1ère partie : L'inégalité des pouvoirs d'achat en France au 20ème ...

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se ... Mais le taux qui vérifie la parité des pouvoirs d'achat du Big Mac en Chine
et aux ... Exercice (les chiffres sont fictifs) : soit l'exemple de l'Inde et des USA, ...

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1ère partie :
L'évolution de l'inégalité des revenus en France au 20ème siècle Chapitre 1 : Un pouvoir d'achat « moyen » multiplié par 5 au 20ème siècle Avant d'étudier l'évolution de l'inégalité des revenus, il est utile
d'avoir présent à l'esprit les ordres de grandeur et les grandes étapes de
la croissance du pouvoir d'achat « moyen » en France au cours du 20ème
siècle. Les faits présentés dans ce chapitre préliminaire relèvent de
l'histoire économique générale de la France au 20ème siècle et sont pour la
plupart relativement bien connus, mais il nous a semblé nécessaire de les
rappeler brièvement afin de mettre en perspective les résultats originaux
présentés dans les chapitres suivants. Nous commençons par rappeler les
grandes lignes d'évolution de l'inflation (section 1), de la structure de
la population (section 2), puis de la composition du revenu des ménages
(section 3), avant d'aborder la question de l'évolution du pouvoir d'achat
« moyen » proprement dite (sections 4 et 5). Le lecteur familier de ces
évolutions générales peut aisément se contenter d'un survol rapide et
passer directement au chapitre 2. 1. Francs courants et francs constants : l'inflation en France au 20ème
siècle Pour pouvoir comparer les revenus du passé à ceux de la fin du 20ème
siècle, il faut d'abord prendre la mesure des différents épisodes de la
hausse des prix en France au 20ème siècle. En outre, au-delà de ce problème
purement monétaire et comptable de conversion des francs courants en francs
constants, nous verrons dans les sections et chapitres suivants que
l'inflation a eu au cours du siècle un impact important sur la répartition
des revenus réels, et il est donc utile de se familiariser dès à présent
avec la chronologie.
Entre le début et la fin du siècle, les prix de détail payés par les
consommateurs ont été multipliés par environ 2000, ce qui correspond à un
taux d'inflation annuel moyen de près de 8%.[1] Mais, comme l'indique le
graphique 1-1, sur lequel nous avons indiqué l'évolution des taux
d'inflation en France de 1900 à 1998, tels qu'ils ont été mesurés par la
SGF puis par l'INSEE grâce aux relevés de prix à la consommation effectués
par ces deux instituts tout au long du siècle, l'inflation en France au
20ème siècle n'est pas un long fleuve tranquille : après plusieurs phases
d'inflation élevée au milieu du siècle, liées notamment aux deux guerres
mondiales, l'inflation a retrouvé à la fin du siècle le niveau très faible
qui la caractérisait au début du siècle. Insérer : Graphique 1-1 : Le taux d'inflation en France de 1900 à 1998 Avant la première guerre mondiale, l'inflation moyenne était très proche
de 0%. Les prix augmentaient ou baissaient légèrement suivant les années,
et ces mouvements de faible amplitude se compensaient souvent en l'espace
de quelques années. Cette stabilité monétaire durait depuis le début du
19ème siècle. Entre 1820 et 1914, la progression totale des prix de détail
fut de l'ordre de 30%, ce qui correspond à un taux d'inflation annuel moyen
de l'ordre de 0,3%.[2] Notons cependant la légère poussée inflationniste de
1910-1911 (avec une inflation de près de 10% en 1911), généralement
attribuée à la récolte catastrophique de 1910 et à la crise marocaine de
1911.[3] Mais c'est la première guerre mondiale qui marque la véritable
entrée de la France dans l'ère de l'inflation « moderne » : entre 1914 et
1918, les prix sont multipliés par 2,1, avec des taux d'inflation annuels
de l'ordre de 20% durant 4 années consécutives, ce qui ne s'était jamais vu
depuis la période révolutionnaire. L'inflation s'accélère en 1919-1920,
puis se transforme en déflation en 1921-1922 durant la récession liée à la
reconversion des industries de guerre.[4] Mais l'inflation repart avec la
reprise économique au courant de l'année 1922, et elle ne sera
véritablement stoppée qu'avec la stabilisation et la ponction fiscale
opérée par le gouvernement Poincaré en août 1926 (au prix d'une nouvelle
récession en 1927). Effective à la fin de l'année 1926, la stabilisation
monétaire devient légale avec la loi monétaire de juin 1928, qui fixe la
nouvelle parité du franc en or : le « franc Poincaré » a officiellement
remplacé le « franc Germinal ».[5] Deux années se sont à peine écoulées
depuis la stabilisation légale que la France entre dans la dépression
mondiale et dans l'expérience traumatisante de la déflation : les taux
d'inflation seront négatifs pour toutes les années 1931-1935, et la baisse
cumulée des prix de détail entre 1930 et 1935 atteint 25%. La hausse des
salaires décidée par le Front Populaire et la dévaluation de septembre 1936
mettent fin à l'épisode déflationniste et relancent l'inflation, inflation
qui se poursuit ensuite en 1937-1938, puis pendant toutes les années de la
seconde guerre mondiale. Le sommet de l'inflation française au 20ème siècle
est atteint pendant les années de l'immédiat après-guerre, avec des taux
d'inflation annuels de l'ordre de 50-55% durant 4 années consécutives en
1945-1948. La hausse des prix se poursuit à un rythme plus modéré en 1949-
1952 (10-15% par an), mais ne prend véritablement fin qu'avec la
stabilisation opérée par le gouvernement Pinay en mars 1952, à nouveau au
prix d'une récession en 1953, dernière année d'inflation (légèrement)
négative de la France au 20ème siècle. A l'exception des années 1954-1955,
caractérisées par un retour à une totale stabilité des prix, et de l'année
1958, où l'inflation dépasse 15% (poussée inflationniste généralement
attribuée à la guerre d'Algérie, et qui se conclut par le retour au pouvoir
du Général de Gaulle et par une nouvelle stabilisation Pinay), l'inflation
française se stabilisera durant toutes les années 1950-1960 autour d'un
niveau de l'ordre de 5% par an. Les années 1970, caractérisées par de
fortes augmentations de salaires (et notamment du SMIC) dans la lignée des
évènements de Mai 1968 et dans un climat social et politique
particulièrement tendu, ainsi que par les chocs pétroliers de 1973 et 1979,
constituent le dernier épisode d'inflation élevée de la France au 20ème
siècle. Pendant 10 années consécutives, de 1974 à 1983, le taux d'inflation
sera supérieur (ou très légèrement inférieur) à 10%, ce qui constitue
l'épisode le plus important d'une inflation forte et prolongée en France en
temps de paix. La stratégie de désinflation est mise en place dès 1982-
1983, avec le blocage des prix et des salaires puis la désindexation des
salaires sur les prix décidés par le gouvernement Mauroy, et l'inflation
est « définitivement » éradiquée dès 1985-1986. Depuis 1986, le taux
d'inflation oscille entre 2% et 3% par an, et la hausse annuelle des prix
est même passée au-dessous de 1% en 1998. A la fin du siècle, la France est
ainsi revenue au niveau de l'inflation zéro du début du siècle.
La conclusion importante qui ressort de cette brève chronologie de
l'inflation en France au 20ème siècle est le rôle central joué par les deux
guerres mondiales et les immédiats après-guerres. Dans les deux cas,
l'inflation a été sensiblement plus importante dans les années suivant
immédiatement la guerre que durant les années de guerre elles-mêmes. Les
prix sont multipliés par 2,1 entre 1914 et 1918, puis par 2,7 entre 1918 et
1927, soit au total une multiplication des prix par 5,5 entre 1914 et
1927 ; les prix sont multipliés par 2,5 entre 1939 et 1944, puis par 8,7
entre 1944 et 1952, soit au total une multiplication des prix par 22 entre
1939 et 1952.[6] On remarquera également que la seconde guerre mondiale a
entraîné une inflation près de 4 fois plus importante que la première
guerre mondiale (prix multipliés par 5,5 entre 1914 et 1927, prix
multipliés par 22 entre 1939 et 1952). Ces trois faits majeurs (inflation
forte pendant les guerres, inflation encore plus forte dans les après-
guerres, et seconde guerre mondiale plus inflationniste que la première)
peuvent s'expliquer de la façon suivante.
Tout d'abord, l'inflation se caractérise toujours par une course-
poursuite entre les prix et les salaires : les prix augmentent, les
salariés demandent des compensations, les entreprises se rattrapent en
augmentant leurs prix, etc. Cette course-poursuite n'a souvent aucun effet
« réel », dans le sens où les prix et les salaires augmentent généralement
dans des proportions à peu près équivalentes, mais le fait est que personne
n'a intérêt à lâcher prise tant que les autres ne font pas de même. Or les
années de désorganisation et de baisse de la production, de privations et
de pénuries que constituent toujours les guerres sont des moments
particulièrement propices au déclenchement d'une course-poursuite entre les
prix et les salaires. Les années suivant immédiatement les guerres sont
encore plus propices que les années de guerre elles-mêmes, car les uns et
les autres entendent bénéficier rapidement des dividendes de la paix, et ce
bien que la production mette toujours un certain temps à retrouver le
niveau lui permettant de satisfaire ces revendications, sans compter que
l'effort de reconstruction exige généralement qu'une partie anormalement
élevée de la production soit consacrée durant quelques années à
l'investissement et non pas à la consommation. D'après les estimations
disponibles, il faut attendre 1923 pour que la production retrouve son
niveau de 1913, et 1948 pour que la production retrouve son niveau de
1938 : dans les deux cas, il fallut donc dix ans