briques
élémentaires observées pendant les réactions, ils imaginent et conçoivent
les assemblages tridimensionnels dont ils rêvent, simulent numériquement
tous les arrangements possibles en fonction des affinités entre atomes,
avant de synthétiser les composés miracles. François Couty, directeur
adjoint de l'Institut Lavoisier, « joue » aussi au Lego moléculaire, mais
avec des molécules organiques. « En fonction des affinités entre atomes,
nous imaginons les différentes étapes pour synthétiser "brique après
brique" un composé », explique le chercheur. « Nous pouvons partir d'un
produit chimique de base, simple et peu cher, pour reproduire une molécule
biologiquement active et déjà connue, mais trop coûteuse à extraire de la
nature. » Bel exemple de réussite de l'équipe : la synthèse de
cyclopeptides, drôles de molécules circulaires, d'ordinaire isolées à
partir de feuilles, racines et graines de différentes plantes, et connues
pour leurs vertus sédatives, antibactériennes...en médecine asiatique et
sud-américaine. Autre molécule, enjeu de grandes avancées, le TMC- 95, un
anticancéreux prometteur par son mode d'action original, également très
coûteux à produire.« Un jeune chercheur de notre équipe, Gwilherm Evano,
médaille de bronze au CNRS cette année, a reçu une bourse de l'Agence
nationale de la recherche (ANR) pour développer nos techniques sur ce sujet
», souligne le directeur adjoint.
Dans cet institut où la moyenne d'âge des chercheurs ne dépasse pas
quarante ans, on se soucie aussi beaucoup de l'environnement. « La chimie a
mauvaise réputation », commente François Couty, en surveillant un ballon de
caoutchouc orange où s'achève une synthèse. « Nous essayons donc de
respecter une charte de "12 règles de chimie verte" que nous avons fixées.
» Par exemple, réduire la quantité de solvant, ce liquide, souvent très
polluant, où doivent « baigner » les réactifs à utiliser. « Pour un gramme
de réactif, il en faut soixante de solvant ! », explique justement Régis
Goumont, du groupe « Réactivité et catalyse ». « Notre équipe essaie de
remplacer les solvants ordinaires par un liquide ionique, chargé
électriquement, biodégradable et réutilisable, préparé par activation micro-
ondes. » Ces ondes, de haute puissance, utilisées en milieu clos,
permettent non seulement de réduire d'un facteur dix la quantité de solvant
mais aussi d'abaisser la durée et la température nécessaires à la réaction.
Autre avantage de ces nouveaux chemins réactionnels : il se forme moins de
produits secondaires, inutiles et polluants. Dans le même département,
Emmanuel Magnier se concentre quant à lui sur le fluor. « Cet élément
chimique, totalement absent du corps humain, est un très bon marqueur pour
suivre les molécules », explique le chercheur. Son équipe s'applique donc à
« enrichir » des principes actifs déjà connus avec des atomes de fluor,
toujours façon Lego. Cela pourrait permettre d'affiner certains traitements
et médicaments. D'autant que l'apport de fluor améliore souvent
l'efficacité des médicaments et leur arrivée jusqu'à leur cible, notamment
en les protégeant de la digestion. « Nous avons ainsi synthétisé un
analogue fluoré du Faslodex (Fulvestrant), médicament anticancéreux
actuellement sur le marché », ajoute Emmanuel Magnier.
Loin des « architectes » moléculaires, Arnaud Etcheberry, autre directeur
adjoint de l'Institut et responsable du groupe « Physicochimie et
électrochimie aux interfaces», fait réagir grâce à l'électrochimie, à -55
°C, de l'ammoniac liquide sur des petits rectangles de phosphure d'indium,
un matériau très utilisé en optoélectronique. Résultat de cette approche
unique au monde : une surface tapissée de magnifiques circonvolutions,
façon coraux, associés à du phosphure d'indium poreux. Le but ? La
croissance de fils nanométriques et de nombreuses applications à venir en
électronique. Pour observer les résultats de ce type de « manip », il faut
monter au deuxième étage. Là, trône la XPS de l'Institut Lavoisier, énorme
machine à rayons X, capable de balayer les surfaces et d'analyser leur
composition. « Notre centre de spectroscopie en aura quatre dans un an,
avec une résolution de 12 nanomètres », commente Francis Sécheresse,
directeur de l'Institut depuis trois ans. « Ce sera en Europe le seul
centre de cette envergure piloté par des chimistes », souligne-t-il. « À
l'avenir, notre société sera de plus en plus envahie de micro- et nano-
objets, qui seront le siège ou les acteurs de réactions chimiques
complexes. La chimie de surface pour étudier ce type d'objet va donc
devenir un enjeu de plus en plus grand », prédit Francis Sécheresse. Pari
gagné pour cet institut original et créatif : entre les deux « monstres »
de la r