4-Dysfonc... - Fred Forest
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LE MILIEU DE L'ART CONTEMPORAIN : DYSFONCTIONNEMENTS ET FONCTIONNEMENT
Une polémique s'est développée ces dernières années, jetant le trouble,
créant une certaine suspicion, instaurant un malaise persistant dans les
milieux de l'art. Une polémique au centre de laquelle l'art, dit
contemporain, s'est vu soudain remis brutalement en question[1]. Ce qu'on
adorait encore béatement hier s'est trouvé soudain en situation d'être
brûlé sur la place publique. Dans la mesure où une polémique ne reste pas
un vain affrontement, circonscrit à des personnes données, et qu'elle
s'avère au contraire une contribution utile à la réflexion, à l'évolution
des idées, des "savoirs", des mentalités, nous la considérons alors comme
positive et, dans certains cas (notamment celui qui nous occupe ici !)
comme éminemment nécessaire. Dans la joute qui a opposé adversaires
convaincus et partisans aveugles de l'art contemporain, nous avons constaté
que les éléments essentiels au débat sont restés étonnamment absents !
A nos yeux, ces éléments sont pourtant fondamentaux, déterminants, pour
éclairer et avancer dans la réflexion. Pour pouvoir appréhender en toute
pertinence une situation globale qui dépasse de loin les simples enjeux de
l'art, au moment de la numérisation généralisée, il s'avère nécessaire de
replacer celui-ci dans le contexte de sa société. Il s'agit, dans l'art
dont il est question ici pour nous, des formes du symbolique et de
l'imaginaire dans un temps de mutation qui affecte l'existence de l'homme
dans ses fondements les plus intimes et l'organisation (la
réorganisation...) de son rapport au monde. Si dans cette réflexion nous ne
prenons pas soin de faire constamment référence au contexte dans lequel
l'art s'élabore et se donne aujourd'hui à voir, nous risquons de nous
trouver alors, rapidement, dans un débat vide de sens, à côté de la plaque,
disqualifiés ! Comme nous l'avons hélas ! constaté, la polémique sur l'art
contemporain à laquelle il nous a été donné d'assister ces dernières années
présente cette énorme lacune. Elle a vite tourné au vinaigre pour cause
d'incompatibilité "politique". Des dérapages l'ont conduite, sans
modération aucune, à des querelles de personnes, pour ne plus apparaître
finalement que comme un échange d'invectives entre individus ne partageant
pas la même idéologie. Au résultat, le fond du prob-
lème n'a jamais été traité, nous avons été gratifiés d'un débat stérile,
d'une joute d'initiés, bref d'un règlement de compte où l'ego de chacun
s'efforçait de dominer celui du voisin, à défaut de pouvoir imposer des
arguments susceptibles de nous convaincre. Rituel convenu de coloration
"intellectuelle", entre gens de "bonne" compagnie, plus occupés à se crêper
le chignon qu'à éclairer notre lanterne. Débat "historiciste", purement
formel, ultraspécialisé, entre théoriciens de l'art, sans rapport en regard
de la situation actuelle, celle qui est la nôtre à l'heure de la
communication numérique intégrée et généralisée.
Il s'agit maintenant de pouvoir renouveler un discours sur l'art, usé
jusqu'à la corde et de faire progresser une réflexion qui se propose de
questionner les conditions d'émergence d'un art, dans le contexte de
l'informatisation, de la numérisation et du développement des
communications de notre société. Une réflexion qui nous offre quelques
pistes nouvelles à explorer, non seulement sur la façon de penser
(repenser) l'art et de le faire, mais également de le diffuser. Nous
offrant l'opportunité d'ouvrir les yeux sur des formes d'art qui soient
fondamentalement "autres" que les modèles imposés par le marché depuis ces
vingt dernières années, attirant notre attention sur des facteurs "inédits"
(interaction, notion de réseau, téléprésence et action à distance...),
instaurant un nouveau rapport au monde qui, avec l'irruption irrésistible
d'Internet, modifie le spectre de notre sensibilité et de nos
représentations mentales.
Notre propos, ici, n'est pas d'émettre des jugements de valeur, de clouer
les uns au pilori, de porter les autres au pinacle, d'affirmer de façon
péremptoire ce qui est "bien", en le distinguant de ce qui serait "mal" !
Il consiste, plus modestement, et de façon toute pragmatique, à tenir
compte de la force têtue des faits, d'essayer d'en constater les effets et
d'en appréhender sans préjugés les conséquences dans le champ qui nous
préoccupe, celui de l'art. C'est un fait patent : des bouleversements
fondamentaux heurtent aujourd'hui de plein fouet tout ce qui constituait
les repères traditionnels d'une culture qui nous imprègne et dans laquelle
nous baignons encore. Un nouvel environnement (l'ordinateur n'est pas une
machine mais un environnement en soi !) induit une nouvelle perception du
monde, réaménage nos gestes les plus quotidiens.
Notre vision antérieure du monde s'en trouve remise en cause. La pratique
de notre présence à distance, au quotidien, procurée par les "extensions"
électroniques de notre corps et de notre esprit, modifie notre rapport à
l'espace. La notion du temps est, elle-même, soumise à un questionnement
radical.
Nos "représentations" se déplacent, se recomposent. Les modèles de
représentation sur lesquels durant des siècles nous avions fondé nos
connaissances et notre appréhension du monde se dérobent sous nos pieds.
Nos certitudes vacillent. La "réalité" bascule dans la "virtualité". Le
"matériel" se dissout dans "l'immatériel" comme un sucre dans un verre
d'eau. Le savoir et la culture ont déjà amorcé lentement d'une façon
souterraine, depuis une trentaine d'années, un long processus de mutation.
Et voilà qu'aujourd'hui soudain tout s'accélère ! La vitesse change
perspectives et vision du monde. Et l'on voudrait que l'art, l'expression
du symbolique et de l'imaginaire de notre société, dans ce contexte de
mutation, reste prisonnier de formes et de concepts datés, figés, alors que
tout bouge autour de nous ?
On se demande bien, encore, non sans un certain "ahurissement", comment des
facteurs aussi fondamentaux, aussi déterminants, conditionnant l'histoire
et le devenir des formes, les représentations du temps et de l'espace,
aient pu ainsi échapper - mais échapper totalement ! - à des spécialistes
de serait-ce l'art, engagés dans la polémique; sans même être évoqués, ne
qu'en filigrane une seule fois ?
Ne sont-ils pas tous, justement, des "professionnels" patentés de l'art,
engagés dans une réflexion qui prétend, précisément, mener un débat de
clarification sur l'art d'aujourd'hui ? Cette lacune, dont ils partagent la
responsabilité, traduit comment finalement des "spécialistes" d'un domaine
donné peuvent, sous le coup d'une inexplicable "aberration", se placer
d'emblée hors-jeu, hors de leur propre temps...
Une telle aberration paraît proprement impensable. Les querelles de
personnes, de surcroît dans ce débat (cette polémique) ont hélas !
continûment pris le pas sur la pertinence des contenus, offrant le constat,
pour un camp comme pour l'autre, d'un discours décalé, hors d'une réalité
tangible et contingente. Celui aussi d'une confrontation fondée sur des
"savoirs", nécessitant d'être "réactualisés" et sans délais. Le nez collé à
leurs théories - les "belles" théories de l'art bien apprises et
parfaitement récitées - nos "spécialistes" visiblement "déconnectés" sont
devenus "étrangers" à tout ce qui se passe dans leur environnement
immédiat. C'est comme s'ils s'employaient à disserter à perte de vue sur la
très grave question métaphysique que pose pour eux, encore à l'heure
d'Internet, le sexe des anges... alors que pendant ce temps, le sémillant
Bill Gates en costume trois pièces, et quelques petits génies de la Silicon
Valley en baskets et en tee-shirt (sans en avoir conscience eux-mêmes
encore...) travaillent sur des "gadgets" informatiques qui assureront,
qu'on le veuille ou non, le véritable renouvellement de l'art. Le même Bill
Gates qui a commencé par faire main basse sur Léonard de Vinci, signifiant
tout de même par ce geste symbolique, si nous ne l'avions pas encore
compris, que les enjeux de cette révolution sont d'abord des enjeux de
culture.
L'informatisation de la société, l'abolition de l'espace, la présence à
distance, l'ubiquité, la manipulation du temps, les nouveaux outils de
représentation, la réalité virtuelle, l'intelligence artificielle, tous ces
"fondamentaux" relèvent, en effet, peu ou prou, du domaine réservé de
l'art; et en constituent des données basiques.
Nous comptons avec la publication de cet ouvrage apporter au débat engagé
sur l'art, en qualité d'artiste de terrain et d'expérience, cette partie
absente qui lui a fait défaut.. Nous comptons bien amorcer une discussion
mettant en avant les conditions nouvelles qui sont celles d'aujourd'hui et
qui ne bâtisse pas uniquement son discours sur le "référentiel" historique.
Une réflexion qui d'ailleurs n'est pas si nouvelle, largement abordée
depuis une vingtaine d'années par des chercheurs de toutes origines, tels
que Jean-François Lyotard, Mario Costa, Bernard Stiegler, Pierre Lévy,
Philippe Quéau, Félix Guattari, Vilem Flüsser, Derrick de Kerckhove... qui
n'ont pas attendu que des critiques d'art et des historiens, inféodés au
marché, leur montrent la voie; et qui restent encore aujourd'hui sur le
quai à regarder passer les trains...
COMMENT PARLER D'ART AUJOURD'HUI SI ON NE SITUE PAS L'ART DANS SON CONTEXTE
?
La discussion engagée sur l'art, pour être sérieusement menée, doit p