NO WAY OUT - Roland Michel Tremblay

Juste avant d'embarquer, il s'écrie que je suis French. ..... Raymond me racontait
qu'ils avaient joué au jeu de la vérité une fois lorsqu'il faisait ses études à ...

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Un Québécois à Londres

Roland Michel Tremblay

Éditions T.G.
31 rue Bayen
75017 Paris - France


Du même auteur, publiés aux Éditions T.G. :
Un Québécois à Paris (Récit autobiographique)
Un Québécois à New York (Récit autobiographique)

Publiés aux Éditions iDLivre :

L'Anarchiste (Poésie)
Denfert-Rochereau (Roman)
L'Attente de Paris (Roman)
L'Éclectisme (Essai)

Pour plus d'informations, veuillez visiter
le site de l'auteur ou le contacter:
http://www.anarchistecouronne.com
rm@anarchistecouronne.com

44E The Grove
Isleworth, Middlesex
Londres, TW7 4JF
Angleterre


Un Québécois à Londres
© 2012, Roland Michel Tremblay


ISBN:


Éditions T.G., Paris










Un Québécois à Londres



1

J'arrive de partout dans le monde, partout j'ai été bien reçu et l'on
désirait me garder plus longtemps. Je reviens de passer moins de trente
jours chez mes parents et je comprends tout à fait ce qui a permis mon
départ voilà un mois. C'est Alice, c'est le rejet systématique d'elle et
probablement du copain de ma s?ur qui en sont la cause. Je ne compte pas
l'ami de ma mère André, lui je sais bien qu'il refuse que je vienne, il a
établi cette nécessité avant même de venir habiter avec ma mère. Tout le
monde est si bizarre. Est-ce moi ? Même dans l'autobus de Québec jusqu'à
Jonquière les gens semblaient loin de la bonne humeur habituelle. Je
comprends, c'est le mois de mars. Quelle folie de revenir ici au pire mois
de l'année. Le mois des dépressions, des suicides, des chicanes, des
séparations et des divorces. C'est bien connu, les gens n'en peuvent plus
au mois de mars. C'est la fin de l'hiver qui n'en finit plus et tous les
gens qui sont aux études et qui travaillent en relation avec des horaires
de septembre jusqu'à la fin de l'année scolaire. C'est énormément de monde
quand on pense que les gens étudient souvent jusqu'à 28 ans. Il n'y a que
moi qui ne vis pas au même rythme, qui n'a pas subi l'hiver l'année d'avant
et qui cette année se promenait là où il faisait plus chaud malgré le
froid. Moi j'ai gardé toute ma bonne humeur, mais je crois que je vais
apprendre ce mois-ci à le passer dans ma chambre. Il faut à tout prix
éviter de me laisser démoraliser par tout et chacun. Mais ce sera très
difficile. Gabriel, Alice et Patricia m'ont fait subir tout un affront
aujourd'hui. Patricia ne m'a pas regardé une seule fois, elle s'est
contentée de me saluer à mon arrivée. Cette façon d'agir m'a vidé mon
énergie complètement. Elle ne semble pas heureuse de mon retour. Puis Alice
paraît tellement mal à l'aise devant moi, n'osant pas me regarder dans les
yeux, qu'on dirait presque qu'elle se sent coupable de quelque chose. Peut-
être cela a-t-il rapport avec cette auto que je voulais emprunter pour
aller chercher mes vieilles affaires à Ottawa. Pour moi ça n'a tellement
pas d'importance, mais pour eux ça semble avoir été la goutte qui a fait
déborder le vase, et j'ai l'impression que cela a été le prétexte à de
grandes chicanes entre mon père et Alice. Je suis tellement démoralisé,
c'est incroyable. Alice m'a dit que mon arrivée ici impliquait les mêmes
conditions qu'avant, mais également une nouvelle : « Pas d'étrangers ici la
nuit ». En termes plus simples, pas de Gabriel dans la maison, je ne veux
même pas qu'il franchisse la porte d'entrée. Si c'est ce qui l'inquiète,
elle peut s'encourager à l'allure que prend ma relation avec lui. Je l'ai
vu cet après-midi. Jamais dans ma vie je n'ai passé à travers une si grande
épreuve. Jamais dans ma vie je n'ai eu quelqu'un en face de moi dont il
m'était impossible de déceler la moindre des choses qui se passe dans sa
tête. Que sait-il, qu'ignore-t-il, qu'a-t-il appris, quelles sont ses
intentions. Il s'est presque mis à pleurer en face de moi, me disant qu'il
se sentait mal à l'aise, qu'il n'avait pas été correct en couchant avec
Philip (car ils ont couché ensemble). Il est ressorti tout ébranlé dans la
voiture, incapable de dire un mot. Je lui ai dit que j'attendrais qu'il me
rappelle, que je serais énormément heureux s'il le faisait, quand bien même
ce ne serait que de l'amitié, mais que comme il disait qu'il ne voulait
plus me voir pour arrêter sa souffrance, je ne forcerai pas les événements.
Bref, il existe tout un paquet d'événements dans sa vie qu'il m'a cachés.
Aujourd'hui j'apprenais tout ça, chacune de ces choses étant pour moi une
claque dans le visage. Dont le plus important, il a décroché un emploi à
temps plein dans un restaurant, payé en dessous de la couverte, alors il
fait beaucoup d'argent car il continue à recevoir de l'assurance-chômage.
Et moi qui m'inquiétais parce qu'il semblait incapable d'arriver dans ses
comptes. Et moi qui l'aimais suffisamment pour me pousser à repartir de New
York pour retourner à Jonquière. S'il n'avait pas existé, lui, j'aurais
tout tenté pour demeurer à New York le plus longtemps possible. Jonquière
me rappelait tant, maintenant il ne me rappelle plus du tout. L'autre,
Jacques, est parti pour l'Ouest canadien pour les deux prochaines semaines.
Je doute fort que je serai encore ici lorsqu'il reviendra. Tous ces
événements m'ont tellement démoralisé que je ne trouve pas l'énergie pour
défaire mes bagages, et je cherche des solutions à mes problèmes. Je
n'avais pas compris jusqu'à quel point tout le monde avait poussé un grand
soupir de soulagement lorsque je suis parti. D'autres ayant plutôt
souffert, veulent éviter d'autres souffrances et me rejettent tout
simplement. Eh bien allez donc tous chier calice ! J'appelle ma s?ur pour
tenter de lui expliquer la situation, plutôt que de m'inviter chez elle à
demeurer pour le mois, voilà qu'elle me propose d'y aller pour une nuit en
attendant que mon père revienne et puis que l'on va discuter cartes sur
table le problème. Ensuite ça ira mieux, on trouvera les solutions qui me
permettront de demeurer ici pour un mois. Mais elle ne comprend rien, je
n'ai aucune motivation à entrer dans une série de compromis pour demeurer
avec des gens qui feraient tout pour me mettre dehors. Elle ne comprend pas
ce que ça implique comme calvaire de demeurer ici alors que tu sais qu'ils
souhaiteraient que tu disparaisses. Je n'ai jamais amené Gabriel coucher
ici, il a franchi la porte d'entrée deux fois, restant dans la maison moins
de dix minutes chaque fois. Elle n'est pas du tout ouverte au monde gai.
Malgré son frère gai et confident Serge. Je me sens si mal que je suis prêt
à repartir sur-le-champ. Mais où irais-je ? Plus d'argent, plus rien.
Partout j'ai des problèmes, partout il y en a un qui me rejette et
m'empêche d'être bien. À Toronto, tout le monde insiste pour que je reste,
mais Rosario est à l'arrière-plan. À New York, il y a le colocataire. Il me
faut absolument trouver un emploi et commencer ma vie indépendante. Mais
voilà, il faut de l'argent pour ça. C'est tellement stupide que Sébastien
s'est pris un appartement pour dans un mois, il me semble que mes problèmes
seraient réglés. Que vais-je faire mon Dieu ? Pour l'instant je vais aller
chez ma mère, je ne suis plus capable de demeurer dans la maison chez mon
père, d'autant plus lorsqu'il est absent jusqu'à demain soir, voyage
d'affaires à Québec justement.
Bon, je suis revenu de chez ma mère et je suis revenu sur la terre.
Les conditions étant maintenant claires, nous avons pu parler d'autre
chose, de ses étudiants. J'ai remarqué chez Alice et chez Marie un
problème. Les conversations ne se font qu'à sens unique. Elles ont besoin
de parler, mais n'ont certes pas l'envie de t'entendre. Alors je commence à
parler, elles me coupent sans cesse. Alors je comprends, je me tais, je
subis l'écoute de leurs problèmes. Car ne pouvoir parler implique qu'il n'y
a aucun échange. On ne peut pas me remplir ainsi impunément, elles me
mangent toute mon énergie et moi je ne puis faire la pareille. Alors elles
me vident et ne me laissent que le fardeau de leurs problèmes qui
deviennent miens. Quelle envie ai-je de partager leurs misères si elles se
foutent des miennes ? Des névrosés, je vous jure. Faites comme les serins
bon Dieu, regarder le miroir et parlez-vous à vous-mêmes comme si c'était
un étranger. Vous ne verrez aucune différence et cela vous soulagera.
Pendant ce temps moi je pourrai m'occuper à autre chose. Comme Gabriel par
exemple. Je me suis bien posé la question, pourquoi il se sentait coupable
alors que c'est bien moi qui devrais l'être. Mais il m'a lancé que Philip
avait vu que je lui avais écrit des lettres. Ainsi Jean-Pierre est venu
chez Gabriel plusieurs fois, il a dormi là. Ça me fait mal. De plus, il est
retourné dans l'auto chercher mon cahier, dans lequel je croyais trouver
mon numéro d'assurance sociale. Je crois qu'il a eu le temps et la
curiosité de lire quelques lignes. À la huitième ligne j'avoue d'emblée
qu'Ed est le seul amour de ma vie, que je l'aime comme jamais je n'aimerai
personne et q