La place des déplacements professionnels dans les ... - Hal-SHS

La production en « juste à temps », la constitution d'entreprises ...... Le budget
des missions a beau être déterminé lors de l'exercice de ..... les outils
mathématiques sont corrigés lorsqu'ils produisent des résultats trop difficiles à
interpréter. .... par exemple, de la lean production, de la traçabilité des produits
tout au long de ...

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Le rôle des déplacements professionnels dans les entreprises
industrielles multi-établissements.


Le cas d'un fournisseur de l'automobile






The role of business trips in industrial multi-localized firms.


The case of an automobile supplier










Anne AGUILERA (Correspondant principal)


LVMT, 2 rue Nobel, Cité Descartes, 77455 Champs sur Marne


tél : 01 64 15 21 02 ; fax : 01 64 15 21 40 ; aguilera@inrets.fr


Frédéric DE CONINCK


LVMT, 2 rue Nobel, Cité Descartes, 77455 Champs sur Marne


tél : 01 64 15 38 15 ; fax : 01 64 15 21 40 ; coninck@enpc.fr


Pierre HAUCHARD


LVMT, 2 rue Nobel, Cité Descartes, 77455 Champs sur Marne


tél : 01 64 15 21 02 ; fax : 01 64 15 21 40 ;










Le rôle des déplacements professionnels dans les entreprises
industrielles multi-établissements.


Le cas d'un fournisseur de l'automobile






The role of business trips in industrial multi-localized firms.


The case of an automobile supplier










Résumé


Les déplacements pour motif professionnel font largement figure de
« boîte noire », tant pour les spécialistes des transports et de la
mobilité que pour ceux qui s'intéressent, sous un angle économique ou
sociologique, aux organisations productives et au travail. A travers une
analyse de la littérature et une enquête auprès d'un grand fournisseur de
l'automobile, cet article s'intéresse aux liens entre ces déplacements et
les stratégies d'organisation de la production et du travail. Nous montrons
notamment que dans certains cas les choix d'organisation sont, très
consciemment, appuyés sur la possibilité d'une mobilité des salariés entre
les sites de l'entreprise. Dans d'autre cas, la mobilité apparaît plutôt
comme l'effet non voulu ou non anticipé des choix industriels.


Mots-clés


déplacements professionnels, organisation industrielle, fournisseur
de l'automobile, entreprise multi-établissements, coordination, TIC






Key words


business trips, industrial organization, automobile supplier, multi-
unit firm, coordination, ICTs



Introduction


Confrontées à la mondialisation du système économique, à des
exigences accrues en termes de flexibilité, d'innovation et de
personnalisation des produits, ainsi qu'au développement des TIC, les
entreprises industrielles ont été amenées, au cours des dernières
décennies, à opérer des transformations majeures tant sur le plan de leur
organisation interne qu'en termes de relations avec leur environnement
extérieur. La production en « juste à temps », la constitution
d'entreprises multi-établissements, la mise en place de formes
d'organisations plus horizontales et de formes de travail par équipes-
projets, l'adoption de nouveaux modes de gestion et de contrôle de la
production et de son adéquation avec la demande (cf. les ERP), le recours-
croissant à la sous-traitance et à des partenariats avec d'autres
entreprises constituent quelques-unes des facettes de ces mutations.


Touchant à l'organisation des entreprises et aux relations avec leur
environnement, ces mutations ont stimulé autant qu'elles ont accompagné une
évolution des besoins et des modes de coordination tant à l'intérieur des
entreprises qu'avec leurs interlocuteurs externes (clients, etc.). Si des
disparités existent selon les secteurs et les organisations industrielles,
et en particulier selon leur niveau de centralisation (Allouche et Huault,
1998), des traits communs peuvent être distingués : ils vont dans le sens
d'un accroissement des besoins de communication des entreprises, à la fois
en interne du fait de structures plus transversales, mais également avec
l'extérieur dans un contexte de relations accrues non seulement avec les
clients (Ughetto et al., ?) mais également avec tout un ensemble
d'interlocuteurs au statut divers : sous-traitants, partenaires, experts,
etc. (réf).


Les TIC ont constitué autant un support qu'un élément déterminant de
ces évolutions organisationnelles et communicationnelles (Brousseau et
Rallet, 1997). En offrant des formes de coordination et de contrôle à
distance de plus en plus efficaces, ces technologies ont participé à la
mise en place de nouvelles formes de division et de contrôle du travail
(Moati et Mouhoub Mouhoud, 1994). Par ailleurs les nouvelles formes
organisationnelles et de travail (comme le travail en équipe dédiée à un
projet) et la diffusion des TIC dans les différentes fonctions des
entreprises et aux différents niveaux hiérarchiques ont favorisé une
diffusion des besoins de communication dans le travail, même si des
clivages, notamment hiérarchiques, demeurent incontestablement (Greenan et
al., 2003).


Le développement et la diffusion des TIC, donc des possibilités de
communication à distance, n'ont toutefois pas supprimé les besoins de
communication en « face à face ». Si les TIC ont favorisé un découplage
entre proximité (organisationnelle) et localisation géographique, des
besoins de proximité physique peuvent demeurer mais se satisfaire de
rencontres « temporaires » (Rallet et Torre, 2004). De très nombreux
travaux théoriques et empiriques ont de fait souligné la complémentarité
entre les modes de communication à distance et en face à face (Gaspar et
Glaeser, 1998), même si le rythme de croissance est sans commune mesure
entre les premiers, qui explosent, et les seconds, dont le rythme de
croissance reste à mesurer mais demeure sans nul doute nettement plus
modeste (réf). Par contre les fonctions et les salariés concernés par des
besoins de communication, et en particulier en face à face, seraient
potentiellement de plus en plus nombreux dans les entreprises
industrielles, et par ailleurs ils pourraient concerner, avec la
mondialisation et le développement du transport (notamment aérien), des
interlocuteurs de plus en plus éloignés les uns des autres.


En dépit du double consensus qui consacre d'une part la croissance
des besoins de communication des entreprises avec des interlocuteurs
distants, et d'autre part l'importance du face à face dans les mécanismes
de coordination intra et inter-entreprises, la littérature, y compris
d'ailleurs en économie des transports, est encore très discrète s'agissant
des implications en termes de mobilité physique (autrement dit de
déplacements professionnels) des salariés (Massot et al., 2006 ; Wickham et
al., 2006). Trois questions en particulier nous semblent importantes et
seront abordées dans ce papier. La première concerne l'identification des
facteurs de production de ces déplacements dans les entreprises et la
compréhension de leur place dans les mécanismes de coordination intra et
inter-entreprises. La deuxième a trait à la nature des salariés (type de
fonction et niveau hiérarchique) concernés par cette mobilité. La troisième
s'intéresse à la perception et au jugement de cette mobilité qu'ont d'une
part par les entreprises, d'autre part par les salariés concernés.


Les déplacements professionnels sont dans ce papier considérés comme
un moyen de coordination intra et inter-entreprises. Ils constituent plus
précisément un cas particulier dans la catégorie des interactions en face à
face, cas particulier qui suppose que les interlocuteurs soient
préalablement distants et donc qu'au moins un d'entre eux va devoir se
déplacer. Dès lors une relecture de la littérature sur les communications
intra et inter-entreprises et le choix du mode de communication lorsque les
interlocuteurs sont distants permet de formuler trois hypothèses, étayées
en outre par quelques études de cas récentes : d'une part ces déplacements
sont favorisés par certaines formes et stratégies d'entreprises mais ils
sont aussi une variable d'ajustement moins prévisible ?


les déplacements sont pour une part une conséquence prévisible de
certaines formes d'organisation du travail et de la production, souvent
liées au développement des TIC, et pour une autre part une variable
d'ajustement à des mutations (permanentes ou temporaires) soit endogènes
(provenant de l'entreprise), soit exogènes (provenant de son
environnement). D'autre part les salariés concernés par ces déplacements
appartiennent encore au haut de la hiérarchie même si une relative
diffusion est probable. Enfin les entreprises ont une faible perception de
cette mobilité et de ses liens avec les choix d'organisation et de division
spatiale du travail, tandis que les salariés concernés à la fois vivent
cette mobilité comme valorisante mais de plus en plus pesante (I). Ces
hypothèses sont ensuite testées à travers une série d'entretiens semi-
directifs conduits au cours de l'année 2005 auprès d'une dizaine de
salariés (dont le responsable) effectuant du contrôle de gestion au sein
d'une des divisions d'un des principaux fournisseurs automobiles européens
dont la production européenne est répartie sur plusieurs sites
(principalement en France et en Espagne) (II). La conclusion revient sur
les principaux résultats et propose un certain nombre de pistes de
réflexion.


I- De la coordination intra et inter-entreprises aux déplacements
professionnels de certains salariés : une grille d'